Le procès du cardiologue Guy Turcotte est particulièrement éprouvant. Certains détails difficiles à supporter sont dévoilés jour après jour par notre journaliste. Nous préférons vous en avertir. * * *

(Saint-Jérçome) Après une journée et demie de témoignage au procès de Guy Turcotte, la psychiatre Dominique Bourget n'a pas encore révélé ses conclusions sur l'état mental de l'accusé au moment où il a tué ses enfants, le 20 février 2009. Mais elle a donné une indication, hier, en disant que le jugement de M. Turcotte était «extrêmement perturbé» au moment des faits.

La Dre Bourget a rencontré M. Turcotte deux fois, en janvier et mars 2010, pour dresser un rapport psychiatrique à son sujet et évaluer sa responsabilité criminelle, à la demande de son avocat, Pierre Poupart.

Dans son rapport de 29 pages, qu'elle a rendu le 17 février dernier, la Dre Bourget écrit que M. Turcotte coopère pleinement à son évaluation, qu'il est calme, mais qu'il a au visage des tics moteurs, qu'elle ne décrit pas. «L'affect est tendu et déprimé. L'humeur est triste, avec des épisodes de pleurs fréquents pendant l'entretien», signale-t-elle.

Basse estime de lui-même

Elle ajoute qu'il a une très basse estime de lui-même et que son jugement est adéquat. Me Poupart a relevé là un «paradoxe apparent»; la Dre Bourget a répondu qu'une personne peut avoir un bon jugement et une basse estime de soi.

«Quel était le jugement de M. Turcotte le 20 février 2009?», a alors demandé Me Poupart. Il était «extrêmement perturbé», a-t-elle répondu.

Un peu plus tôt dans la journée, elle avait aussi déclaré que le fait que M. Turcotte ait voulu emmener ses enfants avec lui dans la mort montrait à quel point son «cerveau ne fonctionnait pas de façon normale». Le soir du drame, M. Turcotte a avalé du lave-glace pour se suicider. Selon son récit, c'est lorsqu'il a réalisé qu'il était en train de mourir et que ses enfants trouveraient son cadavre qu'il a décidé de les «emmener» avec lui. Il a poignardé Olivier, 5 ans, à 27 reprises, et Anne-Sophie, 3 ans, 19 fois. Les enfants étaient pourtant toute sa vie, disait-il. Il ne garde que des flashs de ces moments tragiques, mais cela le terrorise, dit-il.

Intellect supérieur

Au cours de son évaluation, Mme Bourget n'a pas eu besoin de soumettre M. Turcotte à des tests pour se rendre compte que son «intellect» se situe dans la limite supérieure de la moyenne, voire qu'il est supérieur à la moyenne. Elle a aussi noté qu'il était bien orienté dans le temps et l'espace et qu'il avait une capacité de concentration normale. Il n'avait ni illusions ni hallucinations. Selon le diagnostic de Mme Bourget, M. Turcotte souffre de trouble de l'adaptation avec anxiété et humeur dépressive. Il n'a pas de trouble de la personnalité, mais elle lui a trouvé certains traits obsessifs compulsifs, ce qui est plutôt une qualité pour un médecin, a-t-elle relevé.

La psychiatre a trouvé plusieurs facteurs de stress psychosocial pour M. Turcotte: sa relation dysfonctionnelle avec sa conjointe, Isabelle Gaston; sa découverte de la relation extraconjugale de celle-ci; sa séparation; son déménagement; le stress occupationnel (en tant que médecin cardiologue)... Il faut ajouter à cela le deuil de ses enfants et sa situation judiciaire au cours des rencontres qu'il a eues avec la psychiatre au Centre de détention de Rivière-des-Prairies.

Le procès se poursuit aujourd'hui, avec la suite du témoignage de la Dre Bourget.