Licencié par le chef de l'Unité permanente anticorruption (UPAC), Robert Lafrenière, Jacques Duchesneau se prépare à revenir par la porte d'en arrière. Il discute d'un nouveau contrat avec son précédent employeur, le ministère des Transports, pour participer à la mise en oeuvre des recommandations de son percutant rapport dévoilé le 1er septembre.

Au cabinet du ministre des Transports, Pierre Moreau, l'attachée de presse Andrée-Lyne Hallé a souligné qu'une «réflexion de M. Duchesneau sur une possible collaboration sur la mise en place de certaines mesures annoncées est actuellement en cours».

Il y a une semaine, la direction de l'UPAC a mis fin au contrat de M. Duchesneau qui devait se poursuivre jusqu'en mars prochain - avec un salaire annuel de 200 000$. Aucune compensation financière n'a été offerte à l'ancien directeur de la police de Montréal après que les avocats se furent penchés sur les engagements du gouvernement à son endroit.

La semaine dernière, en commission parlementaire, la sous-ministre des Transports, Dominique Savoie, a indiqué que le Ministère avait amorcé des discussions avec son ancien responsable de la lutte contre la collusion dans l'adjudication des contrats du MTQ.

«Nous avons aussi commencé à regarder le type de collaboration que nous pourrions avoir sur certaines actions que nous pourrions prendre, développer une expertise en soumissions, former nos enquêteurs... Ce type de discussions là», a-t-elle expliqué.

Selon elle, «la décision prise par l'UPAC ne concerne évidemment pas le ministère des Transports».

«Nous sommes en discussion pour voir [si M. Duchesneau] souhaite continuer à travailler avec le ministère des Transports pour nous aider à mettre en place le plan d'action. La décision n'est pas prise, mais nous sommes en discussion, effectivement», a indiqué Mme Savoie. Après la publication du rapport de Jacques Duchesneau, le gouvernement a annoncé qu'il comptait faire une embauche massive au ministère des Transports afin de détenir de nouveau une expertise à l'interne, une carence importante qu'a constatée l'ex-policier.

L'embauche de près d'un millier de nouveaux employés d'ici cinq ans au MTQ, surtout des ingénieurs et des techniciens, reste la réponse la plus importante au rapport parmi la quarantaine de gestes annoncés à la fin du mois d'octobre.

La présidente du Conseil du Trésor, Michelle Courchesne, a reconnu que, malgré l'embauche de plus de 300 ingénieurs en cinq ans, le gouvernement économiserait 34 millions par rapport aux coûts de la sous-traitance.

Québec a également annoncé des sanctions pour les erreurs, les omissions et d'autres problèmes. Ce sont les firmes de génie-conseil qui se verront imputer les coûts supplémentaires qui en découleront. Des sanctions seront également imposées aux entreprises qui réclament des sommes supplémentaires indues - les «extras» décrits comme systématiques dans le rapport Duchesneau.

Québec va aussi mettre en place un registre des entrepreneurs qui auront été reconnus coupables de crimes économiques et de crimes liés à la collusion, la corruption ou la fraude, ce qui les rendra inadmissibles aux contrats publics.

Les organismes publics - y compris les municipalités - auront désormais le loisir de rejeter des soumissions anormalement basses, et les entreprises qui auront demandé les documents d'appels d'offres, mais qui n'auront pas fait de soumission seront rencontrées afin de déterminer si elles ont été entraînées dans un système de collusion avec leurs concurrents. C'est sur ce plan que l'ancien policier Duchesneau pourrait être consulté. Ces mécanismes nécessiteront une équipe de surveillance et d'enquêteurs, et l'expertise de M. Duchesneau serait précieuse.

Les mesures de surveillance et de protection qui s'appliquent pour les contrats de plus de 40 millions seront désormais en vigueur pour les contrats de moindre valeur. Toutes les mesures d'analyse des soumissions, de surveillance des chantiers et d'évaluation des travaux seront resserrées.