Miguël Tourigny voulait progresser, prendre de la maturité et apprendre à jouer avec des professionnels plus rapidement. Pour toutes ces raisons, il a décidé en octobre d’aller jouer en Slovaquie plutôt que de disputer une ultime saison chez les juniors. Huit mois plus tard, il juge que ses objectifs sont atteints.

Tourigny se prépare pour son entraînement au Complexe Bell de Brossard quand il répond à l’appel de La Presse, jeudi dernier. Après avoir profité de vacances et travaillé à la ferme familiale au cours des dernières semaines, il a commencé mardi dernier à s’entraîner dans les installations du Canadien.

« C’est vraiment le fun, s’exclame-t-il au bout du fil. Ici, le complexe est génial. Le gym est super beau. Le bain chaud, le bain glacé, ces petites choses-là que le monde n’a pas en s’entraînant à la maison, j’ai la chance de les avoir. Je suis super content ! »

La décision de Tourigny d’aller jouer en Slovaquie en a surpris quelques-uns, en début de saison, considérant qu’il était admissible à une cinquième et dernière saison dans la Ligue de hockey junior majeur du Québec (LHJMQ).

Le défenseur, lui, y songeait déjà depuis un bon moment. Quand il a été retranché du camp d’entraînement du Rocket de Laval, en octobre, il a discuté avec son agent, mais la conversation n’a pas été bien longue ; le lendemain, il signait son contrat avec le Dukla Trenčín. Et deux jours plus tard, il s’envolait pour la Slovaquie.

Advenant un retour dans la LHJMQ, Tourigny aurait évolué avec le Titan d’Acadie-Bathurst, auquel il a été échangé en décembre 2021. Avant de partir en Slovaquie, le jeune homme a parlé avec l’entraîneur de la formation du Nouveau-Brunswick, qui lui a fait part de la possibilité de l’échanger dans une ville où il aurait une chance de remporter le trophée Gilles-Courteau. Mais Tourigny avait pris sa décision.

J’ai dit : moi, je veux vraiment m’améliorer à long terme. C’est sûr que ç’aurait été bon de retourner junior à court terme, mais de m’habituer tout de suite à jouer avec des hommes, ça va m’aider beaucoup plus.

Miguël Tourigny

Quant à l’organisation du Canadien, elle partageait sa mentalité, affirme-t-il.

« Ils me l’ont dit que le junior ne serait pas efficace pour moi et que ça ne me rendrait pas un meilleur joueur en y retournant. Ils m’ont dit que d’aller jouer en Europe serait la meilleure décision. »

Pas de remords

En Slovaquie, Tourigny a vécu toutes sortes de premières : première fois en appartement, première fois en Europe, première fois chez les professionnels.

« Au début, ç’a quand même été un choc, admet-il. […] Les gars m’ont beaucoup aidé à m’acclimater à la vie là-bas. »

Côté hockey, le jeune homme a rapidement expliqué à ses entraîneurs ce sur quoi il espérait travailler pendant la saison.

Le monde me reproche souvent mon côté défensif. Là-bas, je l’ai amélioré. Je n’ai pas perdu ma touche offensive, ça, c’est sûr, mais je suis meilleur pour décider quand y aller ou pas. À la fin de la saison, je trouvais que ma game avait vraiment pris une coche de plus.

Miguël Tourigny

Tourigny a amassé 5 buts et 19 mentions d’aide en 39 matchs, une récolte qui fait foi de son côté offensif toujours bien présent. À savoir s’il a pris de la maturité comme il le souhaitait, le défenseur n’hésite pas.

« Extrêmement, répond-il. Quand t’es junior, tu joues beaucoup. Tu ne peux pas vraiment t’entraîner. Là-bas, tu joues deux fois par semaine, donc tu as plus d’entraînements. Au début, il a fallu que je m’adapte à ça aussi. »

PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE

Le défenseur Miguël Tourigny au camp de développement du Canadien, en juillet 2022

« J’avais encore la mentalité du junior, mais les coachs m’ont dit : ‟Si tu veux aller plus haut, il faudra que tu t’entraînes plus, que tu fasses plein de petits sacrifices.” À la longue, j’ai ajouté ça à ma vie de tous les jours. Maintenant, je fais juste continuer sur cette lancée et ça va super bien. »

Un contrat et un gros été

À son retour au Québec, en avril, Tourigny a signé son premier contrat d’un an à un volet avec le Rocket de Laval. Une belle surprise pour celui qui s’« attendait zéro à signer tout de suite ».

« Au début, je pensais que j’allais arriver au camp d’entraînement encore et qu’ils allaient m’évaluer là-bas. Quand je suis revenu et que j’ai reçu l’appel, j’ai dit : ‟Ben là, OK, merci !” »

Le Victoriavillois est bien au fait que l’organisation du Canadien est nantie en jeunes défenseurs talentueux. Il refuse néanmoins de se mettre de la pression pour la suite. La première étape consiste à faire sa place chez le Rocket la saison prochaine.

J’ai vraiment confiance en moi. Je vais juste faire mes affaires et il arrivera ce qui arrivera. C’est sûr que je ne vais pas me faire marcher sur les pieds, je vais vouloir prendre ma place.

Miguël Tourigny

Avant toute chose, il doit connaître un bon été d’entraînement. De son propre aveu, le fait de côtoyer Kaiden Guhle, David Savard, Nick Suzuki et Jake Allen, entre autres, à l’entraînement pendant l’été, l’aidera « encore plus » à s’acclimater au niveau professionnel.

Et puis, si tout se passe bien, qui sait, ces joueurs seront peut-être ses coéquipiers prochainement.

« Si, éventuellement, je resigne avec le Canadien, je vais déjà avoir une base d’amitié un peu », dit-il dans ce qu’on devine être un sourire au bout du fil.

Tourigny au carré

PHOTO OLIVIER CROTEAU, ARCHIVES LE NOUVELLISTE

Jordan Tourigny

Un autre Tourigny devrait bientôt être repêché dans la Ligue nationale : Jordan, le frère trois ans plus jeune de Miguël, apparaît au 123e rang sur la dernière liste des meilleurs patineurs nord-américains de la centrale de recrutement de la LNH. Miguël, qui ne raterait le repêchage à Nashville pour rien au monde, a regardé chaque match de son frangin cette saison. « On se parlait chaque jour, donc j’essayais de l’aider beaucoup sur sa game », laisse-t-il savoir. Les deux frères, tous deux des défenseurs, se sont affrontés dans la LHJMQ ; peut-être se retrouveront-ils cette fois-ci au sein de la même organisation. « L’équipe qui va le repêcher va avoir une belle surprise. […] D’être repêché à la même place, ce serait super le fun. Mais rendu là, je ne lui souhaite que le bonheur, peu importe où il va. »

Katherine Harvey-Pinard, La Presse