(Banff) Une petite promenade sur la rue principale de la station touristique de Banff, en Alberta, pourrait laisser croire que tout va pour le mieux : les terrasses de restaurant sont pleines et la circulation sur les sentiers de randonnée pédestre autour de la ville est lourde.

Mais les apparences sont souvent trompeuses. Même si l’Alberta compte lever la plupart des restrictions mises en place pour lutter contre la COVID-19, les commerces locaux et l’Office du tourisme du parc national de Banff prévoient que les touristes étrangers brilleront par leur absence pour un deuxième été d’affilée.

Les données entre 2019 et 2021 semblent se comparer. Au premier semestre de 2021, on recensait 1,1 million de visiteurs, comparativement à un peu moins de 1,2 million pour la même période en 2019.

Une différence pourtant : en 2019, bon nombre de ces visiteurs venaient de l’extérieur du pays. Et les touristes étrangers dépensent de façon différente que les Canadiens.

« Les Albertains et les Canadiens sont beaucoup plus confiants à l’idée d’explorer eux-mêmes leurs parcs nationaux. Ils ne cherchent pas un soutien comme un guide d’interprétation ou une visite en autocar », souligne la présidente et cheffe de la direction de l’office du tourisme, Leslie Bruce.

Les voyagistes ont eu beaucoup de mal à se maintenir à flot au cours de la pandémie, malgré leurs efforts pour attirer le visiteur canadien par des visites guidées en vélo électrique ou en vélo de montagne, signale-t-elle.

Mme Bruce dit que le nombre de réservations dans les hôtels avait également baissé. De nombreux visiteurs viennent des villes voisines comme Calgary et ils ne viennent que passer la journée plutôt que rester plusieurs nuits.

Si un plus grand nombre de Canadiens des autres provinces et territoires canadiens viennent à Banff, on ignore encore pendant combien de temps leur séjour durera.

« Les visiteurs étrangers ont tendance à rester plus longtemps. La grande question que nous nous posons est de savoir combien de temps les gens resteront. Resteront-ils cinq nuits ? Sont-ils juste de passage ? Cela reste à voir », souligne Mme Bruce.

La fermeture de la frontière a été ressentie au Beaujolais Boutique B & B.

Albert Moser, le propriétaire de l’établissement, raconte que le cahier de réservations était rempli pendant les précédentes saisons estivales. En 2021, il n’y est parvenu que le week-end, et encore, en baissant ses tarifs de 20 %.

Il reçoit plusieurs appels d’annulation, toutes les semaines. Les Américains, optimistes au début, se rendent compte que la frontière canadienne pourrait ne pas être rouverte à temps pour leurs vacances.

Sa situation actuelle n’est viable que parce que sa femme et lui sont les seules personnes s’occupant de l’établissement. S’il espère que la vaccination généralisée lui permettra de se tenir un peu occupé, il dit que la véritable relance ne se produira que lorsque la frontière sera rouverte.

« Je reçois autant de réservations que d’annulations parce que les Américains ne savent pas ce qui va se passe. À un moment donné, ils doivent faire leurs plans. Ils n’attendront pas tout l’été [pour que leurs déplacements soient autorités]. »

De leur côté, les restaurateurs de la région affichent un certain optimiste en ce début d’été. Le plan de déconfinement annoncé par le gouvernement albertain leur permettra d’ouvrir sans limites de capacité d’ici la fin de la semaine.

Mais ce sentiment de « voir la lumière au bout du tunnel » s’accompagne d’une appréhension certaine chez la plupart des acteurs du secteur touristique de Banff.

Stéphane Prévost, chef et directeur associé de Block Kitchen and Bar et Shoku Izakaya, se souvient d’avoir cru que les choses s’amélioraient également après l’été 2020. Résultat, 2021 a été année difficile jusqu’à maintenant, surtout lorsque l’Alberta est entrée dans un confinement complet pendant une période de deux semaines au printemps.

« Ça été comme un coup de pied au bas du corps, compare-t-il. Il existait un fort sentiment de résignation et de frustration dans la plupart des entreprises. »

Chaque épisode de confinement a eu un impact considérable sur Banff, où environ 90 % de l’économie est directement ou indirectement liée au tourisme, selon l’office du tourisme Banff/Lac Louise.

De nombreux emplois ont disparu immédiatement au début de la pandémie, obligeant des travailleurs étrangers à faire leurs valises ou transformant de nombreux citoyens de Banff en chômeurs.

Le taux de chômage a grimpé en flèche à 85 % à un moment donné au début de la pandémie. Le taux d’inoccupation dans les hôtels est passé de 0 % à 15 % au début de la pandémie.

Malgré cela, très peu d’entreprises ont fermé pour de bon au cours des 18 derniers mois, mentionne Mme Bruce. L’avenir s’annonce bien, croit-elle, notamment à cause de la nouvelle relation que bon nombre de personnes entretiennent avec le plein air.

« Le nombre de personnes qui veulent être à l’extérieur a augmenté. Nous avons les infrastructures pour soutenir [ce tourisme]. »