Le site exceptionnel de Rocamadour célèbre en 2013 mille ans de pèlerinages auprès de sa Vierge noire et lancera lundi son jubilé, année sainte où les fidèles bénéficient d'une indulgence plénière.

Suspendu à une falaise du Quercy au-dessus du village, le sanctuaire abrite une statue de Notre-Dame de Rocamadour coiffée d'une tiare d'or et connue pour ses miracles. Il attire depuis le Moyen Âge des milliers de pèlerins tels Saint Louis et sa mère Blanche de Castille, Saint Dominique, Saint Bernard, Saint Antoine de Padoue ou Charles le Bel.

Ce site à couper le souffle, inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO, se trouve dans un canyon géant au fond duquel coule l'Alzou. Pour l'atteindre, les visiteurs doivent monter quelque 220 marches. Les pèlerins les gravissaient autrefois à genoux. «Lourdes, c'est pour les pèlerins malades; Rocamadour, pour les bien portants», souffle avec humour le recteur, l'abbé Ronan de Gouvello.

Un premier oratoire aurait été construit dans ce lieu après le concile d'Éphèse, au Ve siècle. Et dès le XIe siècle, le sanctuaire était considéré comme le quatrième lieu saint de la chrétienté, avec Jérusalem, Rome et Saint-Jacques-de-Compostelle.

«Un émerveillement»

Aujourd'hui Rocamadour reçoit un million de visiteurs par an et est l'un des sites les plus visités de France. Mais, reconnaît l'abbé de Gouvello, sur la totalité des personnes de passage à Rocamadour, «seules 3 %» ont une démarche de pèlerinage.

«Ici, on vient pour le site, comme au Mont-Saint-Michel, et on découvre quelque chose de curieux, un émerveillement... Ma mission, c'est de donner du sens» à la visite, explique-t-il.

L'«enceinte sacrée, lieu propice au développement de la vie spirituelle», selon le recteur, comprend la basilique Saint-Sauveur et sept chapelles. Dans l'une d'elles, où se pressent les pèlerins depuis mille ans, trône la statuette de la Vierge noire.

Les bénédictions apportées selon l'Église par N.-D. de Rocamadour ont été consignées dès 1172 dans un «Livre des miracles». Ceux-ci ne sont pas reconnus officiellement par l'Église, comme ceux de Lourdes, et il peut s'agir de guérisons physiques, de mariages, de maternités, ou d'expériences spirituelles comme la conversion du compositeur Francis Poulenc.

«Dans ma jeunesse, on en parlait, ça se savait que la Vierge Marie faisait des miracles», se souvient le père Jean-François Lafon, 80 ans, originaire du village.

L'Espérance comme un roc

Des maquettes de navires, ex-voto disposés dans les chapelles, remercient N.-D. de Rocamadour pour son intercession «pour des marins en péril», tel le découvreur du Canada Jacques Cartier, qui fit le pèlerinage après avoir demandé à la Vierge d'épargner son équipage frappé par le scorbut.

Dès lundi, le sanctuaire vivra pour la sixième fois de son histoire un jubilé, accordé par le pape Benoît XVI avant qu'il ne quitte ses fonctions.

Le jubilé permet au fidèle d'accéder à l'indulgence plénière, et non pas seulement partielle, de l'Église, qui le libère totalement de la peine temporelle due pour un péché.

L'octroi de ce jubilé s'est accompagné de l'affiliation du sanctuaire à la basilique Sainte-Marie-Majeure de Rome, où le nouveau pape François s'est recueilli le lendemain de son élection.

Il sera également accompagné de l'élévation de Saint-Sauveur de Rocamadour au rang de «basilique majeure», 100 ans après sa dédicace comme «basilique» par le pape Pie X. Plus de 50 événements ponctueront ces mois de jubilé dont la devise est «Car rien n'est impossible à Dieu».

Le maire Pascal Jallet s'attend à un afflux de touristes et pèlerins, et se prépare à gérer la circulation des voitures aussi bien que des piétons dans l'unique rue de son petit village.

Un poste de gendarmerie provisoire y est déjà ouvert chaque été, des circuits piétonniers seront tracés pour gérer les flux et des stationnements supplémentaires seront ouverts.

Le sanctuaire, dont la devise est «l'Espérance ferme comme le roc», est prêt à faire face à ce «temps de joie», comme le décrit l'abbé de Gouvello.