Un désaccord sur la facture de petits travaux de construction prend une tournure inattendue. Hier, la firme de l'entrepreneur controversé Francesco Bruno a exigé que l'hôtel de ville de Dollard-des-Ormeaux soit... vendu aux enchères!

La requête à ce sujet a été rendue publique au palais de justice de Montréal, hier. L'entreprise de M. Bruno, B.T. Céramique, affirme que la Ville n'a pas payé tout ce qui lui est dû pour des travaux de céramiques réalisés dans le vestiaire de la piscine du «centre civique» de la ville en mars 2011. Elle réclame 33 439$ à la Ville et demande d'être payée à même le fruit de la vente de l'hôtel de ville.

Francesco Bruno est cet homme d'affaires qui s'est reconnu coupable de fraude fiscale au printemps dernier. C'est lui qui a aidé l'entreprise de Tony Accurso à frauder le fisc de 4 millions de dollars grâce à un stratagème de fausses factures. Francesco Bruno fait également l'objet d'une enquête de la GRC, qui le soupçonne d'avoir corrompu des fonctionnaires de l'Agence du revenu du Canada.

Le litige avec la Ville de Dollard-des-Ormeaux (DDO) tire son origine du contrat accordé à la firme Lux Dev Construction, dont B.T. est un sous-traitant. Les 33 439$ seraient liés à des travaux qui n'étaient pas prévus au contrat.

Étant toujours impayée en septembre, B.T. a inscrit une hypothèque légale sur l'immeuble en cause, comme il est fréquent dans ce genre de litige. L'immeuble est situé au 12 001, boulevard de Salaberry et abrite également l'hôtel de ville de DDO. En octobre, B.T. a envoyé un préavis avisant la Ville qu'elle réclamait le paiement au cours des 60 jours suivants, sans quoi elle entamerait des poursuites.

Or, le délai est passé et B.T. n'a pas été payé. L'entreprise exige donc que la Ville évacue les lieux et que le tribunal mette l'immeuble aux enchères. B.T. serait payée à même le fruit de la vente. L'immeuble a une valeur foncière de 35,5 millions et B.T. demande que la mise à prix soit fixée à 17,7 millions.

La responsabilité de l'assureur

Joint au téléphone, le directeur général de la Ville, Jack Benzaquen, explique que la Ville n'a nullement l'intention de payer la facture. Le contrat avec Lux Dev était clair: l'entreprise était responsable des imprévus.

Aujourd'hui, Lux Dev est en faillite et c'est l'assureur de l'entreprise qui est responsable de l'achèvement des travaux en vertu de la caution qui avait été prise. Jack Benzaquen s'attend donc à ce que l'assureur règle ce litige avec B.T. Céramique.

«La facture pour les extras est totalement démesurée. Nous ne céderons pas au chantage, même si cette situation crée des problèmes à la piscine», dit M. Benzaquen.

Le gestionnaire doute beaucoup que l'hôtel de ville soit finalement mis aux enchères dans cette affaire. Un juge de la Cour supérieure aura à trancher, au cours des prochains mois. Au moment de mettre sous presse, l'avocat de B.T., Nick Bouzuoita, n'avait pas rappelé La Presse.