Tout allait mal. En un petit mois, tous les malheurs possibles sont arrivés: rupture amoureuse, mort de son père («mon meilleur ami»), déménagement à Montréal, où il ne connaissait personne... «Je pense que c'est la solitude qui m'a mené là, la solitude alors que je vivais la période la plus déstabilisante de ma vie.»

Certes, à la base, Philippe Ouellette dit qu'il avait toujours été quelqu'un d'extrêmement négatif, toujours prompt à voir le côté sombre des choses.

Autour de lui, personne n'a vu venir quoi que ce soit. Gentiment, au bureau, les gens lui offraient leurs condoléances pour la mort de son père. Lui se replongeait aussitôt dans son travail, professionnel jusqu'au bout des doigts.

Il a fait «cela» à froid. À jeun, mais dans un état second. «Un souvenir affreux», évoque-t-il.

«On dit que, quand ça ne va vraiment pas bien, il y a une partie de nous qui veut vivre et une qui veut mourir, et que la ligne entre les deux est très mince. Moi, tout m'aspirait vers la mort. Je n'avais plus du tout envie de vivre. Et j'étais certain que, en m'enlevant la vie, ce serait un bon débarras pour tout le monde, moi qui avais des idées noires et qui étais négatif depuis si longtemps...»

«Ce jour-là, il n'y a pas eu d'élément déclencheur particulier. Juste la certitude que là, c'était terminé, qu'il fallait juste lâcher prise, que plus rien n'en valait la peine. Je me sentais comme un boxeur au bord d'un knock-out, qui s'est déjà relevé trop de fois et qui finit par constater qu'il n'en peut plus, qu'il est mieux de rester coucher pour de bon.»

Pendant qu'il passait à l'acte, le téléphone a sonné. Et là lui est venue l'envie irrépressible de répondre et de dire: «Vous avez gagné, je m'en vais.»

C'était une simple connaissance, un collègue, qui s'est précipité à son chevet. Très vite, les choses ont été mises en place. Info-Suicide, le psy, «et surtout ma super-médecin, Julie Lajeunesse, du CLSC».

Cet épisode a tout changé. «Depuis, j'ai compris la valeur de la vie.»

«Six ans plus tard, j'ai traversé une autre rupture amoureuse, mais cette fois je savais quoi faire: m'ouvrir, accepter le fait que j'avais besoin des autres.»

«Quand quelqu'un a trop bu, on a maintenant le réflexe de lui enlever ses clés et de l'empêcher de prendre sa voiture. On devrait agir de même avec quelqu'un qui n'a pas l'air de bien aller. Il faut comprendre que cette personne a tout autant les facultés affaiblies. Il faut l'aider.»

Et la vie, aujourd'hui? Tout baigne, et il a même réalisé un rêve d'enfance, celui de faire de la musique. Il est l'un des membres fondateurs du groupe NAIVE, dont il est le bassiste. «On a fait les FrancoFolies, l'une de nos chansons s'est déjà hissée au palmarès des 40 chansons les plus écoutées. Si ma vie s'était arrêtée il y a 13 ans, je n'aurais pas vécu tout cela.»