Le «canyonisme» est une activité encore méconnue au Québec, un territoire qui recèle pourtant d'incroyables endroits pour sa pratique. Initiation qui allie sport et nature en plein coeur de la réserve faunique de Matane.

Au-dessus de nous, une cascade d'une dizaine de mètres crache son débit d'eau sur nos épaules. Sous nos pieds, au-delà de la corniche, une marmite aux reflets verts attend qu'on s'y jette. C'est dans cette curieuse situation qu'on se trouve lorsqu'on décide de se mesurer au ruisseau Beaulieu et à son canyon de roche et de verdure.

Situé au beau milieu de la réserve faunique de Matane, en Haute-Gaspésie, le ruisseau Beaulieu est l'un des plus beaux endroits de canyonisme au Québec. Il n'a été repéré que très récemment par Yann Barriault, fondateur d'Eskamer Aventure. «Son potentiel est indéniable: un courant modéré, beaucoup de roches de surface, plusieurs cascades impressionnantes et des obstacles naturels faciles à franchir par des sauts ou du rappel», précise-t-il.

Le canyonisme (ou canyoning), qui associe le plaisir de la nage en eaux vives aux techniques de corde du rappel en escalade, est une activité qui permet de prendre la mesure de la nature.

L'expérience commence par l'enfilage d'une épaisse combinaison en néoprène, d'un baudrier et d'un casque - le tout produisant une allure mi-plongeur, mi-alpiniste. Puis c'est l'immersion dans le ruisseau jusqu'aux cuisses afin de suivre le courant, tantôt en équilibre sur les rochers, tantôt en nageant sur le dos avec un sac en guise de flotteur.

Mais arrive bientôt le premier vrai défi, qui consiste à faire un saut de plus de trois mètres depuis une corniche en amont d'une chute d'eau. Les guides Yann et Greg sont là pour assurer la sécurité du saut et veiller à rassurer les moins audacieux. Parce qu'il en faut, du courage, pour sauter! C'est d'ailleurs le souffle un peu coupé par l'émotion qu'on sort ensuite la tête de l'eau.

Tout le long du ruisseau, les participants passent ainsi sans arrêt de sections de nage à passages sur rocher, le tout ponctué de sauts et de glissades dans des toboggans naturels.

Populaire en Europe depuis les années 90, notamment dans les Alpes, la Sierra de Guara en Espagne et les régions pourvues de gorges et de canyons naturels, le canyonisme est encore peu connu au Québec. Trois entreprises seulement proposent des sorties pendant la belle saison (voir encadré). Pourtant, avec ses massifs peu élevés et ses nombreux cours d'eau, le Québec recèle d'incroyables lieux naturels encore inexploités. «Nous connaissons plusieurs sites autour de Cap-Chat, plus ou moins aquatiques, où nous nous rendons selon le niveau d'expérience du groupe, précise Yann Barriault. L'un d'entre eux comporte de belles sections de rappel et une tyrolienne de 28 mètres de long avec vue sur le golfe du Saint-Laurent. Un autre site offre davantage l'occasion de s'initier au canyonisme à la manière d'un parcours d'aventure, mais dans un ruisseau... Cet été, nous sommes encore en pleine exploration de la région pour dénicher d'autres belles cascades où s'amuser.»

Photo fournie par Eskamer Aventure

Prêts à affronter la chûte?

La descente de la chute

De retour dans l'eau, les membres du groupe se concentrent à l'arrivée au sommet de la cascade monumentale. Cette fois-ci, pas de saut, mais une descente en rappel d'une dizaine de mètres jusqu'au bas de la chute. C'est le seul moment de la journée où les baudriers et les mousquetons serviront. Il n'est pas nécessaire d'avoir déjà pratiqué le rappel ni d'avoir la moindre connaissance en escalade pour franchir l'obstacle, puisque les guides assurent la descente en toute sécurité.

Sur le côté de la cascade, la paroi glissante rend la progression assez difficile. Il faut passer sous la chute d'eau pour traverser la falaise. Le débit d'eau semble fou et les gouttelettes crépitent sur le casque. Une fois au pied de la cascade, le chemin parcouru nous semble impressionnant. Le panorama du gouffre qui nous entoure l'est tout autant, avec sa végétation luxuriante qui pousse à même la roche. Une dizaine de brasses à la surface de ce trou d'eau noire complète une expérience grisante de sensations...

«Notre parcours au canyon Beaulieu est un beau mélange de toutes les expériences proposées en canyonisme, explique Yann Barriault. Les maniaques de sensations fortes adorent les sauts et les glissades en toboggan, alors que les descentes en corde, qui sont les seules parties vraiment techniques de l'excursion, plaisent davantage aux amateurs de verticalité. C'est rare d'avoir l'occasion de faire la descente en rappel d'une cascade de 30 pieds dans sa vie!»

Toutes les personnes en bonne condition physique peuvent vivre cette expérience, et les enfants sont les bienvenus à partir de 12 ans. Seuls une bonne dose de courage et le désir de s'amuser sont de rigueur.

Où pratiquer le canyonisme?

> L'endroit de prédilection au Québec pour s'initier à l'activité, c'est la chute Jean-Larose, au pied du mont Saint-Anne, où les néophytes se familiarisent avec la descente en corde, avant de se mesurer à deux cascades verticales de plus de 10 mètres.

> Depuis cette année, il est possible de pratiquer le canyonisme dans les belles cascades de la Vallée-Bras-du-Nord. Canyoning-Québec y propose des sorties de quelques heures à la fameuse chute Delaney, et même des excursions de deux jours aux cascades des falaises, avec nuit en refuge.

> Plusieurs excellents lieux de canyonisme donnent aussi l'occasion de découvrir la face cachée de Charlevoix. C'est toujours Canyoning-Québec qui propose des demi-journées ou des journées complètes autour de Baie-Saint-Paul ou plus profondément dans l'arrière-pays, dans la ZEC des Martes.

> Enfin, du côté de Gaspé, Griffon Aventure propose des randonnées nautiques à la journée avec sauts et glissades d'eau dans des fosses d'eau vert émeraude...

www.eskamer.ca

canyoning-quebec.com

www.griffonaventure.com