(Québec, Ottawa) La présidente du Conseil du trésor, Sonia LeBel, estime que la gouverneure générale, Mary Simon, a déjà fait plus d’efforts que le PDG d’Air Canada, Michael Rousseau, en arrivant à prononcer des passages en français lors du discours du Trône, mardi. Pendant ce temps, à Ottawa, un sénateur conservateur dépose un projet de loi pour exiger le bilinguisme à ce poste.

« Je vais vous dire que ce n’était pas idéal, mais je vais dire une chose et je vais comparer [ceci] à ce qu’on a dit sur M. Rousseau dernièrement : je pense qu’il faut saluer l’effort [de Mme Simon] », a lancé celle qui est aussi ministre responsable des Relations canadiennes et de la Francophonie canadienne.

« Elle a fait un effort, maintenant je suis consciente qu’elle a déjà appris plusieurs langues, que c’est une femme qui est intelligente et qu’elle va certainement s’améliorer, mais ce stade-ci, je pense qu’il faut souligner l’effort, effort que M. Rousseau n’avait même pas fait, je tiens à vous le rappeler », a poursuivi Mme LeBel, interrogée sur le français de Mme Simon, mardi.

PHOTO JACQUES BOISSINOT, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

La présidente du Conseil du trésor, Sonia LeBel.

Au début du mois, le PDG d’Air Canada a livré un discours entièrement en anglais devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain. Il avait admis ensuite n’avoir jamais ressenti le besoin d’apprendre le français après avoir vécu 14 ans à Montréal. Ces déclarations ont provoqué un tollé. La classe politique a notamment dénoncé avec vigueur la situation.

Mary Simon a prononcé son premier un discours du Trône, mardi. Elle l’a fait en disant environ un mot sur cinq en français. Ses premiers mots ont été en inuktitut, sa langue maternelle. Mme Simon parle l’anglais et l’inuktitut, mais pas le français. Lors de sa nomination, qui avait provoqué la controverse sur le sujet, elle s’était engagée publiquement à apprendre la langue de Molière.

Mercredi, certains élus francophones du Parti libéral du Canada ont applaudi ce qu’ils ont qualifié de « bon début ».

Un projet de loi sur le bilinguisme

Sur l’autre colline, le sénateur conservateur Claude Carignan, qui est monté au front mardi pour critiquer la prestation de Mary Simon, a joint le geste à sa parole de la veille. Il a déposé au Sénat un projet de loi visant à ajouter dans la liste des fonctions ciblées dans la Loi sur les compétences linguistiques le poste de gouverneur général.

« Ça me semble tellement évident que la chef d’État du Canada devrait connaître les deux langues officielles que c’est presque gênant d’avoir à déposer un projet de loi pour s’en assurer à l’avenir », a-t-il déclaré une fois la mesure législative déposée, déplorant la « désinvolture » du premier ministre Justin Trudeau en ce qui a trait à cette importante nomination.

« La nomination de Mary Simon au poste de gouverneure générale alors qu’elle ne comprend ni ne parle le français est un manque de respect flagrant envers plus de huit millions de Canadiennes et de Canadiens d’expression française, la très grande majorité se retrouvant au Québec », a poursuivi le sénateur. La veille, il avait qualifié de « gifle » cette lecture du discours du Trône.

À la défense des champs de compétence

Par ailleurs, la ministre Sonia LeBel, s’est dit « déçue » de constater à nouveau mardi « la propension marquée du gouvernement fédéral à empiéter » dans les compétences des provinces. Elle a souligné la question du logement, mais évidemment celle de la santé. Le premier ministre Justin Trudeau a notamment promis d’instaurer des normes nationales dans les centres d’hébergement de soins de longue durée.

« On sait ce qu’on doit faire en santé, on sait ce qu’on doit faire en habitation. Ce sont nos compétences, nos expertises et ce qu’on demande au fédéral, c’est que dans ces champs de compétence là, de nous transférer la juste part des Québécois en matière de sommes d’argent et sans condition. » Les provinces demandent une hausse des transferts en santé de 22 à 35 %.

Elle a aussi critiqué l’absence d’engagement du gouvernement Trudeau pour un meilleur contrôle des armes à feu à la frontière canado-américaine. « Je n’ai pas vu dans le discours du Trône, aucune ligne, à moins qu’on me corrige […] où on disait que les provinces doivent assumer leurs propres responsabilités et que le fédéral le fera aussi. Ce que j’ai lu, c’est que le fédéral accompagnera les provinces, mais on ne veut pas être accompagné, on veut prendre notre responsabilité, l’assumer et qu’ils prennent la leur », a-t-elle dit.