Enzo Concina est en terrain connu à Montréal. Tout en parlant à l'auteur de ces lignes après le dernier match face à l'Impact, l'entraîneur-adjoint de DC United reconnaît un journaliste qui oeuvre dans le soccer québécois depuis 30 ans. Quelques secondes plus tard, il donne une accolade à Nick De Santis, son ancien coéquipier avec la sélection nationale canadienne et lors de la victorieuse saison de l'Impact, en 1994.

À l'époque, le stade Saputo n'était évidemment pas d'actualité tandis que le premier match de la MLS n'avait pas encore été disputé. Et pour sa deuxième saison dans l'American Professional Soccer League (APSL), l'Impact ne faisait pas partie du petit groupe des favoris. Mais après un changement d'entraîneur et une saison écourtée conclue avec 12 victoires, l'Impact s'est hissé en séries avant de défaire les Foxes du Colorado en finale.

Dans l'esprit de Concina, un défenseur central qui a passé la majeure partie de sa carrière en Italie, les souvenirs de 1994 se bousculent: le rapide départ d'Eddie Firmani au profit de Valerio Gazzola, la Coupe du monde aux États-Unis, les nombreux voyages et, finalement, le titre à la surprise générale. Au-delà des trophées, il y a également des amitiés qui ne se sont pas éteintes depuis.

«Je suis encore en contact avec Mauro Biello ou Nick puisque nous évoluons toujours dans le même milieu, explique l'Italien d'origine qui est arrivé à Toronto à l'âge de 4 ans. Quand le club, avant ou après son entrée dans la MLS, avait besoin d'une évaluation ou de suggestion sur un joueur italien, je donnais mon avis. Nous avons toujours gardé un lien même si, en étant aujourd'hui avec DC United, tout a changé. Nous sommes maintenant en compétition, mais le respect et l'amitié sont encore présents.»

Si l'Impact et DC United se sont quittés sur un match nul de 1 à 1, le 25 octobre, les deux équipes ont connu des saisons aux antipodes. Après un titre lors de sa parenthèse montréalaise, en 1994, Concina revivra-t-il un tel dénouement quelques mois après son arrivée dans la capitale américaine? Le parallèle entre les deux situations le fait sourire, mais il est loin d'être farfelu. Celui dont le contrat de dépisteur avec l'Inter Milan a expiré, au mois de juin, a participé au retournement de situation le plus prononcé de l'histoire de la MLS.

En 2013, DC United a établi des records de médiocrité avec une attaque anémique, une défense poreuse et un total de 3 victoires en 34 matchs. Douze mois plus tard et après d'importants changements offensifs et défensifs (Bobby Boswell, Sean Franklin, Fabian Espindola, Eddie Johnson...), l'équipe de Ben Olsen a tout simplement terminé en tête de l'Association de l'Est. Elle a fait un bond de 43 points au classement, marqué 30 buts de plus et encaissé 22 buts en moins.

Si Concina n'a pas vécu la saison cauchemardesque de 2013, il a rapidement compris qu'il allait côtoyer un groupe «de caractère». «Les joueurs étaient embarrassés par leur dernière saison, mais ils étaient aussi en colère, précise-t-il. On pouvait sentir dans leur comportement qu'ils voulaient prendre une certaine revanche. Ils avaient envie de commencer la saison le plus rapidement possible afin de montrer aux gens que 2013 n'était qu'une mauvaise saison et qu'eux n'étaient pas des mauvais joueurs. (...) C'est une équipe composée d'hommes qui savent se battre, mais ce sont aussi de bons joueurs de soccer.»

Quand il s'agit de se battre, Davy Arnaud, qui a participé à 31 matchs cette année, a montré la voie et donné de la voix dans le vestiaire américain. «Il a été tellement important pour nous, confirme Concina. Nous l'avons d'abord positionné sur un flanc, mais nous avons réalisé que ce n'était pas sa place. Ensuite, après avoir quelques acquisitions, nous avons pu le faire glisser dans l'axe. Il n'est plus un jeune premier et il sait qu'il a perdu un peu de vitesse par rapport à ses débuts. Mais il compense par son intelligence et son expérience. Puis, c'est un battant, hein? Il n'abandonne jamais et c'est quelqu'un qui va toujours te donner 90 minutes, pas 70.»

DC United affrontera les Red Bulls de New York, dimanche, dans le cadre du match aller de la demi-finale de l'Est.

De grands moments à Naples

Avant d'aboutir à DC United, Concina a vécu ses plus grands moments avec le S.S.C. Naples, déjà dans un rôle d'adjoint. Aux côtés de l'un de ses anciens coéquipiers, Walter Mazzarri, il a été aux premières loges du retour en grâce du mythique club napolitain entre 2010 et 2013. Sa mission incluait notamment le dépistage des équipes adverses. Quand le bouillant Mazzarri a été suspendu en Ligue des champions, lui et un autre assistant, Nicolo Frustalupi, assurait également l'interim.

«À Naples, j'ai constaté que le sentiment d'appartenance des partisans était incroyable. C'est tellement important pour eux, lance Concina. C'est triste, en un sens, parce que cela leur permet de s'extirper des difficultés de la vie, avec le chômage, la récession et tout le reste. Il y a tellement de problèmes dans le sud de l'Italie que le soccer est un moyen d'exister. Les gens sont fiers quand le club se rend aux quatre coins de l'Europe pour affronter aux grandes puissances et leur tenir tête. Quand ils sont derrière toi lors des matchs, c'est comme si on avait un joueur supplémentaire sur le terrain.»

Son passage à Naples a duré trois saisons avant qu'il ne rejoigne l'Inter Milan toujours entraîné par Mazzarri. Et lorsque Erick Thohir, propriétaire de DC United a fait l'acquisition de 70% du club milanais à l'automne 2013, Concina a traversé l'Atlantique afin de devenir l'adjoint d'Olsen.

Il reste à voir si ce retour nord-américain sera gagnant.