Frappés par des compressions additionnelles de 19 millions de dollars, les cégeps se disent contraints de réduire les services directs aux élèves.

Les directeurs généraux des 48 cégeps du Québec ont profité de leur assemblée générale, hier, pour sonner l'alarme et dénoncer les nouvelles coupes du gouvernement Couillard. Celles-ci seront récurrentes et s'appliqueront donc également pour les prochaines années. Elles s'ajoutent aux compressions de 21 millions annoncées dans le budget Leitao de juin.

«Trop c'est trop!», a lancé le président de la Fédération des cégeps, Jean Beauchesne. «Nous sommes conscients qu'il faut redresser les finances publiques du Québec. Nous ne sommes pas sur une autre planète.» Mais les cégeps ont déjà beaucoup donné, selon lui: en quatre ans, Québec leur a imposé des compressions totalisant 109 millions. «Tous les efforts, je dis bien tous les efforts à consentir pour faire mieux avec moins sans toucher à notre mission éducative ont été faits», a-t-il plaidé. Il faudra maintenant «faire moins avec beaucoup moins».

Promesse reniée

Jean Beauchesne accuse le premier ministre Philippe Couillard de renier sa promesse électorale d'épargner l'éducation dans la lutte contre le déficit zéro. Il lui demande de cesser de prétendre que les services à la population ne sont pas touchés par les compressions. Ils le seront bel et bien, et les élèves «les plus vulnérables» vont écoper, selon lui.

Plusieurs directeurs généraux ont confirmé ses dires. Au Cégep de l'Outaouais, les services de laboratoires ont déjà été réduits. Au cégep Garneau de Québec, les frais complémentaires exigés aux élèves pour les activités sportives et culturelles ont été augmentés. Des employés contractuels, donc à statut précaire, ont été mis à la porte, et «on est rendu dans les postes permanents». «Il n'y a plus de marge de manoeuvre», a martelé la directrice générale, Denise Trudeau. Au collège Dawson de Montréal, les projets en entrepreneuriat et en développement durable seront probablement abolis. «Il y a péril en la demeure!», a tonné son directeur, Richard Filion. Pour Rémi Massé, du Cégep de Matane, le gouvernement Couillard est en train de «saigner les régions». Il a rappelé l'annonce de l'abolition des centres locaux de développement (CLD). «On se questionne sur la vision du gouvernement pour les régions», a-t-il dit.

Plusieurs cégeps sont maintenant acculés au déficit en raison des compressions. Québec se tire dans le pied, puisque ces résultats négatifs seront comptabilisés dans les finances du gouvernement, a souligné Jean Beauchesne, qui a dénoncé le «mythe» selon lequel les cégeps seraient minés par la bureaucratie, remplis de «gens qui ne font rien». «Ça n'existe pas, ça. Les marges de manoeuvre ont fondu comme neige au soleil» au fil des ans, a-t-il soutenu.

«Pas un seul élève pénalisé»

Mais pour le ministre de l'Éducation, Yves Bolduc, les cégeps et les universités - dont les budgets sont réduits de 31,6 millions supplémentaires - sont en mesure d'absorber les nouvelles coupes. «Je peux vous assurer qu'il n'y aura pas d'atteinte dans les services directs aux élèves», a-t-il soutenu malgré la sortie des cégeps.

 «Il n'y a pas un seul élève qui sera pénalisé. Mais je comprends que c'est possible que [les cégeps] soient obligés de regarder dans leur cour, c'est-à-dire peut-être des voyages à l'étranger, peut-être aussi au niveau administratif il y a encore du travail à faire.»

La Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ) considère que le ministre «nuit à la réussite scolaire des cégépiens» avec ses compressions. Selon elle, «les services sont réduits» et «l'offre de formation est en péril», surtout en région.