Pour laisser partir ses joueurs, Kent Hughes avait averti qu’il attendrait des offres qu’il ne pouvait pas refuser. Celles-ci sont venues. À l’inverse, les deux joueurs qu’il voulait lui-même refiler à d’autres clubs sont encore des membres du Canadien.

Le directeur général du Tricolore a eu une journée occupée. Il a échangé l’attaquant Artturi Lehkonen à l’Avalanche du Colorado en retour du jeune défenseur Justin Barron et d’un choix de deuxième tour au repêchage de 2024.

Il a aussi envoyé le défenseur Brett Kulak aux Oilers d’Edmonton contre un choix de deuxième tour en 2022 et le défenseur William Lagesson. Et il a fait une fleur au gardien Andrew Hammond en troquant ses services aux Devils du New Jersey contre l’attaquant des ligues mineures Nate Schnarr. Le Canadien déboursera la moitié du salaire de Kulak et de Lehkonen jusqu’à la fin de la saison.

Voilà pour les belles surprises. Car à l’inverse, Hughes avait déjà averti qu’il tentait de trouver preneur pour les défenseurs Jeff Petry et Shea Weber. À ce compte, il n’a pas atteint son objectif.

« On n’a pas fait d’appels concernant Lehkonen et Kulak », a-t-il assuré en point de presse en fin d’après-midi, lundi, soit après que la période des échanges se fut terminée pour la saison 2021-2022.

Des équipes intéressées se sont manifestées au cours des derniers jours, et à mesure qu’approchait l’heure limite, « les échanges proposés se sont améliorés ». On est donc allé de l’avant. Presque jusqu’à la dernière minute, on croyait garder Lehkonen. L’offre de l’Avalanche, il ne pouvait pas la refuser.

Le téléphone a sonné concernant d’autres joueurs, a souligné Hughes, sans toutefois préciser lesquels.

Weber, Petry

Même si Kulak et Lehkonen, associés au Canadien depuis plusieurs années, étaient des joueurs appréciés dans le vestiaire, ils ont valu à leur ancienne équipe des retours considérables, supérieurs aux attentes des observateurs les plus avertis.

Le marché des défenseurs s’est enflammé au cours du week-end, ce qui a certainement fait augmenter la valeur de Kulak. Et l’Avalanche, qui se prépare à un long parcours en séries éliminatoires, cherchait à combler un besoin spécifique en payant chèrement les services de Lehkonen.

Voilà pour les bonnes nouvelles. Car les dossiers de Weber et de Petry sont complexes.

En ce qui concerne Weber, qui ne jouera plus en raison de blessures, on souhaite se défaire de son lourd contrat de 7,8 millions qui alourdira la masse salariale du club au cours des quatre prochaines années.

On est « passés proche » de trouver un terrain d’entente avec une autre formation, probablement les Coyotes de l’Arizona, qui souhaitent gonfler leur masse salariale afin d’atteindre le plancher imposé par la ligue. Les Coyotes ont toutefois acquis Bryan Little, des Jets de Winnipeg, dans la même situation que Weber, ce qui a « possiblement » coupé l’herbe sous le pied du Canadien, a admis Hughes. Il se dit toutefois « optimiste » qu’il pourra arriver à réaliser une transaction similaire avec une autre équipe dans le futur.

Quant à Petry, le directeur général a concédé à mots couverts que sa valeur n’était pas immense sur le marché. Son contrat d’une valeur annuelle de 6,25 millions, encore valide pour 3 ans, est sans l’ombre d’un doute un obstacle pour les équipes potentiellement intéressées à ce défenseur de 34 ans, qui connaît au demeurant, sur le plan individuel, sa pire saison depuis qu’il s’est joint au Canadien en mars 2015.

Il est connu que Jeff Petry souhaite être échangé afin de rejoindre sa femme et leurs enfants, partis vivre aux États-Unis il y a quelques semaines.

Hughes n’a jamais changé son discours à ce sujet : il est ouvert à « accommoder » son défenseur, mais seulement si un échange « fonctionne pour le Canadien ».

À l’évidence, même si le nom de Petry s’est retrouvé au centre de « conversations » avec d’autres équipes, le gestionnaire n’a pas trouvé ce qu’il cherchait. « Les contrats de plusieurs saisons avec des salaires élevés ne sont pas populaires à la date limite des transactions », a-t-il expliqué.

Souvent aux prises avec une masse salariale tout près du plafond en vigueur, les équipes qui aspirent aux grands honneurs cherchent, à ce temps-ci de l’année, à ce que leur interlocutrice retienne la moitié du salaire des joueurs en fin de contrat. Le Canadien a justement acquiescé aux demandes des Panthers, de l’Avalanche et des Oilers pour Ben Chiarot, Artturi Lehkonen et Brett Kulak, respectivement.

S’il échangeait Petry en déboursant une partie de son salaire, le Tricolore ne pourrait pas le faire seulement pour une seule saison, mais bien chaque année restante à son contrat.

« Ça rend les choses plus difficiles », a souligné Hughes.

Concessions

Pour que le numéro 26 trouve preneur, on devra probablement faire des concessions. Que ce soit sur le plan financier ou en acceptant un retour modeste, par exemple. Un journaliste a demandé au directeur général s’il serait enclin à utiliser l’un des nombreux choix au repêchage qu’il possède (14 en 2022, 9 en 2023) pour bonifier une offre impliquant le défenseur. Hughes a pris un moment pour réfléchir, avant de répondre : « Possiblement, mais comme DG, je dois me demander si on est mieux de garder Jeff Petry plutôt que de fournir des choix à une autre équipe pour qu’elle prenne son salaire. »

Et d’ajouter : « On verra. »

Sans avancer qu’il doive impérativement se débarrasser de Petry, cela aiderait certainement Hughes dans son travail au cours des prochains mois. Car, a-t-il dit, il aimerait « idéalement » se libérer de quelques contrats onéreux d’ici l’été prochain.

Le message de Kent Hughes reste le même : il souhaite améliorer l’équipe afin qu’elle trouve du succès sur une base pérenne, et non éphémère.

Il n’est pas dans ses intentions de garder le club dans les bas-fonds du classement général afin de systématiquement viser le premier choix au repêchage. Il n’empêche que « ça peut prendre un pas en arrière pour aller de l’avant ».

Il a aujourd’hui en main un nombre « substantiel » de choix, qu’il pourra utiliser directement pour repêcher de nouveaux espoirs ou encore comme monnaie d’échange. « Chaque occasion qu’on aura d’envoyer une équipe qui aura la chance de se battre pour accéder aux séries, on va le faire, a-t-il promis. On va continuer à avancer. »

En bref

Des moments stressants pour Kulak

Natif d’Edmonton, Brett Kulak s’est dit ému de se joindre à l’équipe de sa ville d’origine. Il n’a toutefois pas caché, en point de presse, avoir vécu des moments « tumultueux » à l’approche de la date limite des transactions, lui qui s’apprête pour la première fois à atteindre l’autonomie complète. « J’ai vécu quelques dates limites sans trop savoir, mais jamais en tant que [futur joueur autonome], a-t-il confié. J’étais nerveux pendant les derniers jours, mais je suis content de savoir maintenant où je m’en vais et où porter mon attention. » Choix de quatrième tour des Flames de Calgary en 2012, Kulak s’est joint au Canadien par le truchement d’une transaction mineure en 2018. À Montréal, il s’est établi comme un défenseur de soutien fiable, récoltant par ailleurs 45 points en 215 matchs. Le directeur général des Oilers, Ken Holland, était à la recherche d’un défenseur gaucher et estime avoir trouvé chaussure à son pied en Kulak. Il a notamment vanté sa « fiabilité pour transporter la rondelle ».

Une occasion pour Hammond

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

Andrew Hammond

Andrew Hammond a rendu de fiers services au Canadien. Acquis le 12 février dernier du Wild du Minnesota, il a remporté ses trois départs dans l’uniforme bleu-blanc-rouge et a permis au CH de céder Cayden Primeau, totalement déboussolé, au Rocket de Laval. Tout ceci alors qu’Hammond n’avait pas joué dans la LNH depuis plus de trois ans ! Or, avec le retour en santé de Jake Allen, et alors que celui de Carey Price semble de plus en plus imminent, une congestion se profilait devant le filet montréalais. Lorsque les Devils du New Jersey se sont enquis de sa disponibilité, Kent Hughes n’a donc pas hésité. « On trouvait qu’il méritait d’avoir une autre chance de jouer dans la LNH, a dit le DG. Je suis fier qu’il soit venu ici. Il nous a aidés à garder le bateau à flot. J’éprouve de la gratitude à son égard. » Hammond soigne présentement une blessure au « bas du corps ». Les gardiens Jon Gillies et Nico Daws se partagent la tâche au New Jersey.

Nouveau rôle pour Hughes

Avec toute l’activité des derniers jours, on en avait presque oublié que Kent Hughes vivait sa première date limite des transactions à titre de directeur général, après avoir passé jusque-là toute sa carrière comme agent de joueurs. Il a expliqué qu’il n’était « pas facile » d’appeler un joueur pour lui apprendre qu’il est échangé, et qu’il était pas mal plus « émotif » à l’idée de sacrifier un joueur pour des choix au repêchage que l’inverse. Il a également découvert les directeurs généraux sous un nouveau jour, bien qu’il ait déjà négocié des contrats avec la majorité d’entre eux. « Certains commencent bas et montent, d’autres commencent où ils aimeraient se rendre », a-t-il raconté. Il n’a pas senti qu’on tentait de profiter de son inexpérience à ce titre, quoique les boutades ont été nombreuses. « Ce que j’ai entendu plusieurs fois, c’est que pour la première fois de ma vie, le plafond salarial comptait ! »