Alors que l'aide médicale à mourir devrait bientôt révolutionner à jamais le domaine de la médecine, les facultés de médecine des universités canadiennes sont appelées à déterminer le moment où elles incluront cette nouvelle notion dans leur programme de cours et le type d'enseignement que ce profond changement nécessitera.

À compter du 7 juin, les patients qui sont dans des conditions « graves et irrémédiables » pourront demander l'aide d'un médecin pour mettre fin à leurs jours, suivant le jugement de la Cour suprême du Canada, l'année dernière, qui a invalidé la loi interdisant le suicide assisté et l'euthanasie.

Les parlementaires fédéraux travaillent actuellement à préciser les conditions qui rendront les patients admissibles à cette aide. Le projet de loi présenté le 14 avril par le gouvernement Trudeau doit être approuvé par la Chambre des communes et le Sénat, après des débats qui s'annoncent déjà houleux.

Bien que certaines universités qui forment la prochaine génération de médecins aient commencé leurs préparations pour ajouter ce sujet à leur curriculum, plusieurs autres ont choisi d'attendre avant d'agir, selon la docteure Geneviève Moineau, présidente et chef de la direction de l'Association des facultés de médecine du Canada.

Ces universités veulent d'abord consulter le texte final de la loi et observer comment elle sera interprétée dans chaque province, a indiqué celle qui représente les 17 facultés de médecine au pays.

Lorsque les règles seront connues, la prochaine étape sera de former les médecins et finalement, les nouvelles mesures seront intégrées dans le programme scolaire pour guider les étudiants dans ces situations, a soutenu la docteure Moineau.

Anthea Lafreniere, une étudiante en quatrième année de médecine à l'Université d'Ottawa, a souligné que déjà dans leurs cours de deuxième année, les étudiants étaient appelés à participer à une « semaine de soins palliatifs », pendant laquelle on leur apprend des concepts liés aux soins de fin de vie.

« Nous avons toujours discuté de comment communiquer avec les patients sur leurs objectifs de soins. C'est un objectif important du curriculum, déjà », a affirmé celle qui est aussi présidente de la Fédération des étudiants et des étudiantes en médecine du Canada et siège au conseil d'administration de l'Association médicale canadienne.

« La discussion pour gérer le cas d'un patient qui a fait une requête pour mourir, c'était déjà dans le curriculum [...] Je ne sais pas si le curriculum devrait être modifié, a-t-elle dit. C'est sûr que [la faculté] devrait intégrer la nouvelle loi... mais je crois, selon mon expérience à l'Université d'Ottawa, que nous avons fait du bon travail pour aborder ces conversations difficiles avec les patients, qui sont probablement la partie la plus importante à apprendre pour les étudiants en médecine », a-t-elle poursuivi.

À l'université Dalhousie à Halifax, les étudiants en première et deuxième année de médecine discutent des enjeux éthiques autour de l'aide médicale à mourir.

« C'est une partie importante de notre curriculum depuis le début. Nous avons toujours su que le suicide assisté et l'euthanasie étaient des sujets que nous devrons aborder de façon différente alors que la loi allait changer », a indiqué Christy Simpson, éthicienne, ajoutant que l'enjeu était discuté bien avant le jugement de la plus haute cour du pays puisque certains patients réclamaient déjà l'aide médicale à mourir.

Mme Simpson a expliqué que la faculté se préparait maintenant à s'adapter à la nouvelle loi.

L'Université de Toronto a mis en place un comité d'experts pour ajouter les dispositions du projet de loi C-14 dans son séminaire de deuxième année sur les soins de fin de vie, qui sera prêt pour le prochain mois.

« Les étudiants devront comprendre que le projet de loi n'est pas encore une loi, mais ces enjeux importants devront être abordés par n'importe quel projet de loi », a indiqué la professeure Erika Abner.