Le Parti québécois a présenté ce matin ses cibles pour réaliser «l'indépendance énergétique», mais il n'a pas dit quelles mesures il entendait prendre pour l'atteindre. Ce sera décidé dans une future «stratégie énergétique» qu'on adopterait dans la première année d'un mandat, a promis sa chef, Pauline Marois.

Le plan du PQ reprend l'objectif du Réseau des ingénieurs du Québec, qui veut diminuer la consommation de pétrole de 30% d'ici à 2020 et de 60% d'ici à 2030. Il propose aussi de diminuer les émissions de gaz à effet de serre (GES) pour qu'ils soient, en 2020, de 25% inférieurs à ce qu'ils étaient en 1990.

Le PQ rappelle que le déficit commercial du Québec, l'année dernière, était de 24 milliards de dollars, dont 13 milliards à cause de l'importation de pétrole. Mais on ne sait pas encore comment le PQ diminuerait la «dépendance» du Québec au pétrole.

Hier, Mme Marois a dévoilé ses propositions pour les transports en commun. Ce matin, elle n'a pas détaillé celles qui concernent le transport automobile. « Cela nécessite un travail monumental», dit son candidat Daniel Breton (Sainte-Marie-Saint-Jacques), cofondateur du groupe Maîtres chez nous 21e siècle.

Alors que la majorité des secteurs ont diminué leurs émissions de GES depuis 1990, celles du transport routier ont augmenté de 32,9%. Le nombre de véhicules croît cinq fois plus vite que la population. Pour diminuer la consommation de pétrole, le PQ adoptera-t-il un système bonus-malus pour encourager l'achat de véhicules qui consomment peu et taxer les énergivores? Fera-t-il cas des demandes de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM), qui veut augmenter la taxe sur l'essence et moduler les droits d'immatriculation pour financer les transports en commun?

«Ce sont des avenues qu'on explorera», a répondu Mme Marois. Elle promet de consulter les groupes environnementalistes dans sa démarche.

Si le PQ n'est pas en mesure de détailler ses mesures, c'est parce qu'il doit d'abord «réparer le gâchis des libéraux», a avancé M. Breton. Il a énuméré une série de dossiers énergétiques à régler, comme Gentilly-2, que le PQ veut déclasser et fermer, et les gaz de schiste, sur lesquels le PQ veut un moratoire complet.

Pas d'exploitation pétrolière, demandent les environnementalistes

Mme Marois a donné sa conférence de presse à la nouvelle Maison du développement durable, qui abrite notamment des organismes environnementalistes comme Équiterre et la Fondation David Suzuki. Leurs porte-parole ont assisté à l'annonce, qu'ils accueillent favorablement malgré certaines réserves.

Steven Guilbeault, d'Équiterre, ne s'inquiète pas trop de l'absence de détails du plan du PQ. Il rappelle que les plans pour réduire les GES existent déjà. Les sociétés de transports de Montréal et de Laval ont déjà des propositions pour électrifier leurs véhicules et prolonger le métro. Le PQ les reprend dans ses propositions de transport en commun. «Ce qu'il faut maintenant, c'est un mécanisme pour implanter ces idées», soutient-il. Le PQ propose un nouveau fonds de 10 milliards de dollars notamment pour favoriser des «secteurs de pointe», comme les transports électriques. «C'est une excellente idée», croit M. Guilbeaut.

Il s'inquiète toutefois de voir que Mme Marois favorise l'exploitation pétrolière en Gaspésie et n'exclut pas d'exploiter le gisement Old Harry dans le golfe du Saint-Laurent. «Ce n'est pas la voie qu'on doit suivre. On ne peut pas faire une chose et son contraire», dit M. Guilbeault. En exploitant le pétrole, le PQ contredirait son objectif d'en diminuer la consommation.

Comme lui, Karel Mayrand, de la Fondation David Suzuki, est favorable aux recommandations de la CMM. Il attend de voir la réponse du PQ et des autres partis politiques. Au sujet du pétrole, il résume ainsi le problème: «C'est facile d'annoncer une cible, mais c'est plus difficile de l'atteindre.» Il se dit toutefois satisfait du processus de consultation annoncé pour la stratégie du PQ.

Il croit que le nouveau «cadre d'analyse», soit d'éliminer la « dépendance au pétrole », est « audacieux ». Cela permettra selon lui de bien orienter la stratégie. «Vouloir diminuer la consommation de pétrole, c'est un changement important. C'est bon pour l'économie autant que pour l'environnement.»