(Anaheim) Où étiez-vous à l’automne 1941 ? Maurice Richard, lui, jouait pour le Canadien de Montréal, mais celui de la Ligue sénior du Québec, pas celui de la LNH.

Émile « Butch » Bouchard disputait la première de ses 15 saisons avec le CH. Avant de devenir un entraîneur, puis un avatar sur Twitter, Toe Blake était le meneur de cette équipe du Tricolore, avec des coéquipiers comme Bunny Dame, Cliff Goupille et Peggy O’Neill.

Si on vous parle de cette édition de 1941-1942, c’est parce que la présente édition du Canadien connaît le pire départ depuis cette époque. Avec une défaite de 4-2, dimanche, contre les Ducks d’Anaheim, le Tricolore se retrouve avec une fiche de 2-8-0, sa pire depuis son début de saison de 1-8-1 de l’automne 1941.

L’équipe allait même se rendre à 1-10-1. Mais les insuccès de l’équipe ne venaient peut-être pas bien haut dans la liste des priorités des gens. La 10e défaite est survenue le 7 décembre 1941, jour où quelque chose d’un peu plus grave se passait à Honolulu. Mais on s’écarte…

  • Troy Terry (à droite) célèbre son but marqué en troisième période avec son coéquipier Sonny Milano.

    PHOTO GARY A. VASQUEZ, USA TODAY SPORTS

    Troy Terry (à droite) célèbre son but marqué en troisième période avec son coéquipier Sonny Milano.

  • Joel Armia fait une incursion en territoire adverse.

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    Joel Armia fait une incursion en territoire adverse.

  • Troy Terry tente de déjouer Jeff Petry.

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    Troy Terry tente de déjouer Jeff Petry.

  • Mike Hoffman a secoué les cordages au premier engagement.

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    Mike Hoffman a secoué les cordages au premier engagement.

  • Trevor Zegras tente d’échapper à la couverture de Jeff Petry.

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    Trevor Zegras tente d’échapper à la couverture de Jeff Petry.

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Attentes démesurées ?

Nick Suzuki a donné le ton dans les entrevues d’après-match. Le Canadien est déjà démuni à la position de centre, et la blessure de Mathieu Perreault (voir autre texte) en rajoute sur les épaules de Suzuki et de Christian Dvorak.

Excellent au camp, bon en début de saison, Dvorak est nettement moins efficace depuis quelques matchs. Suzuki, lui, s’est surtout distingué sur de petits jeux ici et là, mais n’a rien généré de bien menaçant offensivement dimanche.

« Je m’impose toujours de la pression, je veux contribuer aux succès sur tous les plans. Toute ma carrière, j’ai voulu être un joueur d’impact, a rappelé Suzuki. Mais aujourd’hui, je n’ai pas fait grand-chose, honnêtement. C’est probablement un de mes pires matchs. Je suis déçu de ma rencontre, surtout avec nos absences au centre. Je dois mieux jouer. »

Réponse de Dominique Ducharme : « Des gars comme lui, comme Tyler [Toffoli] veulent en faire plus. Des fois, t’en fais plus, mais pas de la bonne manière. »

Après une prestation plus encourageante samedi, Cole Caufield n’a obtenu aucun tir dimanche et a été le joueur le moins utilisé de son camp à forces égales (en excluant Cédric Paquette, expulsé). Ducharme s’est fait demander si un séjour à Laval était une option pour son jeune ailier toujours en quête d’un premier but.

« Il se cherche, présentement. C’est plus compliqué pour lui. Avec la rondelle, il n’est pas comme on le connaît », a analysé l’entraîneur-chef, sans se prononcer sur un renvoi.

Puis est arrivée une question sur Alexander Romanov, coupable d’avoir laissé filer Troy Terry sur le but gagnant. Son partenaire, David Savard, avait quant à lui été incapable de neutraliser Ryan Getzlaf le long de la rampe.

« Quand t’as des joueurs qui ont des hauts et des bas de match en match, de présence en présence, de période en période, c’est plus dur à gérer », a rappelé Ducharme.

Les constats sont sans appel. Les entraîneurs vont souvent défendre leurs jeunes, rappeler qu’ils ont « seulement » tel âge, qu’ils doivent vivre un processus d’apprentissage. Mais Ducharme ne l’a pas fait.

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Le gardien Samuel Montembeault

Sur la patinoire, le coach peut « isoler » les jeunes en question, leur éviter des confrontations corsées, en demander un peu plus à des joueurs établis. Ducharme ne l’a pas fait non plus, mais pourrait-il même ménager les trois jeunes en question ?

L’an passé, Phillip Danault pouvait très bien s’acquitter des missions difficiles au centre. Il est parti, et Dvorak n’a pas encore atteint le niveau d’excellence défensive du Québécois. Jake Evans a raté quelques matchs. Ça en fait beaucoup dans l’assiette de Suzuki, qui a en plus ajouté le désavantage numérique à ses responsabilités.

Sur papier, le Canadien a de la profondeur aux ailes, mais avec Brendan Gallagher qui jouait visiblement blessé (il a raté le match de dimanche) et Toffoli au ralenti, cette profondeur est mise à mal. La production de Caufield serait la bienvenue.

À la ligne bleue, la perte de Shea Weber et l’absence de Joel Edmundson forcent Ducharme à employer Romanov dans son top 4.

Ces trois jeunes évoluent aussi dans un contexte où les attentes sont élevées. Suzuki a toujours dit que les siennes étaient très élevées ; ses propos d’après-match démontrent qu’il est sérieux. Le contrat de huit ans qu’il a signé il y a trois semaines confirme que l’équipe entretient elle aussi des attentes.

Caufield était vu par beaucoup comme un candidat au Calder cette saison. Il affrontait dimanche son bon ami Trevor Zegras, qui n’a pas aidé à calmer le jeu en lui prédisant sur Twitter une saison de 40 buts.

Et Romanov, à 21 ans, pourrait progresser à sa deuxième saison en Amérique du Nord, après une première campagne en deux temps.

Après 10 matchs, la progression attendue ne s’est pas matérialisée. Les jeunes ne sont bien sûr pas les seuls responsables. On a évoqué les cas de Toffoli et de Gallagher, et l’unité défensive en général traîne la patte.

Mais il sera intéressant de voir quelle gestion sera faite de ce qui constitue la relève de l’organisation. Avec une qualification pour les séries qui ressemble déjà à un objectif lointain, il faudra à tout le moins s’assurer que le développement des jeunes n’écope pas au passage.

On ne fait pas pousser une fleur en tirant dessus, aime bien écrire notre confrère Martin Leclerc. C’est le danger qui guette maintenant le Canadien.

Dans le détail

Trois semaines sans Perreault, minimum

Dominique Ducharme et Marc Bergevin ont un autre problème à régler au centre. Mathieu Perreault ratera en effet au minimum les trois prochaines semaines en raison d’un détachement de la rétine de l’œil droit. Dans une conversation informelle sur la passerelle, Perreault a dit avoir été opéré samedi soir, à Los Angeles, et il fera le point avec les médecins dans trois semaines. Le Québécois a aussi expliqué qu’il s’agissait d’une maladie dégénérative, dont les problèmes se déclarent généralement chez des personnes plus âgées. « Mais en raison de mon métier, ça s’est accéléré », a-t-il expliqué. Perreault comptait quatre points (trois buts et une aide) en huit matchs jusqu’ici. Son absence compliquera évidemment la donne derrière Nick Suzuki et Christian Dvorak. Jake Evans a offert une bonne performance à son retour au jeu dimanche, mais Cédric Paquette (expulsé en première période) n’est visiblement pas une solution au centre. Il sera intéressant de voir si Bergevin se tournera vers Laval avec l’équipe qui revient à Montréal cette semaine.

Le chat sort du sac…

Se pourrait-il que le très pénible début de saison de Jeff Petry soit le résultat d’une blessure ? Avant le match, Ducharme a indiqué que le défenseur chevronné représentait un cas incertain pour la rencontre. Petry a finalement été le joueur le plus utilisé de son camp, passant 25 minutes sur la patinoire. Le grand droitier a même finalement obtenu son premier point de la saison, une passe sur le but d’Evans, résultat d’une rondelle qu’il a tirée vers le filet. Le calendrier du Tricolore ne lui permettra pas vraiment de souffler, l’équipe jouant 10 matchs dans les 20 premiers jours de novembre. Parlant de blessure, Brendan Gallagher s’est quant à lui absenté. La nature de sa blessure n’a pas été précisée, mais le petit ailier droit a donné quelques coups de patin pendant l’échauffement, avant de déclarer forfait. « On va voir quand on va revenir à Montréal. En espérant que ce ne soit pas trop long. Ça peut prendre un petit peu de temps », a dit Ducharme.

Le héros du jour

Les moments de réjouissance sont également rares chez les Ducks cette saison, la victoire de dimanche étant seulement leur troisième en 10 matchs. Mais c’était la fête en troisième période, quand Troy Terry a donné l’avance aux siens. En y allant d’une habile redirection de rondelle vers Terry, Getzlaf a obtenu le 989e point de sa carrière, ce qui lui permet de battre le record d’équipe, propriété de Teemu Selanne jusque-là. Dès que Terry a marqué, les joueurs des Ducks ont quitté le banc pour converger vers Getzlaf et le féliciter. Mine de rien, c’était déjà un 10e point pour Terry cette saison. Lointain 148e choix en 2015, Terry avait fait monter les attentes en connaissant deux saisons fructueuses de 2016 à 2018, à l’Université de Denver. Il a aussi été productif dans la Ligue américaine, et voilà qu’à 24 ans, à sa troisième saison complète dans la LNH, on sent poindre une éclosion. À suivre dans les prochains mois.

Ils ont dit

Sans regarder la vidéo, je sais qu’on a eu quatre ou cinq chances de grande qualité, où on est bien placés, et on rate la cible, même avec un filet ouvert. C’est une question de confiance, de s’assurer que tu te donnes une cible plus grande au lieu d’essayer de la mettre dans un trou.

Dominique Ducharme

Ça fait partie de la progression d’un jeune. Il a joué en séries, aussi quelques matchs en saison. Amorcer une saison complète, c’est un différent défi. Ce n’est pas comme arriver à la fin de l’année, quand tu as déjà le rythme de ta saison.

Dominique Ducharme, au sujet de Cole Caufield

On cherche des solutions. Il n’y a pas un gars qui ne donne pas son maximum, on foncerait dans un mur pour notre coéquipier. On doit juste trouver des solutions. Notre rencontre nous a fait nous rendre compte qu’on forme une équipe unie.

Jake Evans, à propos des répercussions de la rencontre d’équipe de samedi

Sans Gallagher, des gars se sont levés. Mais on a pris trop de punitions. Ça tue notre énergie quand on joue trop longtemps en désavantage numérique. En troisième période, on a eu nos chances.

Nick Suzuki

Il m’a surpris. Il arrivait avec beaucoup de vitesse. Il a fait un petit flip avant. Je ne pensais pas qu’il était capable de sortir deux feintes comme ça. Je croyais qu’il était pour tirer ou me contourner. C’est décevant. […] Les gardiens ont besoin de réussir les gros arrêts. Je ne l’ai pas fait aujourd’hui.

Samuel Montembeault

En hausse 

Jake Evans

Pour un gars qui ne s’attendait pas à jouer en raison d’une blessure, il n’a pas paru du tout incommodé.

En baisse

Christian Dvorak

Il pilote le seul trio intact depuis le début de la saison. Mais c’est de moins en moins convaincant pour lui. Il n’a remporté que 38 % de ses mises au jeu dimanche, lui qui est généralement fiable sur ce plan.

Le chiffre du match

2

C’est le nombre de points que le Canadien ramène de son voyage de quatre matchs dans l’Ouest. On rappelle qu’aucune des quatre équipes n’est attendue parmi l’élite de la LNH cette saison…