(Los Angeles) Une jeune vedette, l’ailier Alphonso Davies, un mentor pour sélectionneur, l’Anglais John Herdman, un engouement populaire inédit : le Canada espère renouer avec le Mondial cet hiver au Qatar, 36 ans après une première incursion.

En déplacement au Costa Rica jeudi, les Canadiens, leaders des qualifications de la zone Concacaf avec 25 points, pourront valider, comme attendu, leur billet pour la Coupe du monde.

Comme attendu ? Au regard de leur parcours quasi sans faute dans cette phase, oui. Au regard de leur CV presque vierge (2 Gold Cups remportées en 1985 et 2000), pas vraiment.

Tant et si bien que peu se rappellent que les « Canucks » ont disputé le Mondial-1986 au Mexique, sinon les fans de l’équipe de France que Jean-Pierre Papin avait libérés d’une torpeur improbable, en marquant le but du 1-0 en fin de match de la phase de groupes.

Le capitaine et milieu de terrain Atiba Hutchinson est le seul à avoir connu cette époque, même s’il n’avait que trois ans et n’en conserve donc aucun souvenir.

Ce qu’il a surtout vécu, en revanche, ce sont les années de « caribou maigre » du foot canadien. Et si le joueur aux 92 capes, évoluant au Besiktas Istanbul avec l’attaquant Cyle Larin, meilleur buteur des qualifications (4 buts), voit le rêve d’une première participation au Mondial se réaliser à 39 ans, cela « s’explique en deux mots : John Herdman ».

« Plus de complexe »

Dès son arrivée à la tête de l’équipe en 2018, après avoir revitalisé la sélection féminine pendant sept ans (médaille de bronze olympique en 2012), l’Anglais a fait le pari d’une qualification pour le Mondial qatarien que peu croyaient réalisable, le Canada étant alors 94e au classement FIFA.

Quatre ans après, le pari est sur le point d’être gagné : les « Canucks » sont aujourd’hui 33e et demeurent invaincus en éliminatoires de la zone Concacaf (meilleures attaque et défense).

« John est un excellent tacticien, mais surtout, il a formé une famille avec nous. Nous nous faisons vraiment confiance mutuellement. Nous avons réalisé que nous pouvions jouer à armes égales avec les poids lourds de la Concacaf. Nous n’avons plus de complexe », résume le latéral gauche Samuel Adekugbe.

L’esprit d’équipe est le leitmotiv de Herdman. « Nous travaillons dur sur ce plan. Il ne s’agit pas simplement de jouer au foot. Je suis un intermédiaire dans ce processus, mais les gars ont assumé la responsabilité du leadership. Plus la situation est difficile, plus ils deviennent forts. »

« Une fois que la confiance est là, réciproque, l’alchimie se crée. Et les joueurs qui sont à 100 % derrière quelque chose finissent par obtenir des résultats », expose-t-il encore.

Le Canada dispose en outre d’une génération de joueurs talentueux, à l’image d’Alphonso Davies qui s’est imposé dans les rangs pourtant bien fournis du Bayern Munich, révélant son talent lors de la campagne victorieuse de Ligue des champions en 2020.

Pays-hôte en 2026

Absent depuis janvier, le joueur de 21  ans traîne encore une myocardite contractée après un épisode de COVID-19. Ce qui n’a pas pénalisé l’équipe, également portée par les attaquants Jonathan David (Lille) et Tajon Buchanan (Club Bruges) ou encore le milieu de terrain Stephen Eustaquio (FC Porto).

Une vingtaine de sélectionnés évoluent ainsi en Europe, à un plus haut niveau que la MLS, le championnat nord-américain. Surtout, une bonne dizaine sont d’origine étrangère et se sentent redevables du Canada, comme l’explique le gardien Milan Borjan, né en 1987 en ex-Yougoslavie et dont la famille a fui la guerre.

« Nous sommes un certain nombre dans le groupe à nous battre pour ce qui nous a été donné ici. On fait du mieux que l’on peut pour rendre cet amour à ce pays incroyable », dit-il.

Évoquant la victoire (2-0) contre les États-Unis en janvier, dans une liesse indescriptible à Hamilton (Ontario), Herdman confie : « c’est la première fois que j’avais l’impression de vivre dans un pays de foot. Les Canadiens, qui ont toujours dû porter un maillot italien, serbe ou grec peuvent désormais fièrement enfiler le maillot national ».

« Et les joueurs savent qu’ils auront l’occasion au Qatar de laisser une véritable trace pour les générations futures », affirme-t-il encore, avec évidemment en tête 2026 et le Mondial coorganisé par le Canada avec les États-Unis et le Mexique.