Collègues appelés en renfort, ouverture d'une salle adaptée aux familles, surveillance accrue : la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et l'Agence des services frontaliers du Canada mettent les bouchées doubles pour traiter les arrivées de migrants à la frontière canado-américaine au Québec. Hier, les médias ont été invités à visiter quatre points névralgiques de ce phénomène.

STATION DE TRANSMISSION OPÉRATIONNELLE DE LA GRC (4225, BOULEVARD DORCHESTER, WESTMOUNT)

C'est ici que sont analysées en direct les images de plus de 40 caméras vidéo de la GRC installées le long de routes clés à la frontière canado-américaine en territoire québécois. « En plus des caméras, nous avons aussi d'autres dispositifs électroniques qui nous alertent de la présence de personnes près de la frontière, note le caporal François Gagnon, porte-parole de la GRC. Si une entrée est détectée le long des 813 kilomètres de la frontière en territoire québécois, un opérateur contacte les agents de la GRC qui sont dans le secteur. L'idée est de donner le plus d'informations possible aux agents sur place, pour qu'ils sachent à quoi s'en tenir lorsqu'ils vont aller faire l'interception. » Au total, 452 personnes ont fait une demande de statut de réfugié au Québec en janvier 2017, alors qu'il y en avait eu 137 en janvier 2016. La vaste majorité entre illégalement pour faire la demande, puisque si elle était faite à un poste frontalier, elle serait souvent refusée.

MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Les images de plus de 40 caméras vidéo de la GRC installées à la frontière canado-américaine en territoire québécois sont analysées en direct à la Station de transmission opérationnelle de la GRC.

CHEMIN ROXHAM, SAINT-BERNARD-DE-LACOLLE

Hier, la visite des médias s'est déplacée au chemin Roxham, près d'Hemmingford, le point de passage le plus fréquenté par les migrants qui veulent entrer illégalement au Canada afin de pouvoir y faire une demande de statut de réfugié. À notre arrivé, un groupe de migrants - une famille avec un bébé de quelques mois - a passé et a été arrêté par les agents de la GRC devant les caméras et micros des journalistes. « Notre travail est de faire respecter les lois, mais nous nous efforçons de traiter les gens humainement », a expliqué Brian Byrne, sergent d'état-major de l'Équipe intégrée des frontières de la GRC. Norm Lague, agent-chef du US Border Patrol pour le secteur Champlain, a dit, debout du côté américain de la frontière, à un pas du Canada, qu'il avait remarqué une hausse du nombre de personnes entrant illégalement au Canada. « Ce n'est pas un nouveau phénomène, mais il y a manifestement une augmentation au cours des derniers mois », a-t-il dit, ajoutant que son équipe et lui ne pouvaient arrêter les gens qui quittaient les États-Unis de cette façon. « Nous leur disons que la GRC va les arrêter, mais souvent, c'est ce qu'ils veulent. »

La Presse, Martin Tremblay

À l'arrivée de La Presse au chemin Roxham, un groupe de migrants -une famille avec un bébé de quelques mois- a été arrêté par les agents de la GRC.

POSTE FRONTALIER DE SAINT-BERNARD-DE-LACOLLE (501, AUTOROUTE 15)

Les migrants arrêtés à la frontière par la GRC sont aussitôt emmenés au poste frontalier de Saint-Bernard-de-Lacolle, où ils sont reçus par l'Agence des services frontaliers du Canada. C'est à ce moment qu'ils font une demande de statut de réfugié, ce qui peut prendre plusieurs heures, voire la journée au complet. « Nous avons aménagé une salle temporaire au sous-sol où les familles peuvent se reposer, acheter de la nourriture dans des machines distributrices ou des plats que viennent livrer des restaurants, explique l'agente Dominique Fillion. Remplir les dossiers prend du temps, surtout pour une famille. Avec la hausse des arrivées, nous avons des collègues de Dorval qui viennent nous aider. » Une fois les documents remplis, les gens qui ne « représentent pas de danger pour la sécurité nationale », soit la quasi-totalité des migrants, sont libres. Ils rejoignent généralement des centres d'hébergement à Montréal en autobus ou en taxi, en attendant de se présenter devant un tribunal de l'immigration. « Souvent, les gens quittent [le poste frontalier] dans la journée, mais il peut arriver qu'ils doivent passer la nuit ici, sur des canapés mis à leur disposition », dit l'agente.

Martin Tremblay, La Presse

Les migrants arrêtés à la frontière par la GRC sont aussitôt emmenés au poste frontalier de Saint-Bernard-de-Lacolle, où ils sont reçus par l'Agence des services frontaliers du Canada.

DÉTACHEMENT DE LA GRC, SAINT-JEAN-SUR-RICHELIEU (750, BOULEVARD INDUSTRIEL)

C'est aux bureaux de la GRC à Saint-Jean-sur-Richelieu qu'une équipe se penche sur l'analyse de l'identité de certaines personnes arrêtées à la frontière, incluant l'analyse des empreintes digitales, explique Kyle Archambault, analyste en renseignement à la GRC. « Nous consultons plusieurs bases de données internationales pour identifier les gens et tenter de déterminer s'ils posent un risque à la sécurité nationale. Nous analysons également les médias sociaux et des informations ouvertes, comme ce qu'on trouve sur Google. Nous essayons aussi d'établir l'implication des réseaux de trafic humain. » C'est au sous-sol des bureaux de la GRC à Saint-Jean-sur-Richelieu que l'on retrouve des cellules pour détenir des gens jugés dangereux le temps que leur dossier soit traité. « On ne parle pas ici d'une procédure uniquement pour des gens qui entrent illégalement, mais aussi pour des gens arrêtés pour de la contrebande d'armes ou de cigarettes, par exemple », affirme le caporal Gagnon.

MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

L'analyse de l'identité de certaines personnes arrêtées à la frontière se fait aux bureaux de la GRC à Saint-Jean-sur-Richelieu.