Tout ça pour ça, diront certains. Malgré «l'urgence» invoquée par le maire de Québec, Régis Labeaume, les députés ne voteront pas sur le projet de loi 204 avant la fin des travaux parlementaires, vendredi. «Nous prendrons le temps de faire le travail comme il faut. Nous reviendrons au mois de septembre pour le faire correctement», a annoncé Jean Charest.

Les péquistes se seront donc entredéchirés sur un vote qui n'aura pas lieu. Car le premier ministre n'a finalement pas semblé inquiété par les menaces du maire Labeaume. Selon les juristes du gouvernement, l'entente de gré à gré entre Québec et Quebecor violerait la Loi sur les cités et villes. Elle est contestée en cour par Denis de Belleval, ancien directeur général de la Ville de Québec.

Parrainé par la péquiste Agnès Maltais, le projet de loi visait donc à protéger l'entente sur la gestion du futur amphithéâtre contre toute contestation judiciaire. Le maire Labeaume a soutenu la semaine dernière en commission parlementaire que l'entente devait être signée avant le 7 septembre et que, sans le projet de loi, elle tomberait à l'eau.

Changement de ton

Sa position était différente hier après-midi. «Manifestement, certains ont décidé de stopper l'élan de la Ville de Québec, a-t-il tonné dans un point de presse qui a duré 21 secondes. Cela dit, nous ne lançons pas la serviette. On va continuer notre travail acharné.» Il n'a pas répondu aux questions.

Par voie de communiqué, le PDG de Quebecor, Pierre Karl Péladeau, s'est dit «profondément déçu». Il affirme que les «conditions optimales» pour le retour d'une équipe de hockey à Québec ne sont plus réunies. «Les délais supplémentaires pourraient compromettre l'atteinte de l'objectif ultime», soutient-il. M. Péladeau assure toutefois qu'il continuera de déployer «tous les efforts nécessaires» pour amener une franchise de la LNH à Québec.

Mme Maltais espère aussi que la «fenêtre d'ouverture» pour acheter une équipe ne se refermera pas. Elle ne s'estime pas responsable de la démission de ses collègues. Le projet de loi 204 a servi de «prétexte» aux démissionnaires, a affirmé un attaché de presse du PQ.

Retards et blocage

Tout ce psychodrame découle d'un manque de ponctualité. Le projet de loi a été déposé après la date limite, à la mi-mai. En vertu des règlements, il fallait donc l'unanimité pour le déposer et aussi pour procéder au vote. Amir Khadir avait consenti au dépôt du projet de loi afin que les élus puissent en débattre. Mais il a toujours refusé de permettre le vote.

Le gouvernement Charest a essayé de contourner ce problème en intégrant le projet de loi dans la loi omnibus - une enveloppe de différents amendements législatifs municipaux. Or, il restait encore un problème. L'étude détaillée de la loi omnibus n'était pas encore terminée en commission parlementaire. Habituellement, cela se fait sans heurts. Mais comme le projet de loi 204 y figurait, M. Khadir ainsi que les indépendants Éric Caire et Marc Picard ont retardé l'étude des articles, si bien qu'on n'a pu la terminer avant l'échéance, hier en fin de soirée.

«Depuis que la loi a été déposée, le moins que l'on puisse dire, c'est que les débats ont été très laborieux», a déploré M. Charest. Deux choix s'offraient donc à lui: recourir au bâillon pour adopter le projet de loi ou attendre la reprise des travaux parlementaires, à la mi-septembre. «On n'a pas l'intention de faire un bâillon là-dessus, a annoncé le premier ministre. Je pense que la population du Québec veut être rassurée sur la façon dont nous allons procéder.» La protection juridique souhaitée par MM. Labeaume et Péladeau pourrait être présentée sous une nouvelle forme législative à l'automne.