Il faut une commission parlementaire avant de se positionner sur l'amiante, dit Pauline Marois. Mais elle semble néanmoins avoir déjà assez d'information pour prédire le résultat de cette commission.

«C'est sur (la diversification de l'économie) qu'il faut travailler pour voir comment dans la région (d'Asbestos), on peut progressivement ou complètement se débarrasser de l'exploitation de l'amiante. Parce que sans doute que les conclusions qui vont être tirées iront dans ce sens-là», a-t-elle déclaré cet après-midi en visite dans un centre sportif de Terrebonne.

La Coalition avenir Québec a proposé aujourd'hui de bannir l'exportation de l'amiante. Québec solidaire et Option nationale proposent la même chose. Mme Marois n'a pas voulu s'y engager.

Le PQ refuse depuis plusieurs mois de trancher clairement sur la question de l'amiante. Il reconnaît que «toutes les fibres de l'amiante» sont cancérigènes. Et il a dénoncé le prêt de 58 millions $ confirmé un vendredi après-midi en juin par le gouvernement Charest à la mine Jeffrey.

Sa chef a rappelé aujourd'hui que la Thaïlande veut interdire l'amiante, comme l'ont déjà fait une cinquantaine de pays. Or, la Thaïlande était un des principaux clients anticipés de la mine.

Malgré tout, Mme Marois répète qu'il manque d'information pour prendre position. Pourtant, lors de l'annonce de la relance, son candidat Réjean Hébert avait été cinglant. «On ne voudrait pas habiter dans des maisons isolées avec de l'amiante. Pourquoi est-ce qu'on exporte cette matière dans d'autres pays et qu'on expose nos travailleurs à ces fibres?», avait déclaré (https://goo.gl/ibKjP) le médecin et  ancien doyen de la Faculté de médecine de l'Université de Sherbrooke.

Il avait aussi dit au Soleil qu'il ne croyait pas qu'un protocole puisse garantir que l'amiante chrysotile soit utilisée de façon sécuritaire à l'étranger.

Le débat scientifique réglé

Le Dr Hébert a reconnu que le débat scientifique était réglé. «L'évidence scientifique est assez ferme. La plupart des organismes comme l'Organisation mondiale de la santé et l'Institut national de la santé publique ont fait le point. Ils démontrent que toutes les fibres de l'amiante sont cancérigènes», a-t-il dit.

«Les scientifiques ont pris position pour dire que ce n'est pas possible de l'utiliser de façon sécuritaire», a-t-il poursuivi.

Mais le médecin reprend la position de son parti. Il croit qu'un «débat social» reste à faire pour «savoir quoi faire avec un produit dangereux». «Ce n'est pas parce qu'un produit est dangereux qu'on doit le bannir. L'exemple le plus flagrant est le tabac. On est exposé tous les jours à des produits dangereux», a-t-il expliqué.

«Les scientifiques ont pris position pour dire que ce n'est pas possible d'utiliser (l'amiante chrysotile) de façon sécuritaire. J'ai hâte d'entendre l'industrie et le milieu socio-économique là-dessus», a-t-il ajouté.

L'industrie a déjà fait valoir son point de vue à plusieurs reprises. Elle a entre autres engagé un lobbyiste qui a envoyé une lettre aux députés l'hiver dernier.

Quelle information manque-t-il pour prendre position? Le Dr Hébert n'a pas précisé. Quelques minutes plus tard, sa chef a donné cette réponse. «Il y a des travailleurs qui sont anxieux, qui voudraient pouvoir gagner honorablement leur vie. On les comprend. (...) Il faut être sensible à ça, on ne peut pas dire: c'est pas important, ça ne nous dérange pas que vous n'ayez pas de job. (...) Ma préoccupation, c'est celles des travailleurs et travailleuses de cette région qui veulent avoir un emploi. Je respecte cela. C'est à nous de trouver une alternative si l'amiante était banni.»

Québec solidaire dénonce «l'ambiguïté» du PQ

«La position ambiguë du PQ dans le dossier de l'amiante est irresponsable. Pendant que nous exportons vers des pays pauvres l'épidémie d'amiantose que le Québec a connue dans les années 1950, Mme Marois tergiverse. J'implore mon collègue, le docteur Réjean Hébert, à faire entendre raison à sa chef!», a réagi son co-chef, Amir Khadir.