Les Canadiens feraient majoritairement confiance au gouvernement fédéral pour protéger leurs données personnelles. Et même s'ils pensent que cela viole leur vie privée, la plupart ne s'opposent pas à ce qu'Ottawa collecte leurs renseignements.

Selon un sondage mené conjointement par l'Environics Institute ainsi que l'Institut sur la gouvernance, 64% des Canadiens seraient aussi favorables à un échange de leurs données entre les différents services de renseignements du pays. Le gouvernement récolte des informations sous différentes formes. Il peut entre autres le faire lorsqu'un citoyen traverse une frontière, remplit un formulaire gouvernemental ou fait une demande de passeport.

Cette étude réalisée cet été révèle que les citoyens ne semblent pas se soucier de déterminer qui détient leurs informations. Ainsi, 58% disent ne pas voir (ou ne pas être en mesure de voir) de différence entre la protection des renseignements assurée par le gouvernement fédéral et celle par une entreprise privée, comme une banque ou une entreprise de câblodistribution.

Michel Juneau-Katsuya, ancien cadre du Service canadien du renseignement de sécurité, se dit préoccupé par les résultats. Selon lui, les Canadiens font preuve d'une «trop grande confiance» envers le gouvernement en matière de gestion de renseignements privés. Il pense que les citoyens n'ont pas tiré les leçons des révélations faites par l'ancien informaticien américain Edward Snowden. Ce dernier a soulevé un débat planétaire sur la protection des renseignements privés en 2013, lorsqu'il a révélé plusieurs détails sur les programmes de surveillance de masse mis sur pied par les gouvernements. «Il y a peut-être une certaine naïveté dans la population. Il y a sous-estimation des dangers qu'il y a à autoriser le gouvernement à faire de l'espionnage des Canadiens», dit-il en entrevue à La Presse.

Toujours selon M. Juneau-Katsuya, le gouvernement de Stephen Harper a éliminé au cours des dernières années certains mécanismes pour vérifier le travail des agences de renseignements. Ottawa a notamment aboli le poste d'inspecteur général du SCRS. «Il n'y a plus de chien de garde», illustre-t-il.

L'enquête a été réalisée dans le cadre de l'AmericasBarometer, importante étude sur l'opinion publique étendue dans 26 pays des Amériques. Plus de 1541 Canadiens y ont participé. Le sondage n'indique pas la marge d'erreur, mais les répondants ont été pondérés selon l'âge, le sexe et la région de manière à correspondre à la réalité canadienne.