Novak Djokovic n’entend pas rigoler. S’il est en Australie, c’est pour gagner son 22e titre majeur. Contrairement à l’année dernière, c’est sur le terrain qu’il devra s’exprimer et non devant une cour de justice.

À son premier tournoi de la saison, à Adélaïde, Djokovic a atteint la finale sans trop d’embûches. Il affrontait le prometteur Sebastian Korda. Le 31e joueur mondial a arraché la première manche au bris d’égalité. À l’issue de cette manche, en allant vers sa chaise, Djoko a fusillé du regard les gens de son équipe confortablement installés dans les gradins. À la manière de J. K. Simmons dans Whiplash. Le Serbe a ensuite crié à un membre de son clan, à l’autre bout du terrain, de quitter les gradins, parce qu’il le dérangeait. L’homme en question était son frère Marko.

Même les liens du sang ne sont pas à l’épreuve du caractère parfois bouillant et imprévisible du Djoker lorsque la victoire est en jeu. Djokovic est parvenu à remporter les deux manches suivantes 7-6 et 6-4 pour s’assurer d’un premier titre cette saison.

Malgré cet épisode, l’arrivée de Djokovic à Melbourne pour disputer les Internationaux d’Australie n’a rien à voir avec celle de l’année dernière.

À pareille date, le nonuple champion du tournoi devait rentrer à la maison, bredouille, car la Cour australienne lui avait révoqué son droit de jeu.

Petit rappel

Un rappel des faits s’impose.

En janvier 2022, il était nécessaire d’avoir une preuve de vaccination contre la COVID-19 pour entrer sur le sol australien. Or, comme Djokovic a toujours refusé l’injection des différents vaccins, les lois en vigueur l’ont rattrapé, malgré son statut.

Néanmoins, Djokovic a reçu une dérogation médicale de la part du tournoi pour pouvoir y participer sans être vacciné. Cependant, à son arrivée à l’aéroport de Melbourne, la douane a refusé de le laisser passer. Elle a même annulé son visa.

Après un isolement de courte durée, le juge Anthony Kelly a penché en faveur du Serbe. Il allait pouvoir disputer le tournoi, mais en respectant certaines conditions. Quelques jours plus tard, même s’il faisait partie du tableau principal, le ministre de l’Immigration australienne a révoqué le droit de visite et annulé le visa de Djokovic.

PHOTO LOREN ELLIOTT, ARCHIVES REUTERS

Novak Djokovic (au centre) n’a pas pu participer aux Internationaux d’Australie, l’an dernier, en raison de son statut vaccinal.

Bien entendu, cette histoire a jeté de l’ombre sur le tournoi avant même son commencement. Ce roman-savon a d’ailleurs grandement marqué le principal intéressé. « Tu ne peux pas oublier ces évènements, a-t-il indiqué à des médias européens la semaine dernière. C’est une étiquette qui va rester. Elle restera pour le reste de ma vie. »

Il a dit arriver en Australie « avec des émotions positives », même si « ce qui est arrivé il y a 12 mois n’a pas été facile à digérer, mais en même temps, il fallait aller de l’avant ».

Le meilleur joueur au monde

Le reste de sa saison 2022 a été exceptionnel, même s’il a dû s’absenter des Internationaux des États-Unis à cause de son statut vaccinal. Il a gagné les tournois de Rome, Wimbledon, Tel-Aviv, Astana et les Finales de l’ATP. Il a perdu seulement 7 de ses 49 matchs. Son ratio de victoires de 85,7 % a été le meilleur du circuit.

Officiellement, le joueur de 35 ans pointe au cinquième rang mondial.

Toutefois, n’eût été la décision de l’ATP de suspendre l’attribution des points de classement à Wimbledon en rétroaction au choix du tournoi de refuser l’accès aux joueurs russes, Djokovic serait au premier rang mondial.

Il aurait une avance de 70 points sur Carlos Alcaraz.

N’en déplaise à certains, Djokovic est encore le meilleur joueur de tennis au monde. Il est encore plus précis, plus agile, plus tenace et plus fort mentalement que jamais. Sa tenue lors des Finales de l’ATP contre l’élite de son sport l’a prouvé. Sa fiche parfaite a envoyé un message clair à ses rivaux. Tout comme son rendement de 11 victoires en 14 matchs contre des joueurs du top 10 en 2022. Les jeunes loups ont encore des croûtes à manger.

Le Serbe sera encore plus affamé, puisqu’il est à la chasse aux records masculins. Il n’est qu’à un titre du Grand Chelem de rejoindre Rafael Nadal avec 22. Il tentera aussi de devenir le premier joueur depuis Rod Laver en 1969 à réaliser le Grand Chelem, c’est-à-dire remporter les quatre tournois majeurs au cours d’une même saison. Si un joueur peut y arriver, c’est lui. Il a failli réussir en 2021, mais Daniil Medvedev l’a freiné, en route vers l’Histoire, en finale des Internationaux des États-Unis.

Cette saison, Djokovic aura l’occasion de se racheter. Se racheter sur le plan des relations publiques, car son image a été écorchée. Puis se racheter également sur le plan tennistique, car malgré son brio des derniers mois, ses triomphes ont été éclipsés par la controverse.