Alors que la lutte demeure extrêmement serrée dans les sondages, Stephen Harper, Thomas Mulcair et Justin Trudeau ont croisé le fer, hier soir, sur le meilleur remède pour relancer l'économie canadienne et donner un peu d'oxygène à la classe moyenne et sur l'opportunité d'augmenter les impôts des grandes entreprises.

Le deuxième débat des chefs de cette longue campagne électorale, organisé par le quotidien The Globe and Mail, avait lieu à Calgary, en Alberta, l'épicentre du ralentissement de l'économie canadienne dans la foulée de la chute brutale des prix du pétrole brut au cours des 12 derniers mois.

Déficit

Ce débat de 90 minutes a donné lieu à quelques échanges musclés entre les trois leaders, notamment sur l'intention du Parti libéral de Justin Trudeau de plonger à nouveau le gouvernement fédéral en déficit - environ 10 milliards de dollars durant les trois prochaines années - afin d'investir massivement dans les infrastructures du pays. Mais les échanges ont aussi tourné à la foire d'empoigne, les leaders se coupant fréquemment ou parlant en même temps.

«Replonger le pays en déficit n'est pas la meilleure chose à faire pour protéger notre économie en période d'instabilité économique mondiale», a soutenu à plusieurs reprises le chef conservateur Stephen Harper, rappelant qu'Ottawa avait rétabli l'équilibre budgétaire l'an dernier et était en bonne position pour enregistrer un surplus cette année encore. M. Harper a aussi affirmé que la meilleure politique fiscale est de conserver l'équilibre budgétaire, de maintenir des impôts bas et de faire des investissements ciblés «que l'on peut se permettre».

Le chef du NPD Thomas Mulcair a aussi accusé son adversaire libéral de vouloir pelleter de nouvelles dettes dans la cour des générations futures. «Il faut cesser de repousser les dettes économiques, écologiques et sociales sur le dos des prochaines générations», a-t-il lancé.

M. Trudeau n'a pas semblé ébranlé par les tirs nourris de ses deux adversaires.

«Oui, nous allons avoir des déficits modestes pour les trois prochaines années. Il est temps d'investir à nouveau dans le Canada et les Canadiens pour créer des emplois et de la croissance. Les taux d'intérêt sont bas, la dette en proportion du PIB est en baisse, l'économie est au point mort. Si ce n'est pas le moment idéal d'investir, je ne sais pas quand ce le sera. Tous les Canadiens comprennent cela. Les seuls qui ne comprennent pas cela sont ces deux messieurs sur cette tribune», a-t-il rétorqué.

Impôts des grandes entreprises

M. Mulcair a quant à lui dû défendre sa promesse d'augmenter les impôts des grandes entreprises de 15 à 17% afin de défrayer les coûts de certaines de ses promesses, dont la création d'un réseau national de garderies. «Ce sont les seuls qui ne paient pas leur juste part d'impôts au pays», a-t-il insisté.

Stephen Harper a sauté sur l'occasion pour accuser le NPD de vouloir faire des dommages supplémentaires à l'économie en voulant augmenter les taxes et les impôts, comme l'ont fait les gouvernements néo-démocrates en Colombie-Britannique, en Ontario et maintenant en Alberta.

«Le NPD veut toujours utiliser la même recette, soit augmenter les impôts et les taxes. Cela va ralentir notre économie, tuer des emplois et nuire aux familles», a lancé M. Harper, reprenant à son compte l'estimation qu'une telle hausse de deux points de pourcentage entraînerait la perte de plus de 150 000 emplois.

Ressources naturelles

M. Harper s'est retrouvé sur la défensive dans le dossier de l'exploitation des ressources naturelles. MM. Mulcair et Trudeau ont rappelé que le gouvernement Harper a été incapable de faire approuver un seul projet d'oléoduc au pays en raison de son piètre bilan en matière de protection de l'environnement.

«M. Harper a mis tous ses oeufs dans le même panier des ressources naturelles et le panier lui a ensuite échappé», a dit M. Mulcair.

«Il n'a pas réussi à faire construire un seul pipeline. Il a fait de l'industrie des sables bitumineux un paria à travers le monde. Avec des amis comme Stephen Harper, l'Alberta n'a pas besoin d'ennemis», a dit M. Trudeau.

D'autres sujets comme l'immigration et l'endettement des familles canadiennes ont aussi été abordés.

La chef du Parti vert, Elizabeth May, n'avait pas été invitée à ce débat. Elle a toutefois mis son grain de sel durant toute la soirée en offrant ses commentaires sur son compte Twitter.

Trois autres débats doivent avoir lieu d'ici le 19 octobre, date du scrutin. Le prochain débat sera en français à Montréal et sera organisé par La Presse et Radio-Canada le 24 septembre.