(Chicago) Börje Salming avait accroché ses patins depuis déjà six ans quand Arvid Soderblom est né. Mais de même que les jeunes Québécois savaient très bien qui était Guy Lafleur à sa mort, les jeunes Suédois, comme Soderblom, sont bien au fait de l’œuvre de Salming.

« C’était l’idole de mon père. Je suis jeune à ce point ! Tout le monde en Suède le connaît, même ceux qui ne jouent pas au hockey », nous a confié Soderblom, gardien de 23 ans des Blackhawks, après l’entraînement de jeudi.

La mort de Salming a été annoncée jeudi midi, justement pendant l’entraînement. Ni Soderblom ni Patrick Kane n’étaient au courant au moment où on leur en a parlé. « L’hommage qu’ils lui ont fait à Toronto était vraiment émouvant », a noté Kane, sous le choc de voir Salming disparaître seulement deux semaines après qu’il eut fait ses adieux émouvants aux amateurs de hockey réunis au ScotiaBank Arena.

« C’est probablement le plus grand joueur suédois de l’histoire, ou du moins un des meilleurs. Il était un des premiers à venir ici, malgré le style de jeu très robuste. Il a facilité la vie des Suédois qui l’ont suivi. C’est une icône », a poursuivi Soderblom.

Hommage bien senti

Luke Richardson, lui, rencontrait les médias quelques minutes plus tard. Dans l’intervalle, l’entraîneur-chef des Blackhawks avait été mis au fait de la mort de son ancien coéquipier. En 1987, un Richardson de 18 ans débarquait chez les Maple Leafs, pour évoluer au sein de la même brigade défensive que Salming, déjà un monument à 36 ans.

« C’était mon idole de jeunesse et j’ai eu la chance de jouer avec lui. Il m’a aidé pas seulement sur la patinoire en me donnant des conseils au banc, mais aussi dans la vie. Il traitait tout le monde très bien. Son surnom était le King et ce n’est pas seulement parce qu’il était excellent sur la glace », a témoigné Richardson.

Pour comprendre les barrières auxquelles a fait face Salming, il faut revenir dans la LNH des années 1970 et 1980. Salming est arrivé à Toronto en 1973 ; il était seulement le sixième joueur né en Suède à poser le pied dans la LNH.

« Le hockey était dur à cette époque, a rappelé Richardson. Imaginez comment ils étaient durs avec ce jeune, qui devait combattre le préjugé selon lequel les Suédois étaient mous. »

  • Darryl Sittler, Börje Salming et Mats Sundin

    PHOTO FRANK GUNN, LA PRESSE CANADIENNE

    Darryl Sittler, Börje Salming et Mats Sundin

  • William Nylander fait l’accolade à son compatriote.

    PHOTO CHRISTOPHER KATSAROV, LA PRESSE CANADIENNE

    William Nylander fait l’accolade à son compatriote.

  • La soirée du 12 novembre a été fort émouvante pour Salming et ses proches.

    PHOTO CHRISTOPHER KATSAROV, LA PRESSE CANADIENNE

    La soirée du 12 novembre a été fort émouvante pour Salming et ses proches.

  • Börje Salming et Mats Sundin

    PHOTO FRANK GUNN, LA PRESSE CANADIENNE

    Börje Salming et Mats Sundin

  • Entouré des membres de sa famille, Börje Salming a procédé à la mise en jeu protocolaire.

    PHOTO JOHN E. SOKOLOWSKI, USA TODAY SPORTS

    Entouré des membres de sa famille, Börje Salming a procédé à la mise en jeu protocolaire.

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Richardson n’exagère pas quand il parle des durs. La division Norris, qui regroupait alors les Leafs, les Black Hawks, les Red Wings, les North Stars et les Blues, était surnommée la division Chuck Norris, parce que les conflits s’y réglaient davantage par les poings que par les mots. Bob Probert, Dave Manson, Basil McRae, Joey Kocur, Shane Churla… Huit fois par année, Salming devait les affronter.

« Et il était le défenseur le plus robuste de la division, assure Richardson. Je savais qu’il était un excellent patineur. Mais il était tellement dur, tellement fort. C’était un des premiers à plonger pour bloquer des tirs, il jouait toujours blessé. Il devait avoir 36 ou 37 ans et c’était une inspiration de voir que le joueur le plus vieux était le plus en forme. Moi, il m’a inspiré à toujours me tenir en bonne forme, pour jouer le plus longtemps possible.

PHOTO JEAN GOUPIL, ARCHIVES LA PRESSE

Börje Salming, le 21 novembre 1976

« Et c’était lui qui absorbait les colères de l’entraîneur pour les plus jeunes. On avait un coach grognon et Börje essayait de protéger les jeunes. C’était un vrai meneur sur la glace comme à l’extérieur. »

Maladie foudroyante

Malgré ce climat, Salming est devenu le premier joueur formé en Europe à atteindre la marque des 1000 matchs dans la LNH. Premier de son continent, aussi, à faire son entrée au Temple de la renommée, en 1996.

PHOTO ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Börje Salming

Il a passé 16 saisons avec les Leafs, avant de terminer sa carrière dans la LNH à Detroit. Salming a amassé 787 points, le 19e total chez les défenseurs dans l’histoire du circuit.

C’est en août que Salming a annoncé qu’on lui avait diagnostiqué une sclérose latérale amyotrophique, également connue sous le nom de SLA ou maladie de Lou Gehrig.

« Je ne sais pas comment se dérouleront les prochains jours, mais je comprends qu’il y aura des défis plus grands que tous ceux que j’ai affrontés, a déclaré Salming à l’époque. Je sais aussi qu’il n’existe pas de remède, mais que de nombreux essais sont en cours et qu’il y aura un remède un jour. »

Un hommage touchant lui a été rendu il y a deux semaines lors d’une cérémonie d’avant-match en l’honneur des personnes intronisées au Temple de la renommée cette année. L’ancien défenseur était entouré de deux autres icônes de la franchise, Sittler et Sundin.

Les joues baignées de larmes, Sittler a levé le bras de Salming pour qu’il salue la foule.

Le lendemain, Salming a fait une dernière apparition avant un match des Leafs contre les Canucks au Scotiabank Arena. Entouré de sa famille, il a été ovationné alors qu’une vidéo de ses exploits était diffusée. Salming a serré la main de tous les membres des Leafs en quittant lentement la glace.

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Darryl Sittler, Börje Salming et Mats Sundin

« C’est un bel honneur que le Temple lui a fait, mais c’était triste de voir à quelle vitesse cette maladie l’a frappé », regrette Richardson.

Avec La Presse Canadienne