(New York) « Si j’aime ça ? Ah, oui, oui. C’est différent… »

Nous avons toutes et tous déjà été prisonniers d’une conversation impliquant des rénovations qui nous laissaient de glace, et ce, malgré qu’on nous les décrive comme une version améliorée de la chapelle Sixtine.

C’est un peu le sentiment qui a habité le dynamique représentant de La Presse dépêché à Long Island pour le match du Canadien, dimanche dernier, en découvrant le UBS Arena, domicile des Islanders depuis trois mois à peine.

Parenthèse ici : affecté à la couverture du Tricolore depuis un peu plus de deux ans, je n’ai pas encore visité tous les amphithéâtres de la ligue, mais j’ai tout de même découvert, cette saison, le Climate Pledge Arena de Seattle et le Little Caesars Arena de Detroit, les deux derniers-nés de la LNH. Le premier est un véritable bijou architectural, alors que le deuxième épate autant par son majestueux hall d’entrée que par l’expérience dans l’enceinte donnant sur la patinoire. Fin de la parenthèse et retour à Long Island.

Les Islanders devaient impérativement déménager. Le Nassau Veterans Memorial Coliseum, utilisé depuis la fondation du club en 1972, tombait en ruine, et l’utilisation momentanée du Barclays Center, à Brooklyn, a été un échec.

Toutes sortes de scénarios infructueux ont été élaborés au début des années 2010, avec à la clé de bonnes vieilles disputes avec les différents ordres de gouvernement. Ce n’est qu’en décembre 2017 qu’on a enfin annoncé la construction d’un aréna de 18 000 places attenant au parc Belmont – la célèbre piste de courses de chevaux à l’est de Queens, pas le défunt parc d’attractions de Cartierville.

Arrivée tiède

Quand on se rend à l’aréna en voiture, l’arrivée par l’avenue Hempstead n’offre pas ce qu’on décrirait comme une explosion des sens. La façade sud de l’édifice, avec ses briques rouges et sa structure métallique verte, n’est pas très différente des stationnements étagés situés de l’autre côté de la route. Les autres façades, avec leur vaste fenestration, sont plus élégantes.

L’architecture du bâtiment s’inspire d’icônes new-yorkaises, par exemple Central Park et le terminal Grand Central, peut-on lire sur le site web officiel des lieux. Dans la courte liste de ses principales caractéristiques, on mentionne également le ratio le plus élevé de toilettes par personne de tous les arénas de la région métropolitaine de New York. Si vous n’avez pas la chair de poule, vous avez un cœur de pierre.

À l’intérieur, soulignons la chaleureuse présence du bois qui côtoie agréablement les œuvres d’art en tuiles, qui rappellent le métro. Une touche heureuse de la firme Populous, souligne à juste titre The Architect’s Newspaper. Mais pour l’« effet wow », épouvantable expression dont nous ne trouvons malheureusement pas d’équivalent, on repassera.

PHOTO FOURNIE PAR LA FIRME POPULOUS

Le hall d’entrée du UBS Arena

Dans l’enceinte, on a voulu conserver l’intimité du Coliseum grâce à une configuration large au plafond bas. À peine trois pieds de hauteur séparent le vieil édifice de son successeur, écrit Forbes.

Mission accomplie : malgré une foule éparse, dimanche dernier, certainement inférieure aux 17 255 personnes annoncées sur la feuille de match en tout cas, l’ambiance était dynamique. Les partisans du coin avaient la réputation d’être bruyants, ils ne se sont pas tus en se déplaçant de 10 kilomètres à l’ouest !

Autre parenthèse : l’amour entre ces fans et les légendes de la franchise demeure manifeste. Les chandails les plus visibles dans les gradins sont bien sûr ceux de Mathew Barzal et d’Anders Lee, mais nombreux sont ceux qui arborent le 22 de Mike Bossy ou le 19 de Bryan Trottier. À votre prochaine visite au Centre Bell, vous compterez le nombre de maillots de Larry Robinson ou de Serge Savard. Divulgâcheur : ce ne sera pas très long. Fin de la parenthèse.

La musique crachée par les haut-parleurs est forte, sans pour autant être assourdissante. On dit de l’acoustique des lieux qu’elle est exceptionnelle pour les concerts. Il faudra y retourner lors du prochain passage d’Alain Morisod pour en juger.

Tout cela étant, rien de tout ça n’a le côté enchanteur du Climate Pledge ou du Little Caesars, évoqués plus haut. Pour un édifice flambant neuf, érigé au coût de 1 milliard de dollars, on a opté pour une relative sobriété qui, malgré son efficacité, laisse un sentiment de relative banalité.

Les perdants

Les grands perdants de ce déménagement sont sans conteste les descripteurs de la télévision et de la radio.

Alors que les journalistes de la presse écrite sont plutôt bien installés, leurs homologues des médias électroniques sont juchés au plafond de l’enceinte, où une subtile conduite de ventilation les prive presque entièrement de contact visuel avec le tableau indicateur.

Pierre Houde et Marc Denis, de RDS, devaient notamment se pencher pour suivre les secondes qui s’écoulaient aux pénalités. Au moins, le studio qui leur a été attribué était situé au centre de la patinoire. Martin McGuire et Dany Dubé, du 98,5 FM, n’ont pas eu cette chance, eux qui ont suivi la partie de derrière la ligne des buts. Les joueurs étaient probablement plus gros sur vos écrans à la maison.

PHOTO SIMON-OLIVIER LORANGE, LA PRESSE

Point de vue de Pierre Houde et de Marc Denis, depuis le studio de RDS. On remarque l’accès limité au tableau indicateur. Devant eux, sur la tribune de la presse, leur collègue Luc Gélinas.

Mais bon, il tombe sous le sens que l’expérience des payeurs de billets surpasse celle des reporters qui couvrent les matchs. Et force est de constater qu’ils semblaient s’amuser ferme, et ce, même si leur club s’est incliné 3-2 en tirs de barrage.

Comme on est aux États-Unis, le traditionnel hommage à un militaire a été chaudement applaudi. Et une demande en mariage, pendant un arrêt de jeu, a comblé la foule. Madame a dit oui, au fait.

Somme toute, nous disons nous aussi oui au UBS Arena. Mais peut-être pas avec les yeux dans l’eau et des yeux amoureux.