La jungle se reflète sur la surface miroir de la rivière Noire d’Adjarra. La barque glisse sans bruit au milieu des palmiers, tandis que le jour baisse. Le silence est total. Le calme, exquis. Isaac, mon guide, m’avait promis l’émerveillement une fois la terre béninoise foulée. Je suis conquise.

Niché entre le Togo et le Nigeria, le Bénin est un pays francophone de l’Afrique de l’Ouest encore peu connu des touristes. Une aubaine pour qui, comme moi, aime le calme et privilégie les rencontres. La rivière Noire, qui doit son nom aux feuilles tombées au fond de l’eau et à la terre qui s’y mêle, m’amène à un village où j’apprends comment faire du vin de palmier raphia et de l’huile de palme (d’une belle couleur rouge, elle remplace la graisse animale dans la cuisine béninoise). J’y admire la dextérité des femmes tressant le raphia pour en faire des paniers. Je m’arrête pour discuter un moment avec un peintre-sculpteur qui aménage le terrain où sèchent ses toiles pour en faire un centre d’art.

LA PRESSE

J’ai décidé pour cette première découverte du pays de prendre mon temps. Aussi, je resterai pour ce voyage dans le Sud. Cotonou, Ganvié, Dassa-Zoumé, puis en redescendant, Abomey et Ouidah. Je quitterai parfois la route pour partir à la rencontre de villages et de villes que l’on atteint en barque.

PHOTO AURÉLIE RESCH, COLLABORATION SPÉCIALE

Dans la cité lacustre Ganvié, les habitants font la navette à la rame ou à la voile pour aller vendre leurs produits au marché et en rapporter des vivres.

J’ai trouvé l’accompagnement par un guide nécessaire. J’ai choisi Isaac Abissi et son agence locale Voyages modestes. Beaucoup de rencontres et de découvertes n’étaient connues que de lui ou d’habitants initiés. Sans guide, je serais passée à côté de beaucoup de choses.

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Une femme fabrique un panier en raphia.

La conduite (particulièrement après la saison des pluies) peut s’avérer très compliquée. Savoir quel autre chemin prendre et savoir manœuvrer dans des chemins à ornières est un atout certain.

Bénin en arts

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Œuvre de l’artiste béninois Dominique Zinkpè au musée Unik, à Abomey

Les artistes et entrepreneurs sont nombreux dans le pays et j’aurai de nombreuses occasions d’admirer des œuvres sur la roche, sur la pierre, sur le bois, sur l’argile, sur le textile ou sur la peau, et de voir des projets de développement naître. Ce fil conducteur improvisé m’offre un visage à la fois traditionnel et étonnamment moderne du Bénin.

Adjarra est connu pour être la cité des tambours et l’air bruisse des rythmes que les hommes frappent sur leur djembé qu’ils ont fabriqué. Le soir venu, je loge dans le centre artistique et culturel Ouadada. L’atmosphère y est paisible et les œuvres exposées, atypiques. On se laisse gagner dans la cour intérieure par l’envie de créer, de composer et de danser.

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Temple vaudou à Abomey

Au village Abegui, dans la commune de Pobé, c’est sur leur corps que les femmes ont fait réaliser de véritables œuvres d’art. Des tatouages au graphisme unique couvrent leur ventre et sont un signe de séduction, tout comme les perles qui ceignent leur corps. Ces parures, je les retrouve sur les immenses fresques près de la place de l’Amazone à Cotonou qui représentent des Béninoises les portant ou les assemblant. Je les observe sur de jeunes filles peules dans un campement wodaabe. Les perles se vendent sur les marchés colorés et animés que j’égraine en me dirigeant vers Dassa-Zoumé. Elles s’enfilent savamment pour créer des colliers lumineux et originaux, comme ceux que me proposait une jeune créatrice sur la plage de Grand Popo.

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Mémorial du génocide du Rwanda avec un agencement de machettes rouillées au musée Unik, à Abomey

Bijoux, pagnes, tresses et coiffes parent les femmes. Paysanne, entrepreneure, artiste, marchant avec une jarre sur la tête ou avec un bébé attaché dans le dos, confectionnant des poteries ou gérant un restaurant le sourire aux lèvres, la Béninoise est coquette et élégante.

D’autres œuvres jalonnent mon voyage dans le sud du Bénin : les peintures des temples consacrés à la culture vaudoue, les sculptures et les peintures du musée Unik près d’Abomey, les masques portés pendant les rituels, comme celui de la fête des Morts auquel j’ai pu assister, dans le travail sur roche de l’artiste Okuta, incarné dans des monuments dédiés aux esclaves emportés vers les Antilles à Ouida, dans la musique qu’écoute Isaac au volant de la voiture qui m’emmène là où lui seul connaît les trésors intimes de son pays.

Si les Béninois me fascinent par leur créativité, leur Histoire et leur gentillesse, la nature du Bénin m’apparaît aussi comme un chef-d’œuvre intemporel. Le rouge de sa terre qui tranche sur l’émeraude de ses forêts denses, les nuages cotonneux qui se reflètent dans la surface des lagunes, les pierres anthracites sculptées et trouées par les pluies dans les collines de Dassa-Zoumey, les fleurs sauvages aux couleurs vives qui chatoient sous les rayons du soleil, les fruits juteux au parfum étourdissant, les chants des oiseaux, le ballet des pirogues sur le lac Nokoué dans la cité lacustre Ganvié… Autant d’atouts qui me font promettre de revenir au Bénin, pour explorer le centre et le nord du pays.

Consultez le site de Voyages modestes

À savoir avant de partir

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Roches travaillées par la pluie à Dassa-Zoume

Pour y aller : les compagnies aériennes Air France, Royal Air Maroc et KLM Royal Dutch Airlines assurent des vols (avec escale) entre Montréal et Cotonou.

Formalités et santé : vaccination contre la fièvre jaune obligatoire, traitement antipaludéen fortement recommandé, visa d’entrée (on peut l’obtenir en ligne), passeport valide.

Quand partir au Bénin : il est préférable d’éviter la saison des pluies et de voyager entre novembre et fin avril.