À quelques jours de son 50e anniversaire, le Parti québécois (PQ) a été presque rayé de la carte électorale, hier soir. Il était en voie de faire élire 10 députés, autant que l'autre parti indépendantiste, Québec solidaire.

Battu dans sa propre circonscription de Rosemont, le chef Jean-François Lisée a annoncé sa démission en fin de soirée.

Devant ses partisans, il a pris acte du profond désir de changement qui s'est exprimé dans le raz-de-marée de la Coalition avenir Québec, un « courant puissant, irrésistible ».

« Pour l'emporter, il nous fallait remonter les chutes du Niagara à la rame, a-t-il illustré. Et nous avons ramé. Nous avons ramé à nous arracher la peau des mains. »

« Le verdict de Rosemont met également un terme à l'emploi le plus formidable que j'ai jamais eu, celui de chef du Parti québécois. Je serai à vos côtés lors des prochaines batailles, toujours. Je prends ma grande part de responsabilité dans le résultat d'aujourd'hui », a affirmé Jean-François Lisée.  

Le PQ n'avait jamais obtenu moins de 23 % des suffrages depuis 1970. Il était en voie d'en obtenir 17 % hier, ce qui lui fera perdre son statut de groupe parlementaire reconnu à l'Assemblée nationale.

Députés emportés par la vague caquiste

Ses appuis ont été sapés, autant sur sa droite que sur sa gauche.

La vague caquiste a emporté plusieurs députés sortants : Nicolas Marceau (Rousseau), Diane Lamarre (Taillon), Maka Kotto (Bourget), Alain Therrien (Sanguinet) et Mathieu Traversy (Terrebonne). Les nouveaux candidats Jean-Martin Aussant (Pointe-aux-Trembles) et Paul St-Pierre-Plamondon (Prévost) ont également été battus.

Dans les centres urbains, les châteaux forts de Rosemont et Hochelaga-Maisonneuve, à Montréal, ainsi que Taschereau, dans la capitale, sont tous tombés aux mains de Québec solidaire (QS).

Les appuis cumulés du PQ et de QS étaient en voie de totaliser 33 %, davantage que ceux des libéraux. M. Lisée a profité de son discours pour saluer les centaines de milliers de jeunes électeurs qui ont appuyé les deux partis.

« Lorsqu'on finira de calculer les votes, on se rendra compte qu'on assiste à l'éruption d'une nouvelle génération de souverainistes au PQ et à QS qui, additionnée, pointe à nouveau la boussole québécoise vers l'indépendance », a-t-il déclaré.

Les réélections de la vice-cheffe Véronique Hivon (Joliette), de Pascal Bérubé (Matane-Matapédia) et de Catherine Fourier (Marie-Victorin) sont parmi les rares bonnes nouvelles de la soirée. Le parti a également conservé plusieurs circonscriptions sur la Côte-Nord, dans le Bas-Saint-Laurent et en Gaspésie. Il a même fait deux gains, à Ungava et aux Îles-de-la-Madeleine.

Né de la fusion du Mouvement souveraineté-association de René Lévesque et du Ralliement national le 11 octobre 1968, le Parti québécois doit célébrer son 50e anniversaire dans neuf jours.

Dans les rangs péquistes, le pessimisme était palpable dans la dernière ligne droite de la campagne. Et il l'était encore davantage en début de soirée sur le plancher de l'Usine C, la salle de spectacle où se rassemblaient les membres du PQ.

Les partisans sont arrivés au compte-gouttes, même si la couverture des réseaux télévisés était bien entamée. Ils ont regardé les résultats défiler en silence sur les deux grands écrans.

« Peu importe les résultats ce soir, on est ici pour se donner un élan pour la suite », a déclaré l'animateur de la soirée d'entrée de jeu.

Les applaudissements se sont faits rares dans la salle pendant la soirée. Lorsque Radio-Canada a annoncé que la Coalition avenir Québec allait former un gouvernement majoritaire, le son a été brusquement coupé, et remplacé par une chanson de Daniel Boucher.

Fin de campagne ardue

Jean-François Lisée est devenu chef du PQ il y a deux ans en proposant de reporter la tenue d'un référendum sur l'indépendance à un éventuel deuxième mandat.

Il a lancé sa campagne sous le slogan « Sérieusement », alors que les sondages situaient son parti en troisième place dans les intentions de vote. Avec sa vice-cheffe Véronique Hivon, il a cherché d'entrée de jeu à donner un aspect enjoué à sa campagne, comme en témoigne son autocar multicolore au design psychédélique.

Avant le lancement des hostilités, il a lancé une proposition remarquée sur les boîtes à lunch, suivie par celle de créer un « Tinder du covoiturage ».

Sauf qu'à plusieurs reprises, le chef péquiste a été placé sur la défensive par les écrits controversés de sa candidate dans Mercier, Michelle Blanc.

La fin de la campagne a mis en relief la profonde division du vote indépendantiste entre le Parti québécois et Québec solidaire. Une tendance qui a mené à l'attaque-surprise de M. Lisée contre Manon Massé au dernier débat des chefs.