Denis Coderre promet de mener la vie dure aux propriétaires d'immeubles insalubres qui accumulent les constats d'infraction sans jamais améliorer l'état de leurs logements où habitent, généralement, de nouveaux arrivants et autres personnes vulnérables.

Ainsi, Montréal promet d'ajouter des inspecteurs à la douzaine déjà en place à la direction de l'Habitation, de créer un registre public des immeubles insalubres dont les propriétaires refusent de se conformer, et de recourir à la menace de saisie des bâtiments de propriétaires négligents. 

«Le nouveau statut de métropole nous donne le plein pouvoir en matière d'habitation», a répété le maire sortant dans un point de presse devant un immeuble de l'avenue Dupuis, dans Côte-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce, appartenant  la famille Rossdeutscher, souvent mentionné par les organismes d'aide aux locataires de taudis et qui a même déjà recouru aux tribunaux pour tenter de restreindre le pouvoir des inspecteurs de la Ville.

Flanqué du maire de l'arrondissement, Russel Copeman, Denis Coderre a vanté son avant-gardisme en matière de lutte contre l'insalubrité, notamment en créant un fonds de roulement de 250 000 $ pour apporter les correctifs d'urgence aux bâtiments quand les propriétaires refusent de le faire, avant de leur envoyer la facture. 

En matière de lutte contre les taudis, chaque arrondissement est responsable des inspections et des mises à l'amende. Mais les inspecteurs de la direction de l'Habitation de la Ville viennent en renfort dans les cas plus complexes. C'est cette équipe que le maire veut renforcer. 

Saisies

Mais il parle aussi de saisie de bâtiments. 

«Notre pouvoir ultime, c'est le pouvoir de saisie. C'est délicat parce que ça touche au droit fondamental à la propriété. Mais on a une capacité d'appropriation qui va nous permettre d'avoir les coudées franches. (...) On voit parfois que malgré tous les reportages, ça a continué quand même. Notre rôle est de protéger les locataires», a poursuivi le maire sortant. 

«Le registre sera aussi un outil important. Ce sera un registre public des immeubles les plus problématiques. On n'attendra pas trop longtemps. On y indiquera les immeubles quand un constat d'infraction est contesté, qu'il y aura un nombre important ou une fréquence importante de constats. On va dire aux Montréalais: cet immeuble est problématique. Ça va avoir un effet, parce qu'ils ne pourront pas louer ces logements», a poursuivi M. Copeman. 

Un bon règlement, mal appliqué

Claude Dagneau, de l'Organisation d'éducation et d'information logement de Côte-des-Neiges (OEIL), trouve que ce registre est une bonne idée. Mais pour le reste, il trouve que la Ville aurait déjà pu faire beaucoup plus sans même mettre en place les nouvelles mesures proposées.

«Les inspecteurs de l'arrondissement n'ont même pas d'appareil pour détecter la présence d'humidité dans les murs. Ils échappent beaucoup de problèmes», explique-t-il.

Sa consoeur Annie Lapalme ajoute que la Ville a déjà un règlement qui pourrait donner beaucoup de mordant à ses interventions, mais qu'elle ne l'applique pas pleinement. 

«Cent dix constats d'infraction ont été donnés à Côte-des-Neiges en 2016. Nous, on a des plaintes chaque jour. Vous ne pouvez pas imaginer les conditions dans lesquelles les gens vivent. Et ça va en empirant», déplore-t-elle. 

L'OEIL estime que la Ville pourrait donner plus de contraventions, et surtout, qu'elle a le pouvoir d'en donner de nouvelles à chaque échéance d'une contravention non payée par les propriétaires. 

«Des amendes de 10 000, 15 000 $, ça marcherait mieux que les 300$ que les propriétaires reçoivent en ce moment. Ça, ça ne fait rien», dit-elle.