Quelques heures avant le match, un journaliste a fait remarquer à Martin St-Louis que les deux clubs qui allaient s’affronter en soirée déjouaient les prédictions.

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Le Canadien, plutôt que de balayer la cave du classement, est sorti de la première quinzaine de la campagne avec l’espoir de se garder près d’une place en séries éliminatoires. Les Devils du New Jersey, eux, sont passés de « l’équipe sur la voie du succès » à l’un des clubs les plus dominants de la LNH.

À compter de la deuxième période, mardi soir, on a bien compris que les comparaisons s’arrêteraient là. Les Devils ont largement dominé les locaux et quitté Montréal forts d’une victoire de 5-1.

Après une première période âprement disputée, que Jake Allen a qualifiée de « divertissante », les Devils ont pris les choses en main. D’une part en imposant un tempo que le Tricolore, à commencer par ses défenseurs, n’a pas pu suivre. Et d’autre part en profitant des largesses d’un adversaire qui vendait les revirements au prix du gros.

L’entraîneur-chef du Canadien a concédé que la joute avait été « difficile pour les défenseurs ». « Pour toute l’équipe », en fait.

St-Louis et Allen ont estimé que le CH avait subi son plus important « test » jusqu’ici cette saison. « Je ne dirais pas qu’on a échoué, mais on n’a pas eu une note assez haute pour gagner le match », a joliment résumé le pilote.

Il y a une leçon dans tout, il y en a une dans ce match-là, c’est sûr. On va la trouver.

Martin St-Louis

On retiendra de ce duel que les locaux n’ont pas été à la hauteur, mais peut-être encore davantage que les Devils leur ont été supérieurs. Allen, encore : « Ils ont toute une équipe. »

En fait, à un moment où on réinvente chaque jour la manière de parler de reconstruction, les New-Jersiais (oui, oui) ressemblent drôlement à l’équipe que le Canadien aspire à devenir.

Les Diables, comme le CH, misent en attaque sur un noyau très jeune, mais le leur est bien plus expérimenté. Leurs trois plus jeunes attaquants, Dawson Mercer, Jack Hughes et Nico Hischier, ont respectivement 21, 21 et 23 ans. Ils totalisent pourtant 592 matchs dans la LNH, en dépit du fait que les deux derniers ont raté beaucoup d’action en raison de blessures.

À Montréal, les trois cadets s’appellent Juraj Slavkosvky (18 ans), Cole Caufield et Kirby Dach (21 ans chacun). Expérience totale : 269 matchs. Même en additionnant les 224 joutes de Suzuki, on arrive à 493. On est loin du compte.

Dans le vestiaire des visiteurs, Hischier a d’ailleurs explicitement mentionné « plusieurs gars qui sont ici depuis quelques années ». Ce n’est pas anecdotique. Et mardi soir, ça paraissait.

« Ne pas toutes les gagner »

En défense, peu de comparaisons tiennent la route. En Dougie Hamilton, les Devils possèdent un quart-arrière qui flirte avec l’élite du circuit. Le CH n’a pas de quart-arrière tout court. L’arrivée de John Marino a complètement changé la dynamique de l’escouade et apporté de l’équilibre sur les trois duos. Jonas Siegenthaler, Ryan Graves et Damon Severson ont tous atteint la deuxième moitié de la vingtaine. Ça aussi, ça paraît.

Dans le camp montréalais, ç’a en effet été « difficile ». David Savard a probablement disputé son pire match de la saison. Kaiden Guhle a aussi peiné. La paire composée de Joel Edmundson et d’Arber Xhekaj n’a pas touché au disque de la soirée. Xhekaj, au fait, a écopé de sa 10pénalité mineure de la campagne, tout près d’un sommet peu enviable dans la LNH.

« Tu ne vas pas toutes les gagner, a rappelé Edmundson après la rencontre. Dans chaque victoire ou défaite, il faut apprendre quelque chose de différent. Demain est un nouveau jour. On doit aller de l’avant. »

De sages paroles, qu’il faudra garder en tête au cours des prochaines rencontres. Car si les points forts du Canadien sont ressortis pendant la récente série de trois victoires, ses lacunes pourraient peser lourd dans une hypothétique série de défaites.

Le flanc droit de la défense, par exemple, aurait cruellement besoin de renfort. Il sera intéressant de voir, au retour en santé de Mike Matheson au cours des prochaines semaines, si on mutera un vétéran gaucher pour aider le pauvre Savard.

Le quatrième trio, aussi, se retrouvera tôt ou tard sous la loupe. Avec 15 attaquants pour 12 postes, la direction du club s’est enorgueillie de sa « profondeur » à cette position. Or, à forces égales, l’unité pilotée par Jake Evans ne produit rien de rien. Elle a même coûté un but, mardi.

Les Devils « jouent de manière très similaire à ce qu’on essaie de faire », a encore dit Martin St-Louis. Avec une vitesse qui coupe les ailes de l’adversaire, une attaque diversifiée et une contre-attaque dévastatrice.

Or, comme le plein air, encore faut-il savoir comment le faire. Les Devils n’ont peut-être pas encore le statut d’aspirants à la Coupe Stanley, mais ils sont certainement plus avancés que le CH dans leur démarche et lui ont donné une sacrée classe de maître.

Ce n’est pas la seule leçon à tirer de cette rencontre. Mais c’en est une bonne.

En hausse

PHOTO ERIC BOLTE, USA TODAY SPORTS

Evgenii Dadonov (63)

Evgenii Dadonov

Enfin un but – même un point –, à son 12match de la saison. Voilà quelques rencontres qu’il le méritait.

En baisse

Cole Caufield

On aurait eu l’embarras du choix, mais les revirements de Caufield en troisième période ont fait très mal paraître l’ailier, aussi tranquille offensivement que ses partenaires de trio dans cette rencontre.

Le chiffre du match

1

Dans un bel effort collectif, tous les joueurs des Devils ont obtenu au moins un tir au but, à l’exception d’un : le joueur de centre Michael McLeod.

Dans le détail

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Jonathan Drouin

Une autre tuile sur la tête de Drouin

Jonathan Drouin a raté le match de mardi pour cause de blessure, et ce ne sera finalement pas de courte durée. Après le match, le Tricolore a en effet annoncé que Drouin allait rater de quatre à six semaines. Selon l’équipe, il se serait blessé lors du match du 5 novembre contre Vegas. Le Québécois n’avait toutefois manqué aucune présence au cours de ce match, si on se fie au registre de ses présences, et c’est même en troisième période qu’il avait été le plus occupé. Il avait aussi participé aux trois matchs suivants du CH, avant de sauter son tour mardi. Le numéro 27 connaissait un début de saison difficile : aucun but et quatre passes en 12 matchs. L’an passé, Drouin avait raté 48 matchs, et il en manquera donc encore un nombre appréciable cette saison. Il sera intéressant de voir si le CH rappellera un attaquant, parce qu’avec Joel Armia également sur la touche, il ne reste plus que le minimum de 12 attaquants en santé. On ignore toujours si Armia pourra accompagner l’équipe à Columbus pour le match de jeudi.

Forcer des revirements

Tout baigne au New Jersey et c’est pourquoi les Devils ont signé leur 10e gain de suite, infligeant au passage au Tricolore sa pire défaite de la saison. À la base des succès des Devils : une propension à provoquer des revirements. Officiellement, les Diables ont tout juste gagné la bataille des revirements (21 pour le CH, 18 pour les Devils), mais cette statistique est peut-être la moins fiable de toutes celles compilées par la LNH. Trois de leurs buts ont été le résultat direct de rondelles perdues par le CH, résultat de la pression constante exercée sur le porteur de la rondelle, selon Lindy Ruff. « Même sur le but refusé, on avait deux joueurs sur le porteur de la rondelle. On s’est fait prendre quelques fois, mais on a pu revenir. Sur le deuxième but de Hughes, c’était un bon échec avant, on était au-dessus eux. Ils ont été les premiers à toucher la rondelle, mais on a fini par la récupérer. »

L’éclosion est bien réelle

PHOTO ERIC BOLTE, USA TODAY SPORTS

Jack Hughes (86) et Vitek Vanecek (41)

La dernière saison avait toutes les allures de grande éclosion pour Jack Hughes, mais l’échantillon de 49 matchs était relativement court. En ajoutant les 16 premiers matchs de cette saison, on réalise bien que le premier choix du repêchage de 2019 a réellement pris son envol. Avec sa récolte de deux buts et une passe mardi, il totalise maintenant 18 points en 16 matchs cette saison, et 74 en 65 matchs si on ajoute ses totaux de l’an dernier. L’ancien compagnon de Cole Caufield a été de toutes les attaques, terminant la soirée avec sept tirs. Il a également raté sa chance sur un filet ouvert comme un but de soccer en début de match.

Guillaume Lefrançois, La Presse

Ils ont dit

PHOTO ERIC BOLTE, USA TODAY SPORTS

Nick Suzuki (14) et John Marino (6)

Ils ont été dans notre face toute la soirée. On a été brouillons en sortie de zone et ils en ont tiré avantage en faisant du bon travail en échec avant. Ce n’était pas notre meilleur effort collectif. On doit répondre lors du prochain match.

Nick Suzuki

[Evgenii Dadonov] va continuer de montrer ce qu’il est capable de faire dans la LNH, ce qu’il fait depuis qu’il est dans la ligue. [En l’absence de Jonathan Drouin], il va y avoir moins de trafic autour de lui. Un peu plus de continuité va l’aider.

Martin St-Louis

Au cours des derniers matchs, on jouait [comme les Devils]. Ce soir, ils ont imposé leur propre jeu. On peut jouer à leur niveau, mais ce n’est pas arrivé ce soir.

Joel Edmundson

[Ce but] devait bien arriver un jour. Je me sens certainement mieux.

Evgenii Dadonov

Notre exécution n’était pas au point. Ça arrive. On n’était pas aussi précis qu’au cours des derniers matchs.

Jake Allen

On est une des équipes les plus rapides de la ligue. On courait après les rondelles, on travaillait, on créait beaucoup en échec avant aussi. C’était énorme. On ne leur donnait pas d’espace.

Nico Hischier

En deuxième et en troisième période, on comprenait quand [le trio de Suzuki] était sur la patinoire. On essayait de rester au-dessus d’eux, de ne pas leur donner de relance. On savait que si on pouvait jouer au-dessus d’eux, on allait limiter leurs occasions.

Lindy Ruff

En première période, il a fait quatre ou cinq arrêts sur des chances de qualité, le genre de chances qu’on n’a pas vraiment donné cette saison.

Lindy Ruff, au sujet du gardien Vitek Vanecek

Propos recueillis par Simon-Olivier Lorange et Guillaume Lefrançois, La Presse