Les financiers du Bois des Caryers, interrogés par La Presse, se sont dits étonnés d'apprendre que Tony Magi puisse être lié au projet.

Le Bois des Caryers est principalement financé par Centria, entreprise détenue par Jean Monty et Jean-Guy Desjardins. Jean Monty est l'ex-président de Bell Canada, tandis que Jean-Guy Desjardins est le patron de Fiera Sceptre, qui gère 30,8 milliards de dollars de fonds.

«La société du Bois des Caryers est dirigée par un investisseur bien connu dans le milieu immobilier, soit Allan Schachter. Celui-ci nous assure que Tony Magi n'a rien à voir dans le dossier», a dit à La Presse le premier vice-président, financement, de Centria, Richard Cousineau.

Centria est spécialisée dans le financement de grands projets résidentiels. En décembre 2009, l'entreprise a accordé à l'organisation proche de Tony Magi le prêt hypothécaire qui a servi à l'achat du terrain du Bois des Caryers. Le prêt est signé par Ricardo Magi, le frère de Tony.

Le terrain est situé à un jet de pierre du parc Angrignon. Il a été acheté en décembre 2009 par la société 9181-5712 Québec, alors propriété d'Allan Schachter et de Ricardo Magi. Le prix payé est de 15,8 millions et l'hypothèque de Centria s'élève à 14,5 millions.

Une bonne partie de ce prêt aurait été remboursée, mais Centria a fait d'autres prêts pour la construction des unités. Au total, Centria aurait donc une quinzaine de millions de dollars encore en jeu, selon nos sources.

Nous avons exposé à M. Cousineau les liens étroits entre la société 9181-5712 Québec et Tony Magi, mais il n'en savait rien. «Vous nous apprenez des choses. On va les considérer et on fera ce qui est nécessaire s'il y a lieu», a-t-il dit.

Jean Monty a quitté Bell en 2002, laissant la direction de l'entreprise à Michael Sabia. Jean-Guy Desjardins est moins connu du grand public, mais il est l'un des financiers québécois les plus respectés. Il avait été pressenti pour présider la Caisse de dépôt en remplacement d'Henri-Paul Rousseau, en 2008.

Au cours de la dernière année, Centria a financé des projets qui ont mené à la construction de 1500 logements. Selon Richard Cousineau, Centria fait affaire avec Allan Schachter pour le Bois des Caryers. Pour des raisons de confidentialité, il dit ne pouvoir nous donner de détails sur l'expérience immobilière de M. Schachter.

Trous de mémoire

Selon nos recherches, Allan Schachter détient avec ses frères l'entreprise Cansew, rue Chabanel, spécialisée dans la fabrication de fils à coudre.

Joint au téléphone, Allan Schachter soutient que Ricardo Magi n'a jamais eu rien à voir dans le projet. Les deux hommes ont pourtant été coactionnaires de l'entreprise pendant un certain temps, selon des documents officiels signés par M. Schachter.

L'homme d'affaires ne se souvient pas qu'en 2008, son holding ait prêté 2,4 millions à Ricardo Magi, en lien avec le projet. Ce prêt a été consenti moyennant certaines garanties, dont la maison de campagne des beaux-parents de Tony Magi. Les documents ont été signés devant notaire par Ricardo Magi et Allan Schachter. Le nom de Tony Magi figure également sur une des hypothèques.

«Ma mémoire est terrible et je hais les papiers à remplir. Je me rappelle que j'ai prêté de l'argent pour le projet, mais les noms sur les documents... Le dossier a été réglé par mon comptable», a essentiellement expliqué M. Schachter.

Aujourd'hui, l'entreprise qui chapeaute le Bois des Caryers, soit 9181-5712 Québec, est détenue par Allan Schachter et Patricia Navarro. Cette dernière gère le projet au quotidien, dit M. Schachter, qui se contente d'un rôle passif. «À la base, je ne prétends pas avoir beaucoup d'expérience dans le domaine immobilier. Mon expérience est dans le secteur du textile», dit-il.

L'homme d'affaires dit ne pas être au courant des arrestations des frères Magi au siège social du Bois des Caryers, en septembre. «Je suis surpris. C'est une nouvelle vraiment affligeante», dit-il.

Nous avons tenté de joindre Patricia Navarro, mais sans succès.