Y a pas à dire, il est en train de se passer des choses étranges avec ce club… le genre de choses qu’on n’a pas vues depuis très longtemps.

Quelles sortes de choses, au juste ? Eh bien, par où commencer ? Des gars qui sortent de nulle part pour enfiler la cape du héros. Des acrobaties du gardien. Des bonds favorables de la rondelle… Voilà un peu ce que l’on voyait jadis, et assez souvent, dans un autre bâtiment situé pas trop loin de celui-ci, mais plus à l’ouest, avenue Atwater.

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Ceux qui ont connu les beaux jours du Forum vous le diront : la victoire de 3-2 du Canadien en prolongation, vendredi soir au Centre Bell, avait des allures de match du bon vieux temps. Dans le temps où les Bruins avaient trop de joueurs sur la glace, dans le temps où un but a été refusé à Alain Côté, dans le temps où Claude Lemieux surprenait Mike Liut avec un bâton qui n’était même pas le sien.

Dans le temps où les Bruins avaient trop de joueurs sur la glace, dans le temps où un but a été refusé à Alain Côté, dans le temps où Claude Lemieux surprenait Mike Liut avec un bâton qui n’était même pas le sien.

La cape du héros ? Cette fois, c’est Josh Anderson qui l’a portée. Le même Josh Anderson qui avait un seul but en 24 matchs, mais qui en a réussi deux en ce vendredi soir contre Vegas, et dans des circonstances dignes de l’époque des Fantômes du Forum ; le premier sur une sortie bousillée de Marc-André Fleury, le deuxième sur un lobe en apparence inoffensif, qu’il a capté de la lame de son bâton tel un aigle capte sa proie. La passe poétique de Byron a fait le reste.

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Josh Anderson (17) déjoue Marc-André Fleury après une bourde de celui-ci en troisième période.

Les acrobaties ? Carey Price a passé sa soirée à en faire, et à l’heure qu’il est, on peut présumer que ce pauvre Alex Tuch n’a pas dû passer une bonne nuit, parce qu’il a dû revoir et revoir dans sa tête le vol que Price lui a fait en pleine face en étirant la jambière. Si Tuch marque sur ce jeu, c’est fort probablement 2-1 Golden Knights dans la série.

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Carey Price bloque un tir d'Alex Tuch (89).

Mais ce n’est pas arrivé, et c’est plutôt le Canadien qui est en avance 2-1. C’est bien pour dire.

Les bonds favorables ? On vous ramène aux deux buts d’Anderson… C’est le genre de petits détails qui peuvent épuiser l’adversaire, qui commence à croire qu’il doit se battre contre… des fantômes, justement. « Lors de la prolongation, on a senti combien ils étaient fatigués », a d’ailleurs fait remarquer Anderson.

Cette journée folle avait commencé de très mauvaise façon, avec l’entraîneur Dominique Ducharme forcé à une retraite préventive en raison de ce qui allait s’avérer un test positif à la COVID-19. Ducharme a tout de même pu s’adresser aux troupes avant et après le match par Zoom, et le nouvel entraîneur (lui-même intérimaire !) Luke Richardson a expliqué que Ducharme avait tout de même pu aider à diriger le club à distance.

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Luke Richardson était l'entraîneur-chef lors de la rencontre en l'absence de Dominique Ducharme.

Phillip Danault a très bien résumé tout ça.

Cette journée a été à l’image de notre saison… le vent dans la face. Mais on trouve une façon de gagner. Ç’a été une grosse victoire. Et ç’a été à l’image de l’année au complet. Mon équipe, je la trouve spéciale.

Phillip Danault

Tout cela est très spécial, en effet.

Qui aurait pu prévoir un pareil scénario ? Il n’y a pas si longtemps, avec un retard de 1-3 dans la série face aux Leafs, on conjecturait sur l’identité du prochain coach et sur la journée de congédiement de Marc Bergevin. Si jamais Patrick Roy a pris la 20 à bord de sa voiture, il a probablement dû virer de bord une fois rendu au Madrid.

Ce n’est pas terminé, bien évidemment, et les Chevaliers dorés peuvent toujours s’en remettre. Mais des fois, il est bien difficile de vaincre un club dont la destinée semble tracée d’avance.

Le Canadien a eu ce genre de club en 1986 et en 1993. Force est d’admettre que le club de 2021 commence à ressembler à ça également.

Ils ont dit

On ne peut s’attendre à rien de la part des arbitres et il faut se concentrer sur notre jeu… On pense de tout cœur à Corey [Perry], qui a subi une assez bonne coupure en fin de match.

Shea Weber

On n’abandonne jamais. C’est la seule façon d’expliquer ce qui se passe en ce moment.

Carey Price

J’ai obtenu un bond chanceux sur mon premier but… Avant mon but en prolongation, je trouvais qu’on avait pas mal plus d’énergie qu’eux. Et Carey a été incroyable pendant toute la soirée, il nous a gardés dans le match.

Josh Anderson

Le but de Josh, le premier, ç’a été un gros but. Nous avons eu des bonds… et nous avons saisi notre chance aussi.

Phillip Danault

En temps normal, j’aurais cru diriger mon premier match dans la Ligue nationale lors d’une rencontre préparatoire, et non lors d’une rencontre de troisième tour des séries…

Luke Richardson

Propos recueillis par Richard Labbé et Simon-Olivier Lorange, La Presse

Dans le détail

Preuve à l'appui

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Corey Perry a reçu un autre coup de bâton au visage en prolongation, gracieuseté cette fois de Jonathan Marchessault. Le geste est toutefois demeuré impuni.

Ce n’est pas dans les habitudes de cette rubrique de montrer du doigt le travail des arbitres pour justifier les malheurs du Tricolore. Mais le duo composé de Chris Lee et de Dan O’Rourke a connu une soirée, le mot est faible, pitoyable. Nick Suzuki qui encaisse un coup d’épaule en plein visage de Brayden McNabb en deuxième période, puis qui est retenu de manière flagrante par Shea Theodore en prolongation : pas de punition. Corey Perry qui reçoit un coup de bâton au visage de Tomas Nosek en deuxième période : silence radio. Le même Perry qui reçoit un autre coup de bâton en prolongation, gracieuseté cette fois de Jonathan Marchessault : rien de rien. Sauf que sur cette dernière séquence, Perry a dû retraiter au vestiaire, le visage ensanglanté. Difficile de blâmer l’angle de la caméra pour interpréter le jeu, disons. Shea Weber a reconnu que son coéquipier avait été quitte pour une « grosse entaille », affirmant par contre qu’il s’en tirerait sans trop de conséquences. L’arbitrage ne doit pas retenir l’attention de son équipe, a-t-il ajouté. « L’important, c’est juste de jouer. C’est comme ça que l’on connaîtra du succès. »

Le mystère s’accentue

On ne croyait résolument pas parler autant de Chandler Stephenson dans cette série, à tout le moins pas s’il ne jouait pas. Mais ça devient un peu ridicule. Blessé au « haut du corps », le joueur de centre avait raté le match numéro 2 à Vegas, n’était pas de l’entraînement matinal vendredi et n’a pas joué dans le match numéro 3 en soirée. Le site web SinBin Vegas, qui suit les activités des Knights, a écrit sur Twitter que Stephenson avait subi une commotion cérébrale à la suite d’une mise en échec de Ben Chiarot au cours du premier match à Vegas et qu’il n’avait pas fait le voyage à Montréal. Pourtant, depuis jeudi, l’équipe répète que son statut est « au jour le jour ». Après la rencontre, vendredi, l’entraîneur-chef Peter DeBoer a sèchement balayé la question de La Presse à ce sujet, refusant d’y répondre sous prétexte qu’il s’en tiendrait aux questions sur la partie. DeBoer, au fait, cherche encore une solution pour remplacer Stephenson au centre de Max Pacioretty et de Mark Stone. Après Nicolas Roy et Keegan Kolesar mercredi, ç’a été au tour d’Alex Tuch et de Tomas Nosek d’obtenir un essai vendredi. Nosek, au fait, n’avait pas joué depuis le 18 mai.

La bourde de Staal

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Nicolas Roy a déjoué Carey Price à la suite d'une erreur d’Eric Staal.

Sans aucune compétition possible, le cadeau de la soirée a été offert à Josh Anderson par Marc-André Fleury. Mais on s’en voudrait de passer sous silence celui qu’Eric Staal a donné à Nicolas Roy. En début de deuxième période, avec une marque de 0-0, le joueur de centre du Tricolore a servi une passe parfaite, à partir de l’arrière de son but, à son homologue des Knights posté dans l’enclave. Roy n’en demandait pas tant et a déjoué Carey Price dans la partie supérieure du filet. Pour tout dire, ç’a n’a pas vraiment été le match de Staal, pas plus que celui de son trio – à tout le moins au cours des 60 minutes de jeu. Lorsqu’ils ont été réunis à cinq contre cinq en temps réglementaire, Staal, Joel Armia et Corey Perry ont été dominés 7-1 au chapitre des tirs au but, et ce, en étant principalement utilisés contre l’énergique trio de William Carrier, Tomas Nosek et Ryan Reaves. À classer dans la catégorie « peuvent faire mieux ».

En hausse

Josh Anderson

On le croyait disparu… mais il est réapparu avec deux énormes buts.

En baisse

Eric Staal

Un match très difficile pour ce vétéran, dont une énorme gaffe qui a mené au premier but des Golden Knights.

Le chiffre

6

C’est le nombre de victoires qu’il manque au Canadien pour obtenir la 25e Coupe Stanley de son histoire.