À un moment donné, les insuccès en avantage numérique vont finir par coûter très cher au Canadien. 

Cette fois, les dommages restent limités, malgré la défaite sans panache de 5-2 contre les Flyers de Philadelphie. C'est le 50e match de la saison, un match comme un autre au milieu de l'hiver montréalais. Le genre de défaite dont les conséquences ne sont généralement pas terribles, au fond. Les kilomètres du marathon où on ne voit plus le début, mais où on ne pense pas encore à l'arrivée. Ça peut arriver de lever le pied un peu, c'est humain. 

Le bilan du Canadien reste positif. Après tout, personne n'aurait parié sa maison et ses REER que le Canadien serait à un point des Maple Leafs de Toronto, et à égalité avec les Bruins de Boston, à ce stade-ci de la saison. 

Max Domi, avec son but d'hier, n'est plus qu'à un point de son total de l'année dernière. Tomas Tatar a déjà autant de points que Max Pacioretty dans toute la dernière campagne. Carey Price va bien. Antti Niemi va bien, malgré la défaite d'hier. Claude Julien n'hésite plus à utiliser l'auxiliaire pour reposer le numéro un. Le verre est plus qu'à moitié plein. 

Puis on prend le match d'hier. On essaie de l'insérer dans une analyse plus globale du cheminement de l'équipe. Et on arrive à une conclusion : l'avantage numérique va finir par couler le Canadien. Il l'a fait hier, c'est sûr qu'il le refera dans un moment où l'enjeu sera autrement important. 

Claude Julien n'a pas été tendre dans son point de presse. On le sent exaspéré. 

« On a demandé aux joueurs, ils n'ont pas la réponse. On la cherche, cette réponse. C'est frustrant à voir parce qu'on place dix de nos meilleurs joueurs sur la glace. La prise de décision, ce qu'on fait avec la rondelle, ils ne sont pas près d'être ce qu'ils devraient être. C'est dur à expliquer. On est meilleurs à cinq contre cinq qu'à cinq contre quatre avec les mêmes joueurs. Nous ne sommes pas menaçants en avantage numérique. On a fait un peu mieux pendant quelques semaines, mais ce soir, on était sans vie. » 

Difficile...

Contre les Flyers, le Canadien a obtenu un seul avantage numérique. Difficile d'en faire un résumé tant il n'a pas retenu l'attention. On croit bien avoir aperçu un tir de Jonathan Drouin du cercle. Le gardien des Flyers Carter Hart, dans une performance inspirée sous les yeux de son idole Carey Price, a éteint la menace sans peine. C'était tout. 

Les Flyers ont fait 1-0 une minute et demie après la fin de l'avantage numérique du Canadien. Une minute et demie plus tard, c'était 2-0. À partir de là, le Canadien a été forcé à jouer du hockey de rattrapage, le « momentum » tranquillement installé était mort et enterré. Tout ça, c'est la faute de l'avantage numérique, qui devrait pourtant faire exactement l'inverse. 

Le Canadien avait aussi trouvé le moyen de rentrer au vestiaire à 0-0 après la première période, même s'il avait mené 12-1 au chapitre des tirs au but. Et ce seul et unique tir des Flyers était un dégagement d'une distance de 182 pieds. Ça n'aide pas non plus.

Quelques chiffres : le Canadien est maintenant à 12,6 % d'efficacité en avantage numérique. Historiquement, depuis que la statistique est compilée (1977), le Canadien n'a jamais fait pire que 14 % sur une saison entière. C'était en 2002-2003, année où les Patrick Traverse, Doug Gilmour, Yanic Perreault et Craig Rivet avaient obtenu d'appréciables minutes à cinq contre quatre. Ironiquement, c'est la saison où Claude Julien avait relevé Michel Therrien comme entraîneur-chef. 

Le Canadien est mieux nanti aujourd'hui, aucun doute. On était loin des Weber, Drouin, Petry et autres Gallagher. Ce qui rend cette sécheresse encore plus fascinante. Julien a multiplié les essais pour trouver la formule gagnante. Toujours sans succès sur le long terme. Dix-sept joueurs ont eu leur chance à un moment ou à un autre. 

« Je ne sais pas comment l'expliquer, a analysé le capitaine Shea Weber. Vous me le demandez à chaque match, je n'ai pas de réponse. Si j'en avais une, on aurait déjà réglé le problème. » 

Claude Julien avait admis il y a quelques jours que l'avantage numérique avait besoin d'un électrochoc pour la deuxième moitié de la saison. C'était l'un de ses grands défis, probablement son plus grand. Ce l'est toujours autant.

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