L'hiver a été catastrophique pour les motoneigistes du Québec alors qu'un nombre record d'entre eux se sont tués en seulement quatre mois. Et la saison n'est pas tout à fait terminée.

Trente-quatre personnes sont mortes depuis décembre dans un accident de motoneige, dont des enfants de 4, 7 et 8 ans.

Si le bilan routier du Québec s'améliore d'année en année, ce mode de transport semble échapper à la tendance positive.

Au Québec, chaque motoneige a trois fois plus de risque d'être impliquée dans un accident mortel qu'une automobile, malgré son utilisation beaucoup plus restreinte dans le temps et en distance.

Hausse spectaculaire

Tous les acteurs du milieu sont d'accord: le bilan des morts en motoneige est douloureusement élevé cette année, une hausse importante par rapport aux 23 accidents mortels enregistrés en 2013-2014. «Ça nous inquiète», a affirmé à La Presse le ministre des Transports, Robert Poëti.

Du côté de la Sûreté du Québec (SQ), «on est bien au fait des statistiques», a indiqué le lieutenant Jean-François Campeau. «C'est une de nos priorités d'améliorer le bilan récréotouristique», a-t-il ajouté.

C'est la Fédération des clubs de motoneigistes du Québec (FCMQ) qui compile les statistiques pour l'ensemble de la province. «Cette année, le nombre de décès a été exceptionnel», a affirmé en entrevue Serge Ritcher, président de la FCMQ.

Conditions difficiles

L'état particulièrement glacé des sentiers a pu entraîner davantage d'accidents cette année, avance Serge Ritcher. «Il a manqué de neige, on n'a pas eu les accumulations normales. En plus, on a eu des froids historiques au mois de février, a-t-il avancé. C'est plus facile d'avoir des pertes de contrôle.» Malgré ces conditions, beaucoup de motoneigistes ont roulé, augmentant d'autant les risques d'accident.

La SQ croit aussi que ces deux hypothèses peuvent être des «facteurs contributifs» au lourd bilan de l'hiver. Le corps policier veut toutefois analyser plus en profondeur les circonstances de chaque accident afin de se prononcer.

Mais les Québécois seraient peut-être aussi plus tolérants pour la conduite avec facultés affaiblies derrière le guidon que derrière le volant. En entrevue, le ministre Robert Poëti s'est dit préoccupé par le nombre d'accidents qui pourraient être dus à la consommation d'alcool.

«Honnêtement, la conscientisation sur l'alcool a été plus rapide sur les routes à travers les années que sur les sentiers», a déploré le ministre. Selon lui, «plusieurs accidents» sont liés à ce problème.

Jean-François Campeau, lieutenant à la SQ, a indiqué que le corps policier consacrait 10 000 heures par année à la surveillance des activités de motoneiges et de quads, dont des tournées des relais où les utilisateurs s'arrêtent pour prendre une pause.

Des décès partout au Québec

Les accidents mortels de motoneiges se sont produits un peu partout au Québec.

Début mars, un garçon de 7 ans a été tué par la motoneige que conduisait sa grand-mère, qui en avait perdu la maîtrise lors d'une réunion familiale au Saguenay - Lac-Saint-Jean. À peine quelques jours plus tard, c'est un enfant de 4 ans, qui ne portait pas de casque, qui a péri alors que la motoneige où il se trouvait avec deux adultes a capoté.

Selon Jean-Marie De Koninck, président de la Table québécoise de la sécurité routière, l'application de la recette agressive qui a connu tant de succès auprès des automobilistes pourrait améliorer le bilan de la motoneige.

«C'est sûr qu'on aurait un meilleur bilan à la fin de l'année», a-t-il dit en entrevue.

Même son de cloche dans le milieu. «Ce dont on a besoin, ce sont des campagnes de publicités-chocs, un peu comme celles que le ministère des Transports et la Société d'assurance automobile du Québec ont faites pour montrer les dangers de la route», a réclamé Serge Ritcher.

Quatre touristes morts

Autre facteur qui pourrait expliquer certains décès : l'inexpérience. Dans deux cas distincts, la découverte des grands espaces de deux touristes français s'est conclue de façon brutale, cet hiver, alors qu'ils ont trouvé la mort sur leur motoneige.

«On travaille en collaboration avec nos partenaires pour éviter ces situations, a expliqué le lieutenant Campeau de la SQ. Ça peut être un facteur contributif à certaines collisions.»

Toutefois, a-t-il ajouté, «il y a aussi des gens ayant beaucoup d'expérience qui peuvent dépasser leurs propres limites avec le même résultat».

Deux autres touristes ont aussi perdu la vie, dont un Américain.