La nomination de l'archevêque de Québec, Marc Ouellet, comme préfet de la Congrégation pour les évêques signifie que le Québec sera touché par une tendance jusqu'à maintenant limitée au reste du Canada, selon un réputé vaticaniste.

John Allen, de l'hebdomadaire américain The National Catholic Reporter, estime que les prochaines nominations d'évêques au Québec iront à des prélats qui affirment publiquement le magistère de l'Église, notamment en matière de protection de la vie. «On constate cela aux Etats-Unis, dit M. Allen. Et aussi au Canada anglais, par exemple à Toronto avec l'archevêque Tom Collins et Vancouver avec l'archevêque Michael Miller.»

Marc Ouellet était lui aussi un exemple de cette tendance, mais c'est le seul au Québec. Comme lui, les évêques américains nommés dans les dernières années sont souvent mêlés à des controverses. L'archevêque de Denver a autorisé une école catholique à expulser l'enfant d'un couple de lesbiennes et celui de Phoenix a excommunié une religieuse qui, à titre de présidente du bureau d'éthique d'un hôpital catholique, a autorisé un avortement rendu nécessaire parce qu'une grossesse menaçait la survie d'une femme.

La nomination de Mgr Ouellet à Rome n'est donc pas un constat que la greffe n'a pas pris au Québec. «Si on avait seulement voulu l'éloigner de Québec, on aurait choisir un poste moins prestigieux, dit M. Allen. C'est l'un des trois plus importants au Vatican, avec le secrétaire d'État et le préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi. Le pape veut clairement s'entourer de disciples théologiques.»

Gilles Routhier, un prêtre diocésain de Québec qui enseigne la théologie à l'Université Laval, pense que l'influence de Mgr Ouellet au Québec sera limitée. «Les évêques sont souvent choisis parmi les évêques auxiliaires, dont la nomination suit généralement les souhaits des évêques locaux», dit M. Routhier.

Mais pour les grands centres, comme Montréal ou Québec, les nouveaux archevêques ne sont souvent pas des évêques auxiliaires, prévient M. Allen. «L'influence de Mgr Ouellet sera très, très importante pour l'Église québécoise», dit-il.

L'archevêché de Montréal pourrait d'ailleurs devenir vacant l'an prochain. Le cardinal Jean-Claude Turcotte aura 75 ans en 2011, l'âge canonique de la retraite. Selon une source ecclésiastique, Mgr Turcotte évoque souvent, dans des réunions, que certains dossiers seront réglés par «son successeur».

La nomination de Mgr Ouellet indigne France Bédard, présidente de l'Association des victimes de prêtres du Québec. «J'avais demandé sa démission et il est promu, dit Mme Bédard. C'est un peu comme les prêtres pédophiles qu'on déplaçait de paroisse en paroisse : on change de pays un évêque qui n'a rien fait pour lutter contre la pédophilie et pour aider les victimes.»