Dans un sondage Ekos commandé par la CBC en janvier, pas moins de 42% des répondants anglophones ont indiqué avoir envisagé de déménager après l'élection du Parti québécois en septembre. «Envisagé de déménager? Ah, ça, c'est une vieille tradition anglophone!», lance en riant le maire de Westmount, Peter Trent.

«Il est difficile de trouver un anglo qui n'ait jamais envisagé de partir, mais l'élément important de cette affirmation, c'est le mot «envisagé».»

Ceux qui, comme lui, sont restés ont vu neiger: la crise d'Octobre, les deux référendums... «Ceux qui sont ici sont très enracinés.»

Toujours selon le sondage EKOS réalisé auprès de 1001 Québécois anglophones, 4 anglos sur 10 parviennent à vivre au Québec presque exclusivement en anglais. À la question «Dans quelle mesure parlez-vous français au quotidien?», 9% ont dit qu'ils ne l'employaient jamais, 9% ont dit le faire rarement, et 21% ont indiqué parler français «parfois». Pas moins de 64% des anglophones disent aussi n'avoir aucun mal à converser en français.

Où est le problème? Le problème, manifestement, il est ailleurs que dans la maîtrise du français. Il est dans le fait que seulement 58% des anglophones se sentent «bienvenus au Québec».

«Disons-le franchement: s'il n'y avait pas eu d'anglophones au Québec, le dernier référendum aurait été gagné, dit-il. Nous sommes des trouble-fête», lance Peter Trent.

C'est aussi ce qu'a écrit Peter Blaikie, avocat montréalais et ex-président du Parti conservateur du Canada, il y a quelques jours dans The Gazette. «Malgré le discours mielleux de Jean-François Lisée, le ministre responsable des relations avec les anglophones, le PQ veut se débarrasser de nous.»

Les villes bilingues

Ce qui a mis le feu aux poudres, c'est donc ce projet de loi 14, qui risque de faire perdre leur statut particulier aux villes bilingues du Québec. Dans l'île de Montréal, 13 d'entre elles tiennent des séances bilingues de leur conseil municipal et sont autorisées, entre autres, à communiquer dans les deux langues avec leurs commettants.

«Pour nous, ces villes bilingues, c'est un droit acquis, une reconnaissance historique du fait que ces villes ont été fondées par des anglophones», dit M. Trent, avant d'ajouter: «Les Québécois dans leur ensemble ne sont pas petits, mais leurs élites peuvent l'être. Comme dans le cas présent, dit-il, où elles attaquent les derniers bastions de communautés anglophones déjà tellement décimées.»

Sur les forums internet portant sur ces thèmes, que lit-on? «Heureusement, les vieux péquistes ne sont que cela. Vieux. Et avec eux mourra cette stupide question de la langue. L'avenir du Québec, c'est le multiculturalisme et le multilinguisme. Contre cela, une bande de vieux dinosaures aigris ne pourra rien», écrit l'un.

«On a juste à attendre que [les péquistes] soient renversés», écrit un autre.

Le péquiste Jean-François Lisée parviendra-t-il à faire fondre le coeur des anglophones?

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Ce que pensent les anglophones

58% des répondants se sentent les bienvenus au Québec.

84% des répondants prédisent un recul de l'anglais si le PQ obtenait une majorité.

74% des répondants estiment qu'il est «très important»qu'il y ait une amélioration dans les relations entre les francophones et les anglophones.

64% des répondants disent n'avoir aucun mal à converser en français.

71% des répondants jugent «très important» que les juges de la Cour suprême soient bilingues.

85% des répondants disent qu'il est important pour les anglophones de connaître la culture francophone.

Selon un sondage Ekos réalisé pour le compte de la CBC en janvier auprès de 1001 anglophones.