(Paris) La Biélorusse Aryna Sabalenka, N.2 mondiale, a pris fermement position contre la guerre en Ukraine et le président de son pays, allié de la Russie, après sa qualification pour les demi-finales de Roland-Garros mardi.

Après s’être soustraite à l’exercice normalement obligatoire de la conférence de presse après ses deux matchs précédents, avec l’accord du tournoi parisien, Sabalenka s’y est cette fois présentée après sa victoire 6-4, 6-4 face à l’Ukrainienne Elina Svitolina, un nouveau match à dimension politique.

La Biélorusse de 25 ans, qui pourrait devenir N.1 mondiale à l’issue de la quinzaine parisienne, n’a pas évité les questions politiques, et y a répondu. Sans mâcher ses mots. « Je ne soutiens pas la guerre, ce qui veut dire que je ne soutiens pas Loukachenko en ce moment », a affirmé Sabalenka pour la première fois.

« Je ne soutiens pas cette guerre »

« Je ne soutiens pas la guerre. Je ne veux pas que mon pays soit impliqué dans un conflit. Vous savez quelle est ma position […] Je ne soutiens pas cette guerre », a-t-elle encore déclaré. Mais « je ne veux pas que le sport soit mêlé à la politique, car je ne suis qu’une joueuse de tennis de 25 ans. Je veux juste être une joueuse de tennis. »

La décision de Sabalenka de ne pas venir en conférence de presse après ses deux matchs précédents, au motif de préserver sa « propre santé mentale » et son « bien être », faisait suite à son passage devant la presse après son deuxième tour. Dans un échange tendu, une journaliste ukrainienne l’avait sommée de s’expliquer sur ses liens avec M. Loukachenko.

« On a joué beaucoup de matchs de Fed Cup en Biélorussie, et il était avec nous, il prenait des photos de nous. Rien de mal ne se produisait à l’époque en Biélorussie, en Russie ou en Ukraine », s’est-elle justifiée mardi.

Sabalenka a rencontré M. Loukachenko à de multiples reprises dans le passé. Dès 2018, ils se rencontrent en tête-à-tête. À la demande de la jeune joueuse, affirme l’agence d’État Belta.

Le 31 décembre 2020, après une année marquée par l’écrasement de manifestations prodémocratie en Biélorussie, Sabalenka participe à Minsk à un toast avec M. Loukachenko pour le Nouvel An, en compagnie d’autres personnalités soutenant le régime.

À la même période, selon l’agence Belta, elle signe une lettre ouverte, comme 3000 autres sportifs biélorusses, contre la création d’une « Union des sportifs libres de la Biélorussie » soutenant l’opposition politique.

Postée au filet

Jusque-là, Sabalenka ne s’était jamais véritablement exprimée en son nom propre, mais de manière plus générale. « Aucun athlète russe ou biélorusse ne soutient la guerre. Pourquoi faut-il dire haut et fort ce genre de choses ? C’est évident, comme 1 +1 = 2 », avait-elle par exemple déclaré après son match du premier tour face à une autre Ukrainienne, Marta Kostyuk.

Face à Svitolina, Sabalenka a joué un nouveau match à dimension politique mardi après-midi. À la fin de la partie, quand la N.2 mondiale s’est posté les mains posées sur le filet, Svitolina n’est pas venue lui serrer la main, comme les joueuses ukrainiennes le font désormais quand elles affrontent des joueuses russes et biélorusses, et a regagné directement sa chaise.

PHOTO LISI NIESNER, REUTERS

Aryna Sabalenka et Elina Svitolina

À la question de savoir si cette attitude de Sabalenka avait mis de l’huile sur le feu, Svitolina a répondu : « Je crois que oui, malheureusement. »

« Ma première réaction a été de me dire : “Qu’est-ce que tu fais ?”. Parce que j’ai dit clairement ma position », a ajouté l’Ukrainienne, de retour en quarts de finale en Grand Chelem moins de huit mois après avoir donné naissance à son premier enfant en octobre dernier, une petite fille née de son union avec Gaël Monfils, prénommée Skaï.

Pour une place en finale, Sabalenka affrontera jeudi la Tchèque Karolina Muchova (43e), victorieuse 7-5, 6-2 de la Russe Anastasia Pavlyuchenkova plus tôt dans la journée.