Comme Jean-Claude St-André, Gabrielle Dufour-Turcotte est associée aux «purs et durs» du mouvement souverainiste et appuie la stratégie des «gestes de rupture» avec le reste du Canada. Mais, contrairement à l'ex-député de l'Assomption, la jeune femme n'a eu aucun mal à devenir candidate pour le Parti québécois.

Jointe par La Presse hier, Gabrielle Dufour-Turcotte trouve «dommage» que l'état-major du parti ait exclu la candidature de M. St-André. «Il aurait été un excellent député, comme il l'a été dans le passé», a lancé la candidate dans le fief libéral de Saint-Laurent. Elle ne connaît pas «personnellement» Jean-Claude St-André, mais elle est néanmoins une de ses sympathisantes.

 

Cette étudiante en sciences humaines au cégep de Saint-Laurent collabore au magazine indépendantiste Le Bouc, dont l'un des dirigeants est M. St-André.

Ce magazine, publié sur le web est né des cendres du Mouvement pour une élection sur la souveraineté (MES), qui préconisait des «gestes de rupture» avec le reste du Canada dès l'arrivée au pouvoir du PQ. Cette stratégie a été mise au point par le directeur de la revue L'Action nationale, Robert Laplante. Le Bouc, qui regroupe plusieurs membres du défunt MES, en fait la promotion.

«Ma vision de la souveraineté s'approche de ça», a confirmé Mme Dufour-Turcotte. Lorsqu'elle a présenté sa candidature, «le national» n'a pas posé de question, dit-elle. «Mais le parti est au courant de ma position.»

Une source au Bouc estime que la position du magazine sur la souveraineté est tout simplement «incompatible avec celle de Pauline Marois». Le Bouc considère que la chef péquiste a abandonné l'objectif de la souveraineté.

Pauline Marois a rejeté la candidature de Jean-Claude St-André justement parce qu'il appuie les «gestes de rupture» et s'oppose à la décision du parti de larguer l'obligation de tenir un référendum le plus tôt possible dans un premier mandat.

«Quand on est candidat du Parti québécois, je crois que, au moins, on doit adhérer aux orientations», martèle la chef péquiste depuis samedi dernier pour expliquer sa décision.

Deux poids, deux mesures?

La règle ne semble pas s'appliquer à tous. «Je ne pense pas que toute l'aile qui pense comme ça (sur la souveraineté), dont moi, soit exclue», a dit Mme Dufour-Turcotte. Elle a mis fin rapidement à l'entretien en prétextant le début imminent d'un cours.

Le Bouc est une nouvelle mouture, toute récente, du Bouc émissaire, qui existait depuis deux ans. Gabrielle Dufour-Turcotte n'y a collaboré qu'une seule fois. Elle a écrit un texte qui n'a rien à voir avec la politique. Il porte sur des combats de l'International Wrestling Syndicate, des lutteurs amateurs qui «s'affrontent sur le ring sans aucune réglementation».

Mais selon plusieurs sources consultées par La Presse, Le Bouc est à la fois un mouvement et un magazine social et culturel. Son site web propose des liens vers des groupes associés aux purs et durs: les Jeunes Patriotes, la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal et le journal Le Québécois, par exemple.

La jeune femme est également vice-présidente du conseil jeunesse de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal (SSJBM). Elle travaille aux côtés du président François Gendron, farouche partisan de M. St-André. Samedi dernier, il bloquait l'entrée de la salle où se tenait l'investiture du candidat péquiste dans L'Assomption. L'assemblée a viré à la foire d'empoigne. Dimanche, M. Gendron, leader des Jeunes Patriotes du Québec, se trouvait parmi la dizaine de militants qui manifestaient à l'extérieur d'une école de la Petite-Patrie où Pauline Marois a tenu son plus important rassemblement de la campagne jusqu'ici. Gabrielle Dufour-Turcotte était, elle, à l'intérieur de la salle puisque le PQ a dévoilé à cette occasion ses candidats montréalais. Mais elle a déjà participé à des manifestations des Jeunes Patriotes, en mars dernier par exemple.

La SSJBM a pris position en faveur de M. St-André dans le conflit qui a opposé l'ex-député à son parti. Son président, Mario Beaulieu, est, avec M. St-André, l'un des deux penseurs de la «ligne éditoriale» du Bouc, selon le site web du magazine. La SSJBM vient de nommer Robert Laplante Patriote de l'année.

La rédaction du Bouc compte trois membres, dont Paolo Zambito, le bras droit de M. Saint-André, et Marilyne Lacombe, membre du comité exécutif du PQ dans L'Assomption. Cette dernière a pris la défense de M. St-André et demandé l'annulation de l'investiture. Elle était dans L'Assomption samedi dernier, puis parmi les manifestants au rassemblement de Mme Marois dimanche.