(Nashville) La stabilité peut très certainement être une vertu. Mais elle peut également devenir un boulet. Les Predators de Nashville, lentement mais sûrement, s’approchent de cette deuxième définition.

Un peu plus du tiers des équipes du circuit comptent encore, au sein de leur formation, leurs trois meilleurs marqueurs de la saison 2018-2019. La liste est prestigieuse. On y retrouve les trois derniers gagnants de la Coupe Stanley. Une équipe a atteint la finale et trois autres, les demi-finales. La recette fonctionne, on ne se presse pas pour la changer.

Il y a aussi, dans ce groupe, les Predators. Ces derniers, à la fin des années 2010, sont passés d’un club dominant à un club abonné au milieu du peloton.

Au cours des deux dernières saisons, ça s’est soldé par une entrée serrée en séries éliminatoires. Or, cette fois, la recette semble avoir cessé de fonctionner. Les Predz sont à six points d’une place en séries, avec devant eux l’Avalanche du Colorado et les Blues de St. Louis à dépasser.

Même si on n’a pas encore atteint la mi-parcours, il est difficile de s’imaginer que les représentants de la ville du country remonteront la pente.

« On gagne en confiance », a néanmoins souligné le défenseur Jérémy Lauzon, lundi, après l’entraînement de son équipe. Cette confiance, justement, a été érodée par un début de saison pitoyable de sept défaites en dix matchs. Et plus encore par une série de six revers en décembre.

Il a fallu une victoire acquise en prolongation contre les Oilers d’Edmonton pour « enlever de la pression sur les épaules de tout le monde », a raconté Alexandre Carrier. Mais le mal était fait.

À plat en attaque

Cette vilaine posture dans laquelle se retrouvent les Predators est d’autant plus surprenante qu’ils comptent sur une formation largement semblable à celle de l’an dernier – probablement supérieure, en fait, vu les ajouts de Nino Niederreiter en attaque et de Ryan McDonagh en défense.

Les problèmes offensifs, toutefois, sont nombreux. Le manque de finition est criant. Les chances de marquer sont là, mais pas les buts. Et ce, en dépit de la présence de joueurs offensifs de renom comme Filip Forsberg et Matt Duchene, qui sont entourés de patineurs de qualité en Niederreiter, Mikael Granlund et Ryan Johansen, entre autres. Derrière eux, nombreuses sont les valeurs sûres : Roman Josi, Mattias Ekholm, McDonagh, Carrier, Dante Fabbro…

Pourtant, toutes situations confondues, les Predators ne marquent que 2,63 buts par match, au 29rang de la LNH. Une production égale à celle du Canadien de Montréal, franchise en pleine reconstruction.

« Je pense simplement que ça cliquait un peu moins au début de la saison, a analysé Jérémy Lauzon. Récemment, on a commencé à créer un peu plus d’attaque. La LNH est la ligue la plus difficile du monde. Même si tu connais du succès pendant une saison, ça ne veut pas dire que tu vas en connaître la suivante. Là, ça commence à cliquer. Il faut continuer dans cette voie. »

PHOTO JULIA NIKHINSON, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Le défenseur des Predators de Nashville Jérémy Lauzon

Duchene, lui, a plutôt dirigé la conversation vers l’avantage numérique – 16,8 %, l’un des pires rendements du circuit.

« C’était un moteur pour nous l’an dernier, mais nous n’avons pas été bons de la saison à ce chapitre, a-t-il rapporté. On doit absolument continuer à améliorer ça. Même si on ne marque pas de but, il faut être menaçants. Ça aidera notre jeu à cinq contre cinq. »

Là aussi, ça ressemble drôlement à un refrain entendu chez le Canadien. Et non, ce n’est pas un compliment.

À plat en défense

Il n’y a pas qu’offensivement que ça ne tourne pas rond.

Au premier coup d’œil, la défense des Predators a bonne mine. Il y a, à Nashville, une longue tradition d’excellence à cette position. La brigade, sur papier, est encore impressionnante.

Or, quand on s’y attarde de plus près, ce n’est pas reluisant. Les 3,03 buts accordés par match, tout près de la médiane de la ligue, sont un indice qu’on ne flirte pas avec l’élite. À cinq contre cinq, on accorde beaucoup de chances de marquer de qualité.

Si la situation n’est pas pire encore, c’est surtout grâce à Juuse Saros. Les sites de statistiques avancées calculent qu’il a déjà « sauvé » 13 buts cette saison. Avec une attaque qui se cherche, accorder ces 13 buts aurait été suffisant pour convertir beaucoup de victoires en défaites.

« On est chanceux d’avoir de bons gardiens qui font de bons arrêts quand on en a besoin », a reconnu Carrier.

Au sujet de la performance défensive de sa troupe, lui aussi parle de confiance. « Tout le monde va faire des erreurs sur la glace ; il faut voir comment y répondre, dit-il. On essaie de faire plus de jeux pour créer de l’attaque, mais parfois, ça va créer des revirements. Il faut continuer de créer des chances au bon moment. »

Réaliste, Duchene constate qu’« à un certain point, il faudra en gagner quatre ou cinq de suite » pour rêver aux séries. Échouer à cette tâche serait une bien mauvaise nouvelle pour cette équipe dont les principales vedettes en attaque et en défense sont toutes trentenaires – à l’exception de Forsberg – et sont toutes sous contrat pour encore deux autres saisons au moins à fort prix.

Alexandre Carrier assure que le groupe « adore jouer ensemble » et que « tout le monde s’apprécie dans le vestiaire ». C’est une sacrée chance. Car cette formation est, en quelque sorte, condamnée à vivre et mourir avec le noyau en place.

Si son étoile devait avoir pâli pour de bon, ce sera pas mal moins festif sur Broadway au cours des prochaines années.