À écouter
En Louisiane, un Mardi gras sans musique, c’est impensable. Le musicien zydeco Terrance Simien, lauréat de deux prix Grammy, se souvient des « Courirs » des Mardi gras de son enfance, quand, avec ses proches et ses amis, ils allaient d’une maison à l’autre, costumés et accordéon aux bras, pour quêter les victuailles (saucisses, poules et canards) servies au festin le soir même. « La musique était partout dans ma jeunesse », raconte-t-il au téléphone depuis Lafayette, en Louisiane. « Et on lâchait vraiment notre fou en soirée. C’était une grosse affaire, Mardi gras ! Je me souviens que certains lançaient même une poule sur la piste de danse pour semer la pagaille… » Des célébrations qui ont toujours lieu en pays cajun. Sauf cette année, à cause de la pandémie. Samedi dernier, Terrance Simien est monté sur scène avec son groupe, The Zydeco Experience, pour la première fois depuis le début de la pandémie.
La fête de Mardi gras est un peu différente à La Nouvelle-Orléans, où se tiennent en général de nombreux défilés, organisés par des clubs sociaux nommés « krewes », dans une ambiance survoltée. Mais la musique, encore là, est omniprésente. Jazz, big band, R’n’B, hip-hop, zydeco : la culture musicale de la plus grande ville de Louisiane est épatante. Fêtes et défilés ont tous été annulés pour contrer la transmission de la COVID-19 cette année, mais les célébrations se transportent sur le web, notamment avec la tenue de l’évènement gratuit « Mardi gras For All Y’all », qui a eu lieu le week-end dernier. En vedette : le Preservation Hall Jazz Band, George Porter Jr., Sam Price and the True Believers, etc. On peut revoir les trois soirées sur le site de l’événement Et pour le souper de mardi soir, le site neworleans.com a préparé une liste de lecture sur Spotify.
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Pour les yeux
Les chars allégoriques, donc, n’envahiront par les rues de La Nouvelle-Orléans en vue du Mardi gras, mais ce n’est pas vrai que les citadins s’en passeront pour autant, lance Kelly Schulz, qui est née et a grandi à « Big Easy », surnom de La Nouvelle-Orléans. « De nombreux chars ont été réunis sous les chênes de City Park, où les gens peuvent les admirer de leur voiture », raconte celle qui travaille pour l’organisme de promotion touristique New Orleans & Company. Des résidants et des « krewes » ont aussi transformé leur maison en char allégorique cette année. Une carte interactive permet même d’admirer, à des milliers de kilomètres, quelques décorations qui rendent bien l’esprit de la fête, où coutumes locales et satire politique font bon ménage. « Les gens savent à quel point le carnaval est important à La Nouvelle-Orléans, dit Mme Schulz. Rien ne nous empêchera de le fêter ! »
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Dans l’assiette
La cuisine de La Nouvelle-Orléans, c’est un carnaval à l’année. À la fois créole et cajun, riche et savoureuse, on la prépare étonnamment peu au Québec, qui partage pourtant des racines évidentes avec la Louisiane, où des milliers d’Acadiens ont été déportés au milieu du XVIIIe siècle. Le chef Richard Taitt est l’un des rares à la servir à Montréal, au Bistro Nolah, à Dollard-des-Ormeaux. Né de parents caribéens, il a grandi ici, mais a fini par tomber amoureux de cette cuisine très réconfortante. Pour le carnaval, cette semaine, Richard Taitt proposera même un gombo d’alligator, s’il parvient à mettre à temps la main sur cette viande blanche au goût délicat. Les curieux pourront bien sûr savourer d’autres plats à emporter, comme la jambalaya. Le bistro fait aussi la livraison avec de nombreuses plateformes, dont CheckPlease et Uber. Envie de cuisiner cajun ? Voici la recette de gombo aux fruits de mer du chef Taitt.
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À voir
La richesse culturelle de la Louisiane est envoûtante. Tour à tour française, espagnole et américaine, elle a été façonnée au fil des siècles par des populations d’origines très variées. Le métissage y a donné naissance à des coutumes colorées et parfois surprenantes, dans un décor souvent fabuleux. Des films comme Beasts of the Southern Wild, de Benh Zeitlin (2012), ou Down by Law, de Jim Jarmusch (1986), avec Tom Waits, John Lurie et Roberto Benigni, par exemple, rendent bien l’ambiance particulière qui peut régner dans ce coin de pays.
Mais pour en apprendre davantage sur les mœurs d’une ville comme La Nouvelle-Orléans, c’est la série Treme, créée en 2010 par David Simon et Eric Overmyer pour HBO, que suggèrent Richard Taitt et Terrance Simien. Dans la foulée de l’ouragan Katrina, qui a dévasté la ville en 2005, « on y découvre notamment l’étonnante culture des Indiens de NOLA », souligne M. Simien. Et la culture culinaire, la scène musicale et les enjeux multiples reliés à la reconstruction d’une ville sans pareille.
Envie de plonger rapidement au cœur de la culture de La Nouvelle-Orléans ? Le premier épisode du magazine culturel Résiste !, animé par Gabrielle Laïla Tittley à TV5 et en ligne, est parfait pour une immersion totale en moins d’une heure.