(Québec) Le gouvernement du Québec entend donner plus de pouvoirs à la « police des polices » afin qu’elle puisse lancer des enquêtes sur des bavures policières présumées plus librement et veut lui transmettre beaucoup plus de dossiers qu’à l’heure actuelle.

Le projet de loi 18 déposé mercredi par la ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, prévoit que le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) se verra maintenant confier toutes les enquêtes sur des crimes présumément commis par des policiers.

À l’heure actuelle, le BEI enquête sur des interventions policières qui entraînent des blessures graves ou la mort, si un policier est accusé d’agression sexuelle ou si le plaignant est autochtone.

Si le projet de loi est adopté, les corps de police devront aussi obligatoirement informer le BEI « sans délai » de toute allégation de crime touchant l’un de leurs policiers.

La « police des polices » enquêtera sur tous les crimes. Un policier soupçonné d’avoir conduit en état d’ ébriété, par exemple, verra son dossier confié au BEI.

Le BEI pourra aussi lancer une enquête lorsqu’il « est informé d’une allégation relative à une infraction criminelle commise par un policier ». Le Bureau pourrait par exemple décider d’enquêter sur une vidéo qui circule sur les réseaux sociaux et qui montre une intervention potentiellement criminelle.

« On élargit et renforce les pouvoirs du BEI. Ils vont faire plus d’enquêtes qu’ils n’en font à l’heure actuelle », a expliqué la ministre de la Sécurité publique.

Le dépôt du projet de loi survient alors que le BEI a entamé trois enquêtes sur des policiers du Service de police de la Ville de Québec (SPVQ) après la médiatisation de plusieurs vidéos violentes.

La ministre a précisé que ces changements n’étaient pas motivés par ces affaires. Le projet de loi était dans les cartons depuis des mois, dit-elle, et découle du rapport du Comité consultatif sur la réalité policière, déposé en mai dernier.

Des enquêteurs qui n’ont pas fait Nicolet

Le projet de loi omnibus, avec ses 104 articles, touche d’ailleurs beaucoup plus que le BEI et s’attaque à plusieurs aspects du travail policier.

Il vise notamment à permettre aux corps policiers d’engager des enquêteurs qui n’ont pas suivi la formation pour devenir policiers.

La ministre Guilbeault pense que cette mesure pourrait favoriser l’embauche d’enquêteurs issus des minorités.

« Les corps de police rêvent d’avoir de la représentativité, mais ils doivent composer avec les corps de recrues qui sortent de l’École nationale de police, parce qu’en ce moment, tu peux juste embaucher un policier qui sort de l’École nationale de police », a noté Mme Guilbault.

Le gouvernement devra définir par règlement qui pourra ainsi être embauché par les corps de police. « Évidemment, ça va prendre des formations. Tu n’embauches pas quelqu’un qui n’a aucune formation policière ou autre. Puis il va avoir un complément, ça va être prévu par règlement, la formation d’appoint que doit suivre quelqu’un », a ajouté la ministre.