(Montréal) La deuxième période du match entre l’équipe de Montréal et l’équipe de Boston était vieillie de quatre minutes et 47 secondes lorsque Marie-Philip Poulin s’est présentée au cercle des mises au jeu à la droite de Aerin Frankel. Trois secondes plus tard, Mélodie Daoust marquait son premier but de la saison.

« On l’avait prévu, a expliqué Daoust après la victoire de 3-1 de son équipe. C’était bien chorégraphié par Pou. Lorsqu’elle prend une mise au jeu, elle peut être très dangereuse, donc ça a bien tombé qu’elle exécute le plan à merveille. »

Poulin a passé la rondelle entre les patins de sa rivale avant de remettre sans tarder à Daoust, bien positionnée à proximité de la gardienne, qui a poussé le disque du revers dans le filet.

Il n’y a rien de franchement exceptionnel dans l’action de marquer pour Daoust, car elle l’a fait des tonnes de fois, dans des contextes souvent bien plus importants. Le fait est que cette réussite, qui s’est avérée être le but gagnant du match de samedi, n’avait rien de banal.

Plus tôt dans la journée, l’athlète de 32 ans avait paraphé une entente de 10 jours avec l’équipe montréalaise de la Ligue professionnelle hockey féminin (LPHF).

Elle a admis en conférence de presse ne même pas se rappeler quand avait eu lieu son dernier match dans un cadre compétitif. Vérification faite, c’était il y a plus d’un an.

La double médaillée d’or olympique a été chaudement accueillie par les partisans du Centre de performance 21,02 de Verdun. « C’était vraiment incroyable de voir l’atmosphère en entrant sur la patinoire. J’ai eu des frissons après mon premier but quand les fans ont commencé à applaudir. Ça fait chaud au cœur. »

Un impact immédiat

Le plus impressionnant a été de constater à quel point Daoust n’accusait aucun retard sur ses coéquipières. Même si elle n’avait disputé aucun des 13 premiers matchs de la saison, jamais elle n’a été à la remorque de Poulin et Laura Stacey sur le premier trio de l’équipe.

Son apport a été considérable et même nécessaire à Montréal pour arracher sa neuvième victoire de la saison. Daoust a été de tous les combats. C’est elle qui a pris le tir de l’enclave ayant permis à Poulin d’inscrire le premier but de la rencontre sur le retour. C’est elle qui a servi d’écran pour permettre au tir de la défenseure Erin Ambrose de se frayer un chemin jusque dans le fond du filet en début de troisième période. Daoust a terminé le match avec une fiche de +3 et un temps d’utilisation de 17 : 48.

« Si tu joues sur le trio de Marie-Philip, tu t’attends à avoir beaucoup de temps de jeu », a-t-elle blagué.

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Marie-Philip Poulin

Reste que la chimie entre les deux vétéranes était d’une qualité identique à celle de leurs années de gloire sur l’équipe nationale. C’était presque poétique. « On a souvent joué ensemble dans le passé avec Équipe Canada. On a une bonne chimie sur la glace, il ne faut pas oublier Laura aussi, qui effectue le travail en échec avant comme ça ne se peut pas. On ne lui donne pas assez de crédit. C’est elle qui nous donne les rondelles pour qu’on fasse des jeux. C’était le fun de se retrouver sur le premier trio. »

Même si elle a été blanchie de la feuille de pointage, Stacey a été l’attaquante la plus utilisée du match.

Daoust a refusé de se prononcer sur son avenir avec l’équipe. Néanmoins, ce qu’elle a réalisé samedi soir est digne de la joueuse qui a courageusement réussi une feinte à une main à la Peter Forsberg en tirs de barrage en pleine finale olympique à PyeongChang. La femme des grands moments s’était tenue à l’écart, mais elle n’était vraisemblablement jamais partie pour de bon.

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Laura Stacey (7)

« Quand je suis heureuse, que j’ai mon gars autour de moi, j’ai mes coéquipières, je ne pense pas beaucoup à autre chose. Ma préparation est très très simple. Je sais que j’ai mes meilleures performances quand j’ai du plaisir et aujourd’hui c’était facile d’avoir du fun sur la glace. »

Daoust a évidemment hérité de la première étoile du match.

Chuli toujours parfaite

Qui aurait cru que la meilleure gardienne au monde, Ann-Renée Desbiens, aurait de la compétition devant le filet de l’équipe montréalaise ?

Elaine Chuli a décidé que ce serait le cas. La gardienne de 29 ans s’est dressée devant l’attaque bostonienne en repoussant 30 des 31 tirs dirigés vers elle. Seule Hilary Knight a été capable de la déjouer sur une montée à deux contre un en fin de deuxième période.

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Elaine Chuli fait l’arrêt devant Taylor Girard (17)

Dans la salle de conférence de presse, Chuli ne semblait pas particulièrement euphorique de cette autre victoire. Pourtant, c’était sa cinquième en autant de départs cette saison.

« Je me sens bien. Je veux juste aider l’équipe à gagner. Je sens qu’on s’améliore et que nous allons dans la bonne direction », a-t-elle lancé.

Or, si ses propos ont été assez génériques, son rendement est loin de l’être. Une fiche parfaite, une moyenne de buts alloués de 1,19 et un taux d’efficacité de ,962.

Elle a confirmé apprendre seulement une journée à l’avance qui d’entre elle ou Desbiens allait obtenir le départ d’un match. Une méthode qui lui fait plutôt bien, visiblement. « C’est différent de ce que j’ai connu par le passé », a-t-elle avoué.

Pour l’instant, Desbiens et elle s’entendent toujours comme larrons en foire. Ce genre de rivalité ou de compétition à l’interne pourrait causer quelques frictions dans d’autres contextes, mais la situation dans le camp montréalais est perçue davantage comme une arme que comme une distraction.

« Ce n’est pas un enjeu, c’est juste merveilleux. On est en première position, nous jouons bien toutes les deux, ça fait juste de nous un duo plus dangereux. »

Et visiblement, la recette fonctionne. Car dans tous les cas, Montréal gagne.