C'est avec émotion que Farah Rohrer, 24 ans, est entrée dans l'étable de la ferme familiale, jeudi. «C'est la première fois que je la vois sans vaches», a-t-elle expliqué à La Presse. Seul un petit chat y errait toujours.

Le troupeau a été déménagé en décembre. La ferme laitière Stuckli, à Saint-Sylvère, dans le Centre-du-Québec, est maintenant à vendre. Avec ses quatre silos, sa grosse maison, sa piscine, ses entrepôts et ses terres. Le prix est à négocier...

Venus de Suisse il y a 30 ans, les Rohrer ont eu trois filles. Seule Farah a eu la piqûre de la ferme. «J'aime être proche des animaux, le côté nature, être mon propre patron, a énuméré la jolie agricultrice. Oui, il y a beaucoup de travail à faire, mais à notre façon.»

Elle devait prendre la relève. Mais son conjoint est aussi fils de fermiers, et ils ont décidé de s'installer chez ses parents à lui. «C'est un gros problème de trouver un acheteur, a indiqué Farah. Pour la relève de l'extérieur, financièrement, c'est difficile d'acheter une ferme. Et c'est un mode de vie exigeant. Ce n'est pas tout le monde qui est prêt à s'investir sept jours sur sept.»

Pas encore prêts à tout arrêter, ses parents ont emménagé dans une ferme plus petite, plus près de Victoriaville.

«Il y a vraiment un problème de relève, qui est essentielle, a lancé Farah. C'est nous qui nourrissons le monde. Qui le nourrira dans 50 ans?»

Des acheteurs étrangers?

Claude Chartier vend aussi la ferme de Wotton, en Estrie, où il est né il y a bientôt 65 ans. Pour 550 000$, il offre la maison, la grange, 3 silos et plus de 85 hectares avec vue sur une montagne. «Quand il y a des acheteurs, ils n'ont pas d'argent, a-t-il indiqué. Il y en aura peut-être de l'étranger.»

M. Chartier a d'abord vendu ses vaches, s'est lancé dans le boeuf, a arrêté. Il continue de cultiver sa terre et vit de son commerce de soudure. «Pour finir mes vieux jours, il faut que je vende», a-t-il fait valoir. L'agriculteur a repris la ferme de ses parents en 1977. «Ça fait 33 ans, je suis brûlé, fini raide, a-t-il soupiré. Comme je dis: j'ai des valeurs, mais pas d'argent!»

Plus de 2 millions pour une ferme laitière

Une recherche dans l'internet permet de trouver plusieurs autres exploitations agricoles à vendre au Québec. Une ferme de fraises, de framboises et de maïs à Contrecoeur, en Montérégie, avec chalet pour les employés saisonniers, est soldée à 395 000$.

Pour 600 000$, on trouve une ferme laitière à Matane, sans quota de lait. Si l'on veut un quota, il faut allonger 2,4 millions pour une ferme laitière à Saint-Évariste-de-Forsyth, dans Chaudière-Appalaches. Une porcherie est aussi à vendre pour 1,2 million à Upton, en Montérégie. Avis aux intéressés.

Exploitations agricoles à vendre

Au Québec, il y a:

> 3280 exploitations agricoles dont la vente ou la cession sont prévues d'ici cinq ans

> 31% d'entres elles n'ont pas de relève désignée (mais pensent en trouver)

> 8% ont une relève incertaine

> 61% ont une relève désignée

Source: Profil de la relève agricole au Québec 2007, MAPAQ 2010.