Il y a bête noire, et il y a bête noire. Le Canada y a cru, à cette rare victoire contre les Américaines. Mais les Rouges ont finalement dû s’avouer vaincues, encore une fois, cette fois-ci en finale de la Coupe SheBelieves. Après un match nul de 2-2, les États-Unis l’ont emporté au terme d’une séance de tirs au but haute en rebondissements à Columbus.

L’enjeu a été minime, oui : ce court tournoi amical impliquant quatre équipes sert surtout de préparation en vue des prochains Jeux olympiques. Mais il n’y a pas de match insignifiant entre ces deux grandes rivales. Rivalité outrageusement dominée par les États-Unis, d’ailleurs : les voilà avec 54 victoires en 66 rencontres depuis 1986.

« Je suis fière de mon groupe, a commenté la sélectionneuse du Canada, Bev Priestman, après la rencontre. Avec plusieurs joueuses blessées, d’autres se sont levées. C’était serré jusqu’à la toute fin. »

C’était la deuxième fois en un peu plus d’un mois que ces deux équipes se rendaient aux penaltys, la dernière fois étant la demi-finale de la Gold Cup, en mars. Il s’agit là d’un signe probant que les deux rivales entrent dans de nouvelles ères : on les sent plus près que jamais l’une de l’autre.

D’où cette bataille serrée, intense, partagée jusqu’au dernier tir. Les représentantes du Stars & Stripes ont réussi cinq de leurs sept tirs pour l’emporter, contre quatre pour le Canada.

« C’est tellement important, souligne Priestman à propos des tirs de barrage. [Cette expérience], dans un stade rempli, ne peut être simulée. »

Leon, en feu

Une première mi-temps soporifique a finalement connu ses premières étincelles vers la demi-heure de jeu. La jeune vedette américaine Jaedyn Shaw a pris un tir à bout portant dans la surface canadienne, mais elle s’est butée à une Kailen Sheridan au sommet de son art.

PHOTO GRAHAM STOKES, AGENCE FRANCE-PRESSE

Jaedyn Shaw effectue un tir qui est arrêté par la gardienne canadienne Kailen Sheridan.

Le Canada a absorbé la possession des États-Unis, tentant de les pincer en transition. Ça a porté ses fruits à la 40minute, alors qu’une gazelle du nom d’Ashley Lawrence s’est portée à l’avant avec vivacité sur l’aile droite, subissant même une dure collision avec la gardienne américaine Alyssa Naeher. Cette dernière a été du même coup complètement déportée à l’orée de sa surface. Devant un filet laissé vacant, Adriana Leon a enfilé le 1-0 sur un tir audacieux entre les jambes d’une défenseuse.

Les Américaines n’ont pas mis de temps à redresser la barque au retour des vestiaires. Dès la 50e, Sophia Smith a égalisé la marque sur un bon tir du pied gauche. Puis elle a récidivé à la 68e, au terme d’une contre-attaque létale avec Trinity Rodman.

PHOTO AARON DOSTER, USA TODAY SPORTS, FOURNIE PAR REUTERS CON

Sophia Smith (11) et Trinity Rodman (22)

On a cru que cet élan allait être suffisant pour les locales…

Mais Adriana Leon, qui connaît une très belle saison avec Aston Villa en Angleterre, n’avait pas dit son dernier mot. À la 84minute, elle s’est laissé choir dans la surface après un léger contact, allant chercher un penalty que l’on pourrait qualifier de professionnel. En confiance, l’artilleuse a marqué son deuxième du match pour ramener tout le monde à la case départ.

Elle est affamée et elle a une volonté de jouer et presser avec le ballon. C’est une marqueuse naturelle. […] Elle remplit sa mission dans les grands moments.

Bev Priestman, sélectionneuse du Canada, à propos d’Adriana Leon

Kadeisha Buchanan a bien failli donner les devants aux Canadiennes dans les derniers instants du temps régulier, mais son tir de la tête a frappé la barre transversale avec puissance sur un corner.

PHOTO JAY LAPRETE, ASSOCIATED PRESS

Kadeisha Buchanan a raté une belle chance de donner la victoire à son équipe en fin de match…

Chez les Canadiennes, Jessie Fleming, Adriana Leon, Julia Grosso et Ashley Lawrence ont réussi leur tentative de tir au but, alors que Jade Rose, Cloé Lacasse et Évelyne Viens l’ont ratée.

Rien qui n’inquiète vraiment Bev Priestman. Non, ce qui la tracasse, ce sont les choix qu’elle devra faire en vue des JO de Paris, l’été prochain. Parce que l’effectif canadien regorge de talent, et aura la lourde et prestigieuse tâche de défendre sa médaille d’or.

« Ma préoccupation principale, c’est de savoir comment je fais faire pour ramener cet effectif à 18 joueuses, admet-elle. On en a cinq qui vont revenir de blessure. Ce sera un casse-tête, même si c’est un beau problème. »

« Ça me tient réveillée la nuit, très honnêtement. »