Plus que jamais, la protection des milieux naturels dans la région de Montréal est à l'ordre du jour, alors que les campagnes électorales battent leur plein.

Le contexte a changé depuis les élections de 2009. Toutes les villes de la région sont désormais soumises aux objectifs fixés par le Plan métropolitain d'aménagement et de développement (PMAD), en vigueur depuis mars 2012.

La Communauté métropolitaine de Montréal (CMM), qui comprend 82 municipalités, doit affecter 17 % de son territoire à la conservation, un taux qui se situe actuellement à 9,6 %.

Cela veut dire qu'il faut ajouter plus de 300 kilomètres carrés de parcs et de réserves - l'équivalent de 150 fois le parc du Mont-Royal - afin de créer une « ceinture verte » autour de la métropole.

Tout cela stimule les efforts de conservation, affirme Karel Mayrand, directeur de la Fondation David Suzuki au Québec.

« Le projet de ceinture verte fait tache d'huile, dit-il. D'abord, la situation est en train de changer à Laval. On sent aussi beaucoup d'intérêt du côté de la rive nord. Il y a un changement de la garde politique et il y a de plus en plus de gens qui réalisent que les environnements naturels font partie des atouts pour une région. »

De militants à politiciens

L'objectif de 17 % correspond à la norme internationale adoptée à la Conférence de Nagoya sur la biodiversité en 2010. Pour y arriver, les 14 MRC dont font partie les 82 municipalités de la région doivent mettre leurs schémas d'aménagement à jour afin qu'ils soient conformes au PMAD.

Cela signifie faire l'inventaire des milieux humides, adopter un plan de conservation, identifier les corridors forestiers, adopter le cas échéant des règlements sur l'abattage d'arbre, etc.

Ce nouveau contexte juridique donne de l'élan et des munitions aux militants écologistes de toute la région, qui ont réussi à imposer l'idée d'une « trame verte et bleue » il y a deux ans, lors des consultations qui ont mené à l'adoption du PMAD.

C'est dans ce contexte que plusieurs militants écologistes ont fait le saut en politique active municipale.

Patrick Asch, de l'organisme Héritage Laurentien, et Sophie-Anne Legendre, qui était auparavant à l'Association québécoise de lutte à la pollution atmosphérique (AQLPA), sont candidats pour Projet Montréal. « Après 10 ans à sonner l'alarme et à informer, je sentais le besoin de faire un pas supplémentaire », dit Mme Legendre.

« Ça fait 23 ans que je travaille en collaboration avec des élus et des fonctionnaires, dit Patrick Asch. J'ai eu des bonnes expériences, mais j'ai vu qu'il manquait de connaissance chez les élus au sujet des bénéfices de la protection des milieux naturels. »

Martin Drapeau, ancien président d'Enviro Mille-Îles, militant libéral et dénonciateur de la corruption municipale à Boisbriand, est maintenant candidat à la mairie dans cette ville.

Il s'était fait connaître pour avoir été le seul et unique militant libéral à réclamer une enquête publique sur la corruption dans la construction lors d'un congrès du parti en novembre 2010.

Il estime que, deux ans après avoir soulevé les passions et passablement d'opposition dans la couronne nord, le PMAD n'est plus contesté. « Les élus de la région ont fini par accepter une certaine évidence, dit-il. Il est important d'avoir une vision globale sur les questions d'aménagement et de conservation. Et il y a un avantage aussi, on l'a vu : la CMM a mis de l'argent pour préserver la forêt du Grand-Coteau sur la couronne nord. »

À Laval, Guy Garand, directeur du Conseil régional de l'environnement de Laval, a longtemps constitué l'une des seules véritables forces de résistance au maire Gilles Vaillancourt.

Il fait maintenant campagne avec Claire LeBel et brigue un poste de conseiller. « J'ai décidé de m'engager parce que mon entourage m'y pousse depuis des années et j'ai été sollicité par tous les partis, dit-il. Au CRE, où je suis depuis 1996, on a fait des bons coups et poussé beaucoup de projets qui ont été repris par la Ville. Alors, pourquoi ne pas faire un grand pas en me lançant dans la politique active ? »

À Saint-Bruno-de-Montarville, une équipe composée en partie de militants pour la conservation du Boisé des Hirondelles affronte le successeur désigné du maire sortant, Claude Benjamin.

« J'ai assisté à des agoras, des forums, des conférences et je me fais répéter que ça prend de la volonté politique, dit Marilou Alarie, porte-parole du Regroupement des citoyens pour la sauvegarde du Boisé des Hirondelles et candidate à un poste de conseiller à Saint-Bruno. Si on n'est pas capables de faire évoluer nos politiciens, il faut aller chercher le pouvoir. Et quand j'ai vu que Guy Garand se présentait à Laval, ça m'a beaucoup inspirée. »

Défis différents

Militants et politiciens en herbe font face à des défis très différents d'une ville à l'autre.

À Laval, les zones de conservation ne représentent que 1,1 % du territoire. Il faudrait donc les multiplier par 15 pour atteindre la norme de 17 %.

À Longueuil, l'objectif de 17 % devrait être atteint avec la consécration prochaine du Boisé du Tremblay comme refuge faunique.

Les autres MRC de la région se situent entre ces deux pôles.

Pour la biodiversité, les enjeux sont grands, souligne Karel Mayrand. « C'est dans la région de Montréal qu'on a la moitié des espèces menacées au Québec et c'est là qu'il y a les plus grandes pressions, dit-il. Et le projet, ce n'est pas vraiment une ceinture, c'est une trame verte et bleue, qui crée des liens entre les milieux, ce qui est essentiel pour la biodiversité. »