Malgré leurs déficiences bien connues, les wagons-citernes DOT-111 continueront de transporter du pétrole brut sur les chemins de fer nord-américains pendant des années, ont convenu des acteurs de l'industrie ferroviaire réunis hier en conférence à Ottawa.

Les lacunes de ce modèle, impliqué dans le déraillement mortel de Lac-Mégantic l'été dernier, sont connues depuis 20 ans. Des rapports publiés dès 1991 aux États-Unis prévenaient que sa coque perce trop facilement en cas de déraillement.

Dans la foulée de la tragédie de Lac-Mégantic, plusieurs réclament qu'on les retire de la circulation. Même l'industrie ferroviaire est favorable à cette mesure, a indiqué Sam Berrada, responsable de la sécurité du Canadien National (CN), lors d'une conférence organisée par le Groupe de recherche sur les transports au Canada.

Des cinq wagons-citernes impliqués dans le déraillement de Plaster Rock, au Nouveau-Brunswick, la semaine dernière, trois étaient conçus selon de nouvelles normes adoptées volontairement par l'industrie ferroviaire en 2011. Ils ont mieux résisté au choc que les deux modèles plus anciens.

Le gouvernement Harper a annoncé vendredi un règlement qui rend obligatoires les normes volontaires adoptées en 2011. Les citernes devront dorénavant être construites avec une coque plus épaisse et être munies de boucliers.

Mais Ottawa n'a imposé aucun échéancier pour la mise au rancart des anciens modèles. C'est pourquoi le parc de vieux wagons-citernes restera sur les rails pendant des années, peut-être même pendant une décennie, ont reconnu différents acteurs et observateurs de l'industrie rassemblés hier.

Facture de 1 milliard

«C'est clairement un délai qui sera mesuré en années, a convenu Robert H. Ballantyne, président de l'Association canadienne de transport industriel. Il serait physiquement impossible de le faire en quelques mois.»

Il note que le remplacement de tous les wagons-citernes devrait coûter environ 1 milliard de dollars, une facture qui sera refilée à l'ensemble des entreprises qui expédient des biens par rail et, éventuellement, aux consommateurs. Autre problème de taille, souligne M. Ballantyne, il est tout simplement impossible de construire des dizaines de milliers de nouveaux wagons en quelques mois.

Malcolm Cairns, ex-président du Groupe de recherche sur les transports au Canada, note que la mise à niveau des DOT-111 coûte environ 70 000$ par unité. Cela explique pourquoi, à ses yeux, le gouvernement fédéral devra forcer la main de l'industrie afin qu'elle remplace ses vieux modèles.

«Ma propre recherche avance que ce processus pourrait raisonnablement prendre cinq ans, a indiqué M. Cairns. Ça ne se fera pas du jour au lendemain.»

Dans l'intervalle, indique M. Cairns, le gouvernement et l'industrie pourraient augmenter le nombre d'inspections ou encore réduire les limites de vitesse pour certains trains.

Au bureau de la ministre des Transports, Lisa Raitt, on a souligné que des mesures additionnelles sur ce modèle sont actuellement discutées par un comité consultatif.