Le Canadien a-t-il bien agi en laissant Nathan Beaulieu au banc des pénalités après qu'il eut reçu un dur coup de poing au visage plutôt que de le ramener au vestiaire? Les avis d'experts en la matière divergent sur cette question.

Le Dr Louis de Beaumont, neuropsychologue à l'hôpital du Sacré-Coeur, estime que le Tricolore a pris une bonne décision dans les circonstances. Il défend notamment l'entraîneur Michel Therrien, soulignant que ce dernier «n'est pas un spécialiste» et que «ce n'est pas lui qui doit déterminer» si un joueur a subi une commotion cérébrale.

Selon lui, toute l'affaire s'apparente davantage à une «tempête médiatique». «Si [Beaulieu] était retourné au jeu, ç'aurait été différent», précise-t-il en entrevue avec La Presse.

Son confrère Dave Ellemberg, directeur du Laboratoire de la neuropsychologie et du développement de l'Université de Montréal, n'est pas du même avis. À ses yeux, Beaulieu aurait dû retraiter immédiatement au vestiaire pour visiter la «chambre noire», où il aurait été soumis à divers tests pour déterminer s'il souffrait d'une commotion cérébrale.

«La première règle devrait être qu'aussitôt qu'on soupçonne une commotion, on retire le joueur du jeu. Et ça n'a pas été fait», martèle-t-il.

«S'il y a une urgence durant le temps où le joueur demeure sur le banc des punitions, on peut rater quelque chose.»

Le Dr Ellemberg s'inscrit également en faux par rapport aux commentaires de Michel Therrien voulant qu'entre «être assis au banc des punitions ou être assis dans une chaise berçante dans la chambre [noire], il n'y a pas grand-chose de différent».

«Au Centre Bell, il y a beaucoup de stimulation auditive et visuelle, fait-il valoir. Si [le joueur] souffre d'une commotion, ça pourrait amplifier la situation.»

Besoin d'un observateur indépendant

Là où ces spécialistes s'entendent, cependant, c'est sur la nécessité de faire appel à une personne entièrement indépendante pour détecter les possibles cas de commotion cérébrale au cours d'un match.

Cette saison, la LNH a modifié un de ses règlements de façon à envoyer un observateur (spotter) chargé de détecter les incidents lors desquels un joueur pourrait avoir subi une commotion cérébrale. Les équipes peuvent toutefois choisir d'embaucher leur propre observateur, qui remplace alors le représentant du circuit.

«Le spotter devrait être 100% neutre, et donc ne pas être embauché par les équipes. Tout comme les médecins devraient aussi être indépendants des équipes», juge le Dr Ellemberg.

«L'observateur ne doit pas avoir une influence sur l'allure du match. En même temps, il faut un mécanisme pour qu'il puisse intervenir rapidement. Il faudrait notamment qu'il puisse parler directement à l'arbitre», fait quant à lui valoir le Dr de Beaumont.

Photo Martin Chamberland, La Presse

Le Dr Dave Ellemberg, chercheur et neuropsychologue