Une dizaine de candidats indépendants font actuellement campagne au Québec. Certains le font par dépit, d'autres par conviction ou provocation. Certains ont des chances de l'emporter (André Arthur) et d'autres pourraient brouiller les cartes (Louise Thibault, Jean Landry, David Marler), mais la plupart ne se font pas d'illusions... Qu'ont-ils tous en commun? Des équipes réduites, des budgets faméliques et la fâcheuse habitude d'échapper au radar médiatique. Actuel donne la parole à cinq électrons libres qui ont choisi la voie de l'indépendance, mais sûrement pas celle de la facilité.

Mario Cadieux alias Zamboni

Circonscription Terrebonne-Blainville

Âge 37 ans

Profession Clown

Budget de campagne 500$ (mais il est déjà dépassé)

Effectifs Deux personnes

Mario Zamboni Cadieux est connu à Blainville. Ses plus fervents supporteurs n'ont toutefois pas l'âge de voter. Ce sont leurs parents que le clown courtise ces jours-ci. Et il s'agit d'un défi de taille. «Exercer le métier de clown quand on se lance en politique, c'est un très grand inconvénient, parce que quand on pense clown, on pense tata», dit-il en soupirant. Le candidat dit qu'il rigole peu avec la politique. Mario Cadieux a présenté son «côté givré» pendant 20 ans, voilà qu'il dévoile son «côté sérieux». À l'aise avec le public, il profite tout de même de la notoriété de son personnage Zamboni pour joindre les électeurs. Sur son site internet (zambo.ca) et sur YouTube, il expose son point de vue de façon colorée. Entre les sections «spectacles» et «garderie», il invite les adultes à discuter politique sur un forum. «C'est une occasion formidable de créer des liens. Je n'ai jamais vu ma députée en faire autant!» Sa principale préoccupation? L'aide aux petites entreprises. Et il vise, pour sa première campagne, une place parmi les trois premiers candidats de sa circonscription.





Guy Berger

Circonscription Saint-Jean

Âge 46 ans P

rofession Technicien en chauffage

Budget de campagne 15$

Guy Berger est un conservateur convaincu. Mais le Parti conservateur n'était pas convaincu de le vouloir comme candidat. Militant depuis plusieurs années au sein du PCC, M. Berger espérait représenter son parti dans la circonscription de Saint-Jean. Mais les bonzes conservateurs en ont décidé autrement, lui préférant une certaine Marie-Josée Mercier. Cette «magouille à l'investiture», selon ses propres mots, l'a incité à se présenter comme candidat indépendant.. «Je veux dénoncer ces cochonneries-là», lance le politicien, la rage au coeur.

Oui mais encore? S'il est élu, M. Berger s'est donné comme priorité de s'attaquer au problème de la pauvreté infantile. Il souhaite faire annuler la pension des candidats du Bloc québécois «qui veulent déchirer le pays» et propose des mesures draconiennes pour obliger les Canadiens à exercer leur droit de vote. «Pas de renouvellement de permis de conduire ou d'assurance maladie pour ceux qui ne votent pas!» lance-t-il.

Guy Berger mène une campagne sobre, avec un budget avoisinant zéro («Je n'accepte aucun argent.»). Son équipe réduite se compose d'une poignée de bénévoles, dont son père et son oncle. «J'ai fait un peu de télé, de radio, je serre des mains et je rencontre les gens. Mais j'écoeure pas le monde à l'entrée des usines», précise-t-il.





Mahmood Raza Baig

Circonscriptions Papineau

Âge 43 ans

Profession Journaliste

Budget de campagne «Ma carte de crédit»

C'est la quatrième fois que Mahmood Raza Baig se présente aux élections fédérales. Après deux campagnes sous la bannière de l'Action canadienne, ce Pakistanais d'origine a choisi de devenir candidat indépendant, parce que les grands partis ne correspondent pas à ses attentes.

«Les conservateurs sont incompétents pour gérer l'économie et leur politique internationale est lamentable. Le NPD endosse la guerre en Afghanistan. Les libéraux sont beaucoup moins bons qu'ils ne le prétendent avec les immigrants, et Stéphane Dion est un piètre chef de l'opposition. J'aime bien le Bloc, à cause de sa politique sociale. Mais la question séparatiste est une perte de temps», résume-t-il.

Ardent pacifiste, M. Baig s'intéresse plus particulièrement aux affaires étrangères. Il milite pour l'arrêt des opérations militaires en Afghanistan. Une fois élu, il compte se rendre au Moyen-Orient pour «établir un meilleur dialogue et faire baisser la tension causée par la guerre». Sur le plan local, il compte travailler pour l'immigration, l'emploi et un meilleur contrôle des OGM.

Peu connu en dehors de Parc-Extension - où il a son quartier général - M. Baig déplore que les indépendants soient si peu pris au sérieux par les médias et les électeurs. «Les candidats des grands partis se présentent souvent par opportunisme. Ils veulent être élus, mais pas nécessairement servir», estime le politicien. Celui-ci garde le moral bien haut, même si ses chances d'être élu sont à peu près nulles. Le 14 octobre, il se frottera en effet à Justin Trudeau et Viviane Barbot...





Jean Landry

Circonscription Richmond-Arthabaska

Âge 59 ans

Profession Conseiller municipal à Saint-Valère

Budget de campagne Moins de 5000$

Jean Landry est un conservateur déçu. Candidat défait aux élections de 2006, il a claqué la porte de son parti après avoir dénoncé certaines méthodes de financement illégal (dossier «in and out»).

Un mal pour un bien, à l'entendre. Car cet ancien député du Bloc à Ottawa (1993-1996) affirme ne plus se reconnaître chez les conservateurs de Stephen Harper.

«Je suis de la frange progressiste du PCC. Celle que représentait Joe Clark. Je n'accepte pas que les alliancistes et les réformistes aient pris le contrôle de ce parti. C'est devenu trop à droite», explique celui qui, soit dit en passant, a aussi été membre de l'ADQ à la fin des années 90.

Bien connu dans la région des Bois-Francs, M. Landry affirme avoir «des chances» de rafler Richmond-Arthabaska . Ses priorités vont à l'emploi, au contrôle des OGM et à une meilleure gestion des ressources agricoles. «Il faut arrêter de faire de l'éthanol avec notre maïs. Il faut faire manger notre population», résume-t-il.

Libéré des étouffantes «lignes de parti», ce résidant de Saint-Valère apprécie son statut d'indépendant. Son budget ne lui permet pas d'avoir de pancartes? Qu'à cela ne tienne. M. Landry fonctionne à la manière de la «vieille école», en distribuant ses dépliants de porte en porte. «Je marche de 15 à 20 kilomètres par jour», souligne-t-il.





David Sommer Rovins

Circonscription Westmount-Ville-Marie

Âge plus de 50 ans

Profession Rentier, gardien de stationnement, psychologue de formation. «Mais tu peux dire que je suis politicien!»

Budget de campagne 80$

David Rovins est un adepte de la simplicité volontaire. Il n'a pas de pancarte, pas d'équipe, pas de budget. Il nous tend un bout de papier photocopié sur lequel on peut lire son programme. «Ce qui compte, ce sont les idées», dit-il avec un accent anglais bien prononcé.

Ancien candidat du NPD dans les Laurentides, M. Rovins milite pour un Canada «moins corrompu et plus démocratique». Il pense que les campagnes électorales devraient être financées publiquement, et chaque candidat bénéficier d'un traitement égal de la part des médias. Il est pour le retrait immédiat des troupes en Afghanistan et contre le port des armes à feu (y compris chez les policiers). Il veut interdire le tabac, éliminer le droit de frapper les enfants et prône le financement public de TOUTES les études, de la maternelle à l'université. Doux rêveur? Peut-être. «Mais au moins, mon programme n'est pas vague comme celui des grands partis», lance cet indépendant acharné, qui se présente aussi - sans succès - depuis 25 ans à la mairie de Sainte-Adèle.

M. Rovins prétend avoir «tout fait» pour se faire entendre. Faute de couverture médiatique, il distribue ses tracts à la sortie des universités McGill et Concordia. Chevalier des causes perdues, il reste lucide. Mais avoue que quelques votes lui feraient plaisir. «Si j'ai un score respectable, je suis heureux. Mais je suis un peu triste si je finis derrière les marxistes-léninistes, les communistes et les néo-rhinos.»





Et les autres...

Antoine Kaluzny LaSalle-Émard; Ghislain Loiselle Abitibi-Témiscamingue; David Marler Brome-Missisquoi; Daniel F4J Laforest Laurier-Sainte-Marie; André Arthur Portneuf; Louise Thibault Rimouski-Neigette-Témiscouata-Les Basques; Michel Dugré Rosemont- La Petite-Patrie; Joseph Young Saint-Léonard-Saint-Michel;