Au coeur du débat sur la radicalisation depuis le départ de plusieurs de ses ex-élèves vers la Syrie, le collège de Maisonneuve prend les grands moyens pour repousser l'intégrisme religieux hors de ses murs. L'établissement met en branle une série de mesures visant à promouvoir la diversité et à donner un meilleur soutien aux élèves et aux employés.

APPRIVOISER L'ISLAM

Les élèves du collège qui se sont radicalisés « s'étaient bricolé un islam de pacotille », déplore le professeur de sciences politiques Jean-Félix Chénier, qui organisera un atelier hebdomadaire destiné à démystifier cette religion qui compte plus de 1,6 milliard de fidèles dans le monde. M. Chénier cible autant les élèves musulmans que les autres. Par des discussions, des lectures et la venue de conférenciers experts et de Québécois musulmans « bien ancrés dans la communauté », il espère déboulonner certains préjugés, répondre aux questions que bon nombre de jeunes se posent et contrer l'islamophobie. Lors des ateliers, qui seront parascolaires et facultatifs, le thème de l'islam ne sera pas abordé de manière théologique, mais plutôt philosophique et politique. « On veut distinguer l'idéologie de la religion », explique le professeur.

« PRENDRE AU SÉRIEUX » LES INQUIÉTUDES

Cette année, trois « travailleurs de corridors » auront le mandat d'écouter les préoccupations et les malaises des élèves et des employés à propos de divers événements qui pourraient survenir, que ce soit en lien avec l'actualité internationale, la religion, la famille ou la question de l'identité québécoise. Il est déjà prévu que des spécialistes comme des psychologues ou des médiateurs puissent être appelés en renfort. Un enseignant effectuera pour sa part une tournée des départements afin de cerner les difficultés vécues par les enseignants. Un « comité de réflexion » sera aussi mis sur pied.

400 000 $

En mars 2016, Québec a accordé au collège de Maisonneuve une subvention de 400 000 $ pour « implanter des mesures d'appui au vivre ensemble », à la suite d'une succession d'événements liés au phénomène de radicalisation. La somme consentie devait servir principalement à l'embauche de personnes-ressources qui seraient appelées à intervenir dans ces situations, dans le cadre d'un projet-pilote qui devait durer un an. La ministre de l'Enseignement supérieur, Hélène David, avait alors demandé que les intervenants soient « sur le terrain », « pas dans un bureau ». C'est dans ce cadre que les projets exposés précédemment (et d'autres) seront mis en branle. Un rapport est attendu en octobre 2017 pour faire le bilan.

AU MOINS 11 JEUNES RADICALISÉS

Depuis janvier 2015, cinq ex-élèves du cégep sont partis vers la Syrie, quatre ont été stoppés à l'aéroport alors qu'ils tentaient, avec d'autres jeunes, de partir eux aussi, et deux autres ont été arrêtés et accusés d'avoir fomenté un attentat terroriste au Québec. Ils sont derrière les barreaux en attendant leur procès.