Responsable du financement au Parti libéral du Québec (PLQ) durant 13 ans, Violette Trépanier a tenté d'expliquer, aujourd'hui devant la commission Charbonneau, la présence du mystérieux 428 500$ dans les livres de son parti.

Dans une déclaration assermentée rédigée par un enquêteur pour obtenir un mandat de perquisition à l'entreprise Shockbéton, à l'automne 2013, l'UPAQ avait soupçonné que le 428 500$ aurait pu avoir été amassé en une seule journée en 2001 par l'homme d'affaire Marc Bibeau. En mai dernier, après des vérifications comptables, le PLQ a finalement indiqué que la somme était le cumul de plusieurs contributions individuelles.

Devant la Commission, Trépanier a tenu à clarifier la présence du mystérieux «127e comté imaginaire» dans la comptabilité du PLQ. C'est sous cet onglet, plus précisément sous la ligne 127.51 intitulée « MB » (pour Marc Bibeau) où était comptabilisé le 428 500$.

« Le 127, ce n'est pas un compte occulte, un comté virtuel ou des comptes au Bahamas! Ce sont toutes des contributions qui sont déclarées au Directeur général des élections du Québec (DGEQ) », a-t-elle indiqué.

Selon Trépanier, le « 127 » n'est qu'une « ligne comptable » où sont comptabilisés les dons effectués au parti, tandis que les lignes 1 à 125 servent à additionner les dons dans les circonscriptions et la ligne 126, l'argent provenant de la vente de cartes de membres.

Quant au 428 500$, Trépanier affirme qu'il s'agit du total des sommes amassées par Marc Bibeau et ses solliciteurs au sein de son réseau de contact tentaculaire. « Marc Bibeau n'organisait pas d'activités », a-t-elle dit.

« Happenings » chez Bibeau aux frais du PLQ?

Pourtant, deux soirées en présence de Jean Charest, de ministres libéraux et des gens du milieu des affaires ont été organisées au domicile de Bibeau en 2003 et en 2004, a remarqué le procureur de la commission Me Paul Crépeau.

Les soirées étaient payées par le PLQ, a indiqué Trépanier avant de dire qu'elle ne s'en souvenait finalement plus.

Trépanier a insisté sur le fait qu'il ne s'agissait pas d'activités de financement, ni d'occasions de développement des affaires. « C'était des happenings. » Jean Charest voulait fêter sa victoire aux élections de 2003, a-t-elle précisé.

Selon Trépannier, au fil du temps, Jean Charest et Marc Bibeau sont devenus des amis et leurs familles ont tissé des liens.

Bibeau était doté d'un « immense réseau », a dit la témoin . « M. Bibeau m'a dit : en tout respect, Jean est mal connu et moi je vais le faire connaitre dans les milieux d'affaire. C'est sûr que quand il vont le connaître, ils vont l'apprécier », se souvient-elle.

Marc Bibeau a-t-il déjà organisé des soirées à son domicile avec 10 hommes d'affaires au coût de 10 000$, a demandé par la suite Me Crépeau. «Pas à ma souvenance, ni à ma connaissance », a répondu Trépanier.

« On nous a berné »

Responsable du financement sectoriel et du recrutement au PLQ de 2001 à 2013, Violette Trépanier, fut aussi ministre libérale.

La femme de 69 ans affirme qu'elle ne connaissait pas les stratagèmes de prête-noms utilisés pour financer son parti.

« Je suis extrêmement déçue. On nous a berné. Il y avait des gens qui était à temps plein pour gérer des contributions illicite, j'écoutais ça (à la commission Charbonneau) et je me disais ça n'a pas de bons sens. »

Selon ses vérifications auprès du DGEQ, les partis ont le droit de solliciter des dons au sein des milieux de travail.

« Jamais, jamais, jamais je n'ai sollicité d'argent à une entreprise. Jamais », a-t-elle martelé. « Je sollicite quelqu'un dans l'entreprise. »

Lortie et Côté

Lors de son témoignage devant la Commission cette semaine, l'ex-chef de cabinet de l'ancienne ministre Nathalie Normandeau, Bruno Lortie a indiqué qu'il n'avait jamais directement fait de la sollicitation pour Normandeau, même s'il s'impliquait dans l'organisation d'activités de financement. Or, il détenait bel et bien un certificat de solliciteur, a dit Trépanier.

Trépanier a aussi été questionnée de façon serrée sur la présence de l'ancien ministre libéral et consultant pour la firme Roche, Marc-Yvan Côté, comme solliciteur au PLQ après avoir été nommé devant la commission Gomery.

« Je le voyais très peu, je ne pensais pas qu'il était impliqué tant que ça. Je pensais qu'il était un solliciteur parmi tant d'autre pour Nathalie Normandeau, Je pensais qu'il aidait une amie lors d'une activité de financement ».

Elle s'est ensuite ravisée une fois de plus pour préciser que Normandeau et Marc-Yvan Côté était plutôt des « connaissances ».

Violette Trépanier est le dernier témoin à être entendu devant la Commission avant la pause estivale. Elle terminera son témoignage mercredi. La commission reprendra en septembre avec l'audition de mémoires d'experts et de membres du public. D'autres témoins pourraient cependant être convoqués cet automne comme l'entrepreneur Tony Accurso.