C'est quand on s'y attend le moins qu'on fait les plus belles découvertes. Un beau matin de septembre, sur les conseils d'une agente touristique locale, je débarque au Pavillon de la faune, à Stratford, dans les Cantons-de-l'Est. Tout ce que j'en sais, c'est qu'il s'agit d'un musée qui présente une collection d'animaux naturalisés. Autrement dit, je m'attends à une série de têtes de cervidés empaillées alignée sur les murs. Ça me semble aussi captivant qu'une visite chez le dentiste.

Or, j'ai eu droit à toute une surprise à l'intérieur. Fondé par un passionné de chasse, Jean-Luc Couture, le Pavillon de la faune contient 33 dioramas (des reconstitutions en trois dimensions) d'animaux naturalisés dans leur environnement.

Orignaux dans la toundra, ours polaires sur la banquise, wapitis dans les montagnes, la beauté et le réalisme des décors me jettent par terre.

 

La singularité de la chose, c'est que la majorité des animaux exposés ont été abattus par M. Couture lui-même! Avec l'aide de photos prises en expédition, ce chasseur émérite et son cousin, le peintre Gilles Poulin, sont parvenus à reconstituer fidèlement les milieux de vie de ces bêtes.

Les gigantesques fresques en trompe-l'oeil nous font voyager dans les endroits les plus reculés et les plus beaux de l'Amérique du Nord. Une merveille!

 

Photo: Simon Diotte, collaboration spéciale

À Piopolis, on admire les sentiers poétiques en forêt et les plages sablonneuses.

Cette attraction hors du commun a été la première étape de mon voyage sur la Route des sommets, troisième route touristique officielle des Cantons-de-l'Est. Longue de 157 km, elle relie les deux parcs nationaux du coin, de Frontenac jusqu'au Mont-Mégantic, secteur où se dressent les plus hauts sommets du Québec méridional.En chemin, on croise huit sommets accessibles à pied, du Morne de Saint-Sébastien (820 m), en passant par le mont Bélanger (925 m), la montagne de Marbre (923 m) et le mont Saint-Joseph (1065 m). Cependant, cette voie touristique ne s'adresse pas qu'aux randonneurs aguerris. Activités nautiques, courte randonnée en terrain plat, musées et, surtout, panoramas jouissifs permettent à tout le monde d'y trouver son compte.

Sur le mode contemplatif

Après ma visite au Pavillon de la faune, je suis allé explorer le parc national de Frontenac, qui englobe une partie du Grand lac Saint-François, troisième plan d'eau en importance au sud du Saint-Laurent. Peu montagneux, ce parc souffre du manque d'attraits spectaculaires. Il se savoure donc en mode contemplatif, me prévient le garde-parc Medhi Daoudi. «Il faut être à l'écoute», ajoute-t-il.

La découverte du lac à la Barbue, un plan d'eau d'une grande valeur écologique, se fait en suivant un circuit autoguidé en canot. Le principe, original, consiste à pagayer d'un panneau d'interprétation flottant à un autre. Plantes carnivores, espèces végétales rares, faune aquatique, les panneaux dévoilent les secrets de ce lac en voie d'eutrophisation, c'est-à-dire dans son dernier cycle de vie.

Cette excursion permet d'admirer quelques grands hérons (très présents), des pygargues à tête blanche (si on a de la chance) ou encore de voir des orignaux se gaver de plantes aquatiques (si on est vraiment chanceux). Quant aux cerfs de Virginie, on les admire par dizaines en se promenant dans le sentier de la Colline (3 km aller-retour). Le truc: se mettre en mode contemplatif!

Photo: Simon Diotte, collaboration spéciale

Les points de vue à la Maison du granit valent leur détour. Au loin, on aperçoit le lac Drolet.

Des montagnes de granitC'est à partir de Saint-Sébastien que la Route des sommets porte le mieux son nom. Les montées et les descentes, sur des routes rectilignes qui s'étirent jusqu'à l'horizon, se succèdent sans relâche. Pas de doute, on se frotte aux Appalaches.

À la Maison du granit, à flanc de montagne, on raconte l'épopée des carrières granit qui ont jalonné le territoire au XXe siècle. Cette roche a servi à la construction de deux joyaux de notre patrimoine religieux, la basilique Sainte-Anne-de-Beaupré et l'oratoire Saint-Joseph. Bien qu'instructives, les expositions du centre d'interprétation n'impressionnent guère.

En revanche, la Maison du granit entretient 13 km de sentiers pédestres, dont la boucle du Morne de Saint-Sébastien, un incontournable. Cette courte randonnée de 2,4 km aller-retour mène au sommet du mont Saint-Sébastien, à 820 mètres d'altitude. De là, on profite d'une vue à 360 degrés sur la région. On marche aussi dans les vestiges d'une carrière.

Chef-lieu de la région, la municipalité de Lac-Mégantic, 6000 habitants, constitue un point de ravitaillement apprécié, mais sans grand attrait touristique. J'ai donc roulé jusqu'à Piopolis, village établi sur les rives du lac Mégantic, fondé au XIXe siècle par des zouaves pontificaux. La vue des montagnes à partir de la marina, les sentiers poétiques en forêt et les plages sablonneuses ont tôt fait de me conquérir. En un mot: pittoresque.

Photo: Simon Diotte, colalboration spéciale

Au parc national de Frontenac, on découvre toute la richesse écologique du lac à la Barbue en pagayant d'un panneau d'interprétation flottant à l'autre. Un concept unique.

Pizza pour le mont GosfordDes pizzas au petit-déjeuner. Voilà ce que l'on propose à l'auberge Au soleil levant à Piopolis. Curieux, j'ai essayé la pizza bacon, saucisse et jambon. Mon verdict: délicieux! Ça commence bien une journée qui s'annonce ardue, car, ce matin, je m'attaque à la plus haute montagne du Québec méridional, le mont Gosford, qui culmine à 1193 mètres.

En suivant un sentier de 4,5 km, on accède directement au sommet, où se dresse une tour exposée aux quatre vents permettant d'embrasser toute la région du regard. Au nord se trouvent le mont Mégantic et le lac du même nom. Au sud, notre regard pointe vers les montagnes du New Hampshire et du Maine. C'est magnifique. Le mont Gosford est l'un des secrets les mieux gardés de la région.

Pour finir en beauté, je me suis baladé en voiture dans les rangs isolés des municipalités de La Patrie et de Chartierville. C'est dans ce coin de pays, entre le massif du mont Mégantic et les montagnes frontalières, que l'on profite des panoramas les plus spectaculaires. Faute de temps, j'ai remis à plus tard ma visite du parc national du Mont-Mégantic. J'irai donc me perdre dans les étoiles une autre fois.

RepèresSuggestion d'hébergement

À Piopolis, l'Hébergement aux cinq sens permet de vivre une expérience d'une nuitée en yourte. Deux sofas-lits, table à manger, vaisselle, lavabo et cuisinière au gaz équipent chacune des yourtes dispersées en forêt. Au centre de la tente circulaire se trouve un poêle à bois dans lequel on ne brûle que des bûches écologiques. Nouveau, sympa et ouvert à l'année. auxcinqsens.ca

Où manger?

Dans une région peu développée touristiquement, on ne trouve pas de petits bistros sympathiques à tous les coins de rue. Cependant, rien de mieux pour goûter à la saveur locale que d'aller dans les restos du coin fréquentés par les gens du coin. Comme expérience authentique, j'ai aimé le Resto Bar du Lac, à Lac-Drolet. À l'extérieur, ça semble un trou miteux, mais à l'intérieur, les repas du jour sont honnêtes - hot hamburger et poulet frit, par exemple - et l'ambiance très conviviale. Tout le monde m'a salué en entrant, tout en se demandant intérieurement: «Qu'est-ce qui fait là, cet étrange ?» Resto Bar du Lac, 781, rue Principale, Lac-Drolet Pour goûter aux pizzas déjeuner, il faut se rendre à l'auberge Au soleil levant, à Piopolis. Si cette expérience culinaire vous tente moins, ce resto offre également des déjeuners plus classiques. On y mange correctement à toute heure du jour. Le soir, c'est un bar sympathique fréquenté par les touristes et les gens du coin. Auberge Au soleil levant, 499, rue Principale, Piopolis À Notre-Dame-des-Bois, la boulangerie artisanale chez Mamie offre de succulents repas frais, servis par un personnel très sympathique. Après une randonnée en montagne, un bon sandwich et un excellent café, il n'y a rien de mieux pour reprendre des forces. Chez Mamie, 24, rue Principale Ouest, Notre-Dame-des-Bois.

Un secret bien gardé

Sortez de l'itinéraire de la Route des sommets pour vous balader dans les petites municipalités de Chartierville et de La Patrie. À partir de rangs perdus, on profite de vues magnifiques sur le parc national du Mont-Mégantic et les montagnes frontalières, qui séparent le Canada des États-Unis. Un décor de cartes postales.

S'y rendre

Pour commencer son itinéraire par l'entrée nord de la Route des sommets (par Stratford), il faut prendre l'autoroute 10, puis l'autoroute 610 et la route 112 jusqu'à Saint-Gérard. Par l'entrée sud (La Patrie), autoroute 10, autoroute 610, route 112, puis on bifurque sur la route 253 pour rejoindre la route 212. Dans les deux cas, prévoyez près de trois heures.

Mes coups de coeur

> Les points de vue sublimes sur les montagnes à partir des villages de La Patrie et de Chartierville.

> Le réseau de sentiers sillonnant le mont Gosford. > Le Pavillon de la faune, situé à Stratford.

Ce que j'ai moins aimé

> La tourelle délabrée au sommet du Morne de Saint-Sébastien. Réparez-la, S.V.P.!

> Le fait que plusieurs sentiers de randonnée ferment pendant la période de la chasse. Avant de vous y aventurer, vérifiez si les sentiers sont bel et bien ouverts aux randonneurs. Sinon, on pourrait vous confondre avec un chevreuil!