À la Commission Charbonneau, lundi, les échanges ont été vifs quand le témoin Ken Pereira a été interrogé sur son agressivité par l'avocat qui représente la FTQ-Construction.

Ken Pereira, ancien directeur de la section locale des mécaniciens industriels à la FTQ-Construction, est celui qui a dévoilé les comptes de dépenses de Jocelyn Dupuis.

Lorsqu'il a été contre-interrogé par Me Denis Turcotte, M. Pereira a admis qu'il les avait volés en s'introduisant dans le bureau du comptable de la FTQ-Construction en son absence.

Et M. Pereira a même admis qu'il avait tenté d'y pénétrer une seconde fois, en vain, pour tenter d'obtenir les reçus de «Serge Dupuis, Robert Paul et tous les autres directeurs qui avaient le même système que Jocelyn Dupuis».

L'avocat de la FTQ-Construction a si souvent martelé le mot «voleur» que c'est le procureur de la commission, Me Simon Tremblay, qui s'est levé, dénonçant le fait que Me Turcotte voulait «continuer à cracher sur le témoin» en le traitant à répétition de voleur.

Mais M. Pereira s'est empressé d'ajouter que Jocelyn Dupuis était celui qui avait «volé» les travailleurs pendant des années, en ayant un train de vie exagéré.

Il a admis qu'il détestait Jocelyn Dupuis, que ce dernier voulait le tasser. Il a avoué qu'il a déjà monté le ton à son endroit.

«Jocelyn Dupuis, ce n'est pas un collègue. La raison qu'il y a des commissions (d'enquête), c'est à cause des gars comme lui», a tonné M. Pereira.

Il a notamment soutenu qu'à la suggestion de Jocelyn Dupuis et d'un avocat, il s'était mis à enregistrer des entrepreneurs, pour étayer ses doléances voulant que ses membres mécaniciens industriels étaient l'objet de discrimination dans l'embauche et ne parvenaient pas à trouver du travail.

«J'ai levé le ton avec Jocelyn Dupuis et pas à peu près. Jocelyn Dupuis, devant tout l'exécutif, m'a dit: «toi, là, la raison que personne t'engage, c'est parce que tu enregistres'. Moi je lui ai dit: «mon trou-de-cul, c'est toi qui m'as demandé pour enregistrer'. Et là, on a levé le ton. Mais comme il a perdu, comme il n'était pas «backé» par ses Hells et sa mafia, il a fermé sa gueule», a affirmé M. Pereira.

Le témoin et l'avocat de la FTQ-Construction se sont si souvent interrompus que la juge France Charbonneau a dû intervenir: «laisse-le terminer sa réponse, maître Turcotte!», a-t-elle lancé.

M. Pereira a noté que quand il a montré les reçus de Jocelyn Dupuis à d'autres responsables de la FTQ-Construction, certains se sont montrés outrés, mais ont changé de version après coup.

Il a déploré la «complicité» de ceux qui ont approuvé les dépenses «farfelues» de Jocelyn Dupuis. «Quand je les ai confrontés avec les factures et les reçus, vous savez ce qu'ils m'ont dit? Que Jocelyn Dupuis était le plus gros voleur de la FTQ. Et merci pour ce que tu as fait. Mais après, quand ils se sont fait menacer, ils ont changé leur fusil d'épaule», a dénoncé M. Pereira.

La juge Charbonneau a aussi voulu savoir pourquoi Me Turcotte cherchait tant à démontrer à quel point M. Pereira pouvait hausser le ton ou devenir «agressif». Elle a dit être déjà convaincue du fait que M. Pereira était capable de hausser le ton. «Et même si vous démontriez que M. Pereira est un pitbull?» lui a-t-elle demandé.

«Peut-être qu'un pitbull est moins crédible qu'un chihuahua», a rétorqué Me Turcotte.

M. Pereira a conclu qu'il n'a «jamais crié après quelqu'un qui ne le méritait pas».

La Cour supérieure se penchera mardi sur l'utilisation d'écoute électronique

Ce n'est finalement que mardi que la Cour supérieure commencera à entendre les parties dans le débat visant à déterminer si la Commission Charbonneau peut ou non utiliser de l'écoute électronique impliquant notamment le président de la FTQ, Michel Arsenault.

Me Jean-Claude Hébert, qui représente M. Arsenault, le Fonds de solidarité de la FTQ et Guy Gionet, un administrateur relié au Fonds, espère convaincre la Cour supérieure que la commission n'a pas le droit d'utiliser cette preuve.

Le 18 octobre dernier, la Cour d'appel a rejeté une requête visant à empêcher la Commission Charbonneau d'utiliser cette écoute électronique.

Le juge Allan Hilton s'est rangé derrière l'argument voulant que le refus d'accorder un sursis n'empêcherait pas la Cour supérieure de se prononcer sur le fond de la question.

Le procureur de la Commission Charbonneau, Me Simon Tremblay, a fait valoir qu'un sursis aurait pu causer des difficultés énormes à la commission.